Le 31 décembre 2008, trois expatriés MSF rejoignent leurs 70 collègues palestiniens dans la bande de Gaza. Nos équipes, présentes tout au long de l'offensive, rencontrent d'importantes difficultés pour accéder aux blessés. Du fait de l'insécurité, nos dispensaires ne peuvent pas fonctionner. Seule notre structure de Gaza ville est ouverte, mais les patients ne parviennent pas à rejoindre les centres de santé.
Le personnel palestinien MSF, équipé de kits médicaux d'urgence, consulte, soigne et fournit des traitements à proximité de chez eux, dans leur voisinage : 250 patients en bénéficient. Des donations de matériel médical et de médicaments sont effectuées dans les principaux hôpitaux de Gaza. Le 17 janvier, une première équipe chirurgicale d'urgence peut rentrer dans Gaza. Le 18 janvier, le cessez-le-feu est déclaré par les forces israéliennes. MSF fait entrer 21 tonnes de matériel médical dont deux tentes hospitalières gonflables.
Chirurgie spécialisée et secondaire. MSF concentre ses activités sur la chirurgie spécialisée et secondaire. Au plus fort de la crise, face à l'afflux de blessés dans des hôpitaux bondés, beaucoup de patients "non-urgents" n'ont pas pu être pris en charge. Nombre de blessés, soignés par des équipes d'urgences débordées, ont été déchargés trop rapidement ou bien sont restés chez eux, craignant pour leur vie. Parmi eux, beaucoup ont besoin d'une seconde intervention.
Des évaluations menées par MSF révèlent d'importants besoins en chirurgie spécialisée et secondaire pour les personnes blessées au cours des trois premières semaines de janvier : chirurgie orthopédique, greffes de peau pour des brûlures sévères, débridements des blessures, pose de pansements sous anesthésie générale. Parmi les blessés sévères, 20% ont des plaies infectées. Des patients sont identifiés via le porte-à-porte dans les zones les plus touchés par le conflit, ou par le personnel travaillant dans nos dispensaires de soins de réhabilitation. Les hôpitaux nous référent également des blessés. Enfin, des informations sur les soins chirurgicaux proposés par MSF sont également diffusées à la radio.
Entre 5 et 8 opérations sont menées chaque jour dans notre hôpital de campagne (comprenant deux blocs opératoires, une unité de soins intensifs de 12 lits et une unité de soins de réhabilitation). Notre activité chirurgicale permet d'alléger la charge de travail des hôpitaux palestiniens qui peuvent ainsi reprendre progressivement leurs activités habituelles (urgences et chirurgie programmée). Entre janvier et juillet 2009, 84 interventions orthopédiques et 278 opérations de chirurgie réparatrice ont été réalisées par les équipes MSF.
Adapter nos soins de réhabilitation. Plus d'un tiers des patients admis à partir de la mi-janvier 2009 dans nos dispensaires de soins de réhabilitation sont des enfants de moins de 15 ans, des femmes ou des personnes âgées. Chaque jour, plus d'une centaine de blessés, soit trois fois plus que la moyenne habituelle, se présentent dans notre structure. 9 nouveaux patients sur 10 souffrent de blessures liées à des explosions de bombes. Il s'agit le plus souvent de plaies par éclats multiples d'obus ou de fractures ouvertes.
Sur 100 nouveaux patients, 25% ont des plaies infectées et 45% supplémentaires présentent des risques élevés d'infection. Fait nouveau : beaucoup de cas de brûlures. Plus d'un nouveau patient sur dix, avec 10 à 15% de la surface corporelle touchée. Environ la moitié de nos patients aura des séquelles plus ou moins graves. Il faut limiter les complications et aider ces blessés à recouvrer autant que possible leur mobilité.
Un nouveau système de triage est mis en place. Les blessés légers et les patients proches de la guérison sont référés vers des centres de santé primaire locaux. Ceux qui ont uniquement besoin de kinésithérapie sont sur liste d'attente et les blessés de « Plomb durci » sont pris en charge par MSF. Un 3ème dispensaire est ouvert dans le Nord, particulièrement touché pendant l'offensive israélienne, et un 4ème au Sud, à la frontière égyptienne. Le nombre d'équipes mobiles est lui aussi accru. Enfin, nos critères d'admission sont ouverts aux cas de brûlures accidentelles sévères.
En 2009, 1 116 personnes ont été prises en charge et nos équipes ont réalisés 65 000 actes de soins. Un an après « Plomb durci », 85 patients victimes de l'offensive étaient encore suivies dans notre programme. Certains attendent encore leur prothèse, d'autres de bénéficier d'une opération de chirurgie orthopédique ou réparatrice pour limiter les complications fonctionnelles de leurs blessures.
Renforcer les soins psychologiques. Les soins psychologiques sont renforcés, notamment pour les personnels de secours (ambulanciers, équipes d'urgence et personnel paramédical), particulièrement exposés pendant l'offensive. Témoins directs des violences, ils ont été souvent confrontés à l'impossibilité d'accéder aux blessés et à la peur pour leur propre sécurité.
En trois semaines, ambulanciers, soignants et pompiers ont mené près de 1 300 interventions, l'équivalent de trois années d'activité « normale » Une aide psychologique est également proposée aux familles de ceux qui sont décédés alors qu'ils portaient secours.
Le traumatisme psychologique est lourd. Nombre de familles et d'enfants nécessitent un soutien psychologique et une psychothérapie. Fait très rare auparavant, plusieurs personnes sont venues d'elles-mêmes demander de l'aide à nos psychologues. Par ailleurs, le contact a été rétabli avec la plupart des patients déjà pris en charge avant « Plomb durci ». Notre équipe de psychologues a dû être renforcée.
370 nouveaux patients ont été pris en charge, plus de la moitié d'entre eux ont moins de 12 ans. La majorité présente des troubles psychologiques sévères liés aux traumatismes de l'offensive. L'objectif de notre thérapie courte est d'atténuer la souffrance psychique et d'accompagner la personne vers un retour à la vie normale. Cet objectif a été atteint pour 78% de nos patients.
Dr Annette Heinzelmann, responsable des programmes MSF dans les Territoires palestiniens depuis 2005
« Beaucoup de nos patients avaient été opérés pendant la phase aigue du conflit, dans des structures publiques. Juste après la fin de l'offensive, ils avaient besoin d'une chirurgie de reprise ou d'une opération de suite et les structures de santé de Gaza étaient encore débordées. Donc MSF a tenté de soulager le système de santé et d'offrir un accès aux soins à ces patients. »
« En 2009, il y a eu une forte augmentation des besoins en rééducation. Plusieurs milliers de blessés ont besoin encore aujourd'hui de soins de réhabilitation. MSF a donc augmenté son dispositif d'intervention et nous sommes passés de deux à quatre dispensaires de soins de réhabilitation pour répondre à ces besoins. »