Natacha Minissale a commencé à présenter des symptômes il y a trois mois. Des groupes armés rôdaient alors dans la région, rendant tout déplacement risqué ; ses parents ont donc tardé à la faire soigner. Alors que l’état de la fillette empirait, ses parents ont été informés par le chef du village de la présence de médecins MSF dans la ville voisine de Mboki qui traitaient les personnes atteintes de la maladie du sommeil.
Nous avons décidé de prendre le risque et de faire le voyage, » raconte son père.
La maladie du sommeil se transmet par la mouche tsé-tsé, et touche principalement l’Afrique centrale. Dans les premiers stades de la maladie, les personnes se sentent fébriles, puis une fois que le parasite pénètre dans leur système nerveux central, les symptômes évoluent, les personnes deviennent confuses, perdent leur coordination et souffrent de troubles du sommeil et de la personnalité. Leurs facultés mentales se détériorent jusqu'à ce qu’elles sombrent dans le coma - le long sommeil qui donne son nom à la maladie.
En juillet, une équipe mobile de MSF est intervenue pendant 18 jours à Mboki, dans la région du Haut-Mbomou, fournissant aux populations un dépistage précoce et un traitement contre cette maladie. Une semaine avant le début de l’intervention, des agents de santé communautaires se sont rendus dans la région pour mener, avec l'aide des autorités locales, une campagne de sensibilisation à propos de cette maladie et informer les populations de la possibilité de se faire dépister et traiter gratuitement.
Depuis 2006, le suivi et le contrôle de la maladie du sommeil dans cette région particulièrement isolée du sud-est de la RCA ont été très difficiles en raison des fréquentes attaques perpétrées par le groupe rebelle ougandais de l'Armée de résistance du Seigneur (LRA).
Au cours des 18 jours passés à Mboki, le personnel de MSF a pu dépister 4 534 personnes. Parmi elles, 30 étaient des cas suspects et six ont été confirmés. Actuellement, le traitement le plus commun de la maladie est une combinaison de nifurtimox-éflornithine (NECT). Bien qu’il représente un progrès par rapport au traitement antérieur, ce traitement reste compliqué à administrer, car il nécessite de multiples injections ainsi qu’un suivi régulier des patients. Autant de choses qui sont souvent indisponibles en Afrique sub-saharienne.
Enceinte de quelques mois, Marie-Claire figure parmi les personnes qui ont été diagnostiquée à Mboki par MSF. Afin de protéger son enfant à naître de la toxicité des médicaments, elle devra attendre le deuxième trimestre de sa grossesse pour commencer le traitement. D’ici là, le personnel MSF basé dans le Haut-Mbomou devra la surveiller de près.
Pour l'instant elle est en bonne santé, mais la maladie du sommeil est une maladie chronique et on devra évaluer son état de santé chaque semaine, » explique Brian D'Cruz, médecin de l'équipe mobile MSF.
Marie-Claire a de la chance d’avoir pu être diagnostiquée avant que la maladie ne provoque des dommages permanents. Mais pour d'autres, le traitement arrive trop tard. La petite Natacha est quant à elle décédée deux jours après son arrivée à l'hôpital Mboki.
Les spécialistes de la maladie du sommeil à MSF sont déterminés à réduire les nombreux décès liés à cette maladie en Afrique centrale. Au cours des dix dernières années, le nombre de cas de maladie du sommeil a diminué et les traitements se sont améliorés. Un obstacle majeur à l'éradication de cette maladie reste le manque de tests rapides et de médicaments facilement administrables par voie orale, afin de pouvoir être utilisés dans des zones isolées. Aujourd’hui, alors que deux médicaments par voie orale sont en cours d'élaboration, les programmes nationaux de prise en charge de la maladie du sommeil manquent toujours de personnel et de fonds.
Tant que la maladie du sommeil n’est pas éradiquée, MSF continue de s’efforcer d’améliorer l’accès à des soins de qualité aux personnes souffrant de cette maladie négligée, et pourtant dévastatrice.
Sortir les maladies négligées de l'oubli
Le mini-site "Sortir de l'oubli" propose de comprendre les enjeux qui entourent les maladies tropicales négligées.