Malawi - Vivre avec le sida : succès et difficultés du traitement

En 5 ans, plus de 8.650 malades du sida ont débuté un traitement antirétroviral (ARV) dans notre programme dans la région de Chiradzulu, dont 5.500 sont toujours suivis par MSF. Nous estimons que les deux tiers des patients survivent grâce aux ARV. Mais le traitement est difficile à prendre pour les patients, qui subissent des effets secondaires parfois forts et sont vulnérables aux infections opportunistes du sida. Témoignages de patients.

« Je suis le numéro 1, le premier patient sous traitement antirétroviral à Chiradzulu », annonce fièrement Moutain. C'était en septembre 2001. Cinq ans plus tard, Moutain ne cache pas sa fierté de pouvoir à nouveau exercer son métier de garde forestier. « Je sais que le virus est toujours en moi, mais cela ne m'empêche pas de faire des projets, raconte cet homme de 37 ans. J'ai acheté un terrain et je veux construire une maison pour ma famille, mes deux enfants. Avant, je dépensais beaucoup d'argent pour acheter des médicaments et je m'inquiétais parce que je ne pouvais plus faire vivre ma famille. Je n'avais plus aucun espoir, je pensais que j'allais mourir. Aujourd'hui, je ne me vois pas comme une personne malade. »

Pas un jour sans médicaments
Jour après jour, Moutain continue de prendre son traitement antirétroviral, un comprimé le matin et un autre le soir. Comment fait-il pour ne jamais oublier ? A cette question, beaucoup de patients ont la même réponse : c'est la première et la dernière chose qu'ils font dans la journée. Et s'ils rencontrent des problèmes d'adhérence, c'est-à-dire qu'ils ne respectent plus correctement le traitement, alors des conseillers sont là pour les écouter parler de leurs difficultés, les informer et les accompagner. « Certains patients sont las de se rendre à la clinique et de prendre leurs médicaments tous les jours, mais nous leur disons toujours qu'il n'y a pas de vacances quand on est sous traitement antirétroviral, que c'est pour la vie », explique Jessie, une des conseillers.

Mais elle sait aussi qu'il peut-être très difficile de prendre ce traitement : « Certains patients doivent prendre cinq comprimés matin et soir, de gros cachets difficiles à avaler, dont certains peuvent rendre très malades : problèmes de sommeil, grande fatigue générale qui empêche de bien travailler ou encore fortes douleurs dans les jambes... » Les problèmes surviennent notamment au début du traitement antirétroviral ou en cas d'échec thérapeutique, quand le traitement n'est pas ou plus efficace.

Effets secondaires et infections opportunistes
A l'hôpital de Chiradzulu, Helen, 35 ans, semble beaucoup souffrir. Ses paupières sont collées et elle ne peut plus ouvrir les yeux, sa peau est constellée de plaques noires. C'est une réaction au traitement antirétroviral commencé deux semaines plus tôt et immédiatement stoppé. Un autre traitement ARV lui sera proposé plus tard, sans la composante à laquelle elle est manifestement allergique. Mais au lieu d'un comprimé deux fois par jour, Helen devra prendre plusieurs médicaments matin et soir.

Dans un lit proche, une autre patiente souffre de maux de têtes terribles et de nausées. Sous traitement ARV depuis seulement trois mois, elle est atteinte d'une maladie rare mais typique du VIH, la méningite à cryptococcose. Pour espérer guérir de la méningite à cryptococcose, cette patiente devra être hospitalisée deux semaines au minimum. Environ un patient sur dix décède dans les six premiers mois après le début du traitement antirétroviral, majoritairement en raison d'un stade trop avancé de la maladie.

Malgré la stigmatisation, le message passe
« C'est elle qui m'a dit d'aller me faire tester, elle m'a expliqué que si c'était le sida, je pourrais me faire soigner », explique Elaton, 52 ans, en montrant une dame devant lui, dans la queue pour la distribution des médicaments. Cette femme habite le même village que lui. Elle-même sous traitement antirétroviral, elle est venue lui parler lorsqu'elle l'a vu malade. « Mes proches connaissent mon statut mais pas mes collègues, ni les gens dans le village. Je ne veux pas que tout le monde le sache mais si quelqu'un est malade ou me demande comment je fais pour être en bonne santé alors que j'étais tellement malade, je lui explique et lui conseille d'aller se faire tester. » Comme lui, une partie des malades toujours en vie grâce aux antirétroviraux témoignent auprès des autres de l'importance de se protéger lors des relations sexuelles et de se faire tester. « Je leur dis, regardez-moi, je suis en pleine santé, vous ne devineriez jamais que j'ai le sida », déclare une femme sous ARV depuis plusieurs années. Elle a perdu son mari, cinq soeurs et elle élève seule neuf enfants, les siens et des neveux et nièces devenus orphelins. Dans plusieurs villages, des groupes de patients se sont créés. Ils sensibilisent la population au problème du sida et apportent de l'aide aux malades qui en ont besoin.

Notes

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