« La situation était effroyable, raconte Sarah Lutz-Simon, responsable de l'équipe d'urgence de MSF au Sud Kivu. Lorsque nous sommes arrivés dans le village d´Itanga, tous les enfants malades avaient été rassemblés dans l’unique pièce du centre de santé. Il devait y en avoir une quarantaine, affaiblis, les yeux rouges, avec le nez qui coulait et des éruptions sur la peau... Je faisais partie de la première équipe arrivée dans la zone et nous ignorions le nombre exact de malades : on nous avait parlé de dix cas à la mi-décembre, mais leur nombre avait très rapidement augmenté. »
Il n'existe pas de traitement antiviral de la rougeole. Les tâches du personnel médical consistent donc à éviter la déshydratation, contrôler la fièvre, gérer les complications qui pourraient survenir, les infections des yeux, des oreilles et les pneumonies.
« En attendant confirmation des analyses, nous avons débuté la construction de zones d'isolement, dans le village d’Itanga tout d'abord, afin de libérer le centre de santé et de commencer les soins », explique Sarah. Les centres d'isolement temporaires construits par MSF sont basiques, avec une dizaine de lits en bois recouverts de plastique. En trois mois, ces centres ont été construits dans trois lieux différents, et six équipes ont été déployées afin de commencer le plus rapidement possible les vaccinations dans les villages, permettant ainsi de prévenir puis de mettre fin à l’infection.
Topographie et groupes armés : des difficultés de taille pour l’accès aux soins
Pour l’équipe d’urgence, la topographie de la région fut l'un des défis les plus difficiles à relever. « Cela nous a pris deux jours pour arriver à Bisisi depuis Bukavu, la capitale du Sud-Kivu. Nous avons dû marcher au moins cinq heures pour atteindre Idunga, ajoute Sarah. D´autres équipes MSF ont même dû marcher pendant trois jours afin d’atteindre les zones les plus reculées. »
Les équipes ont voyagé en hélicoptère afin de respecter la chaîne de froid et de conserver les vaccins à bonne température. Dans d’autres cas, les crues des fleuves ont obligé l’équipe à traverser un pont de lianes à la stabilité douteuse, chargée de tout l'équipement.
Les nombreux groupes armés de la région représentaient une autre difficulté lors de cette intervention. MSF a dû convaincre chacune des factions dominantes de chaque zone afin d’être autorisée à vacciner et à dépister les malades.
Une intervention à l’impact immédiat
Cette intervention, dont la couverture a atteint les 94%, a été d'une importance considérable. « L'impact est immédiat : le nombre d’enfants malades baisse en très peu de temps après la vaccination. Les gens étaient soulagés car eux aussi s’étaient beaucoup alarmés de cette épidémie. Ils n’avaient reçu aucune aide. » Au total, 352 enfants malades de la rougeole ont été soignés par MSF.
Dans la zone de Mulungu, les enfants ont également été vaccinées contre le pneumocoque, l'hépatite, les bactéries Haemophilus, la diphtérie, le tétanos et la coqueluche, ceci via une nouvelle combinaison de vaccins antigènes. Les équipes se préparent néanmoins au retour des cas de rougeole dans la région. La rougeole est l’une des maladies infantiles les plus mortelles, et ce alors même qu’elle est facilement évitable par la vaccination.