Le Mont Nyiragongo, un volcan situé à quelques kilomètres de Goma, la capitale provinciale du Nord-Kivu, en République démocratique du Congo (RDC), est entré en éruption le 22 mai. Fuyant la menace de nouvelles coulées de lave, des centaines de milliers de personnes ont été jetées sur les routes. Dans les jours qui ont suivi, les violentes secousses et répliques sismiques qui ont fissuré des routes et des bâtiments, dont certains se sont écroulés, ont déclenché l’évacuation partielle des populations, sur ordre du gouvernement. Dans la panique, les familles vivant dans les quartiers exposés ont fui plus à l’ouest, à Sake, vers le Sud, à Minova ou plein Nord, à Rutshuru. Une solidarité s’est alors mise en place pour aider ces déplacés qui manquaient de tout.
Faida Lumo habite Sake. Après l'ordre d'évacuer partiellement Goma le 27 mai, des milliers de personnes sont arrivées dans cette petite ville, sur les rives du lac Kivu.
Éruption en RDC : MSF intensifie sa réponse face aux besoins des personnes déplacées
« Mes enfants et moi avons déplacé les meubles pour accueillir autant de personnes que possible. Ce n'était pas suffisant, alors nous avons investi la maison de ma mère, juste à côté de la mienne », explique-t-elle.
Nous nous sommes organisés en équipes pour puiser l’eau.
Le choléra est une maladie endémique à Sake, qui possède un centre de traitement pour les patients qui sont régulièrement hospitalisés, où travaillent les équipes médicales du ministère de la Santé et de Médecins Sans Frontières (MSF). En quelques heures, la population de la ville a plus que doublé et il a fallu urgemment approvisionner en eau potable tous les nouveaux venus.
« L’eau, la nourriture, des toilettes, des abris, des couvertures, des bidons pour l’eau… tout manque. »
Au cours des quatre premiers jours d’intervention, l’organisation médicale a mis en place une capacité de stockage de 243 000 litres d’eau potable. Les réservoirs étaient remplis plusieurs fois par jour par camion-citerne. Des toilettes ont été construites et des distributeurs de chlore ont été installés près des sites de personnes déplacées.
La crainte de la propagation de maladies hydriques était réelle. Le soutien aux structures de santé et de traitement du choléra a été renforcé, non seulement à Sake mais aussi à Rutshuru et Minova, où des dizaines de milliers de personnes sont arrivées entre le 23 et le 28 mai.
« Le regroupement d’un grand nombre de gens sur des sites provisoires a généré des tensions. Heureusement que nous avons accès à des soins de santé gratuits », déclare Antoine Ngola Syntexe.
Dans toutes les villes qui ont accueilli, dans la plus grande urgence, les habitants de Goma, les produits essentiels manquent : la nourriture, qui est devenue chère, les ustensiles de cuisine, les couvertures pour les nuits froides de la saison sèche… Fatiguées, beaucoup de ces personnes déplacées ont décidé de revenir à Goma, sans attendre l’annonce officielle du gouvernement, malgré leurs craintes d’une nouvelle éruption.
Nous avons uni nos forces pour collecter des fonds et aider ceux qui n'ont plus rien.
C’est la décision qu’a prise Dieudonné Bizimungu, dont la maison a failli être engloutie par la lave. Sa famille et lui sont restés deux jours dans la ville de Kibumba, au nord de Goma, avant de revenir à leur domicile, faute d’assistance sur place.
De nuit comme de jour, nous continuons à ressentir la chaleur de la lave. Nous ne savons pas où aller pour fuir ce nouveau danger.
À Goma et dans ses environs immédiats, MSF fournit des soins de santé de base, ainsi que des médicaments et des articles d'hygiène aux personnes déplacées. Les équipes médicales ont renforcé les systèmes de surveillance et de contrôle du choléra dans quatre centres de santé de la ville, en collaboration avec les équipes du ministère de la Santé.
L’accès à l'eau reste l'un des plus gros problèmes des deux millions d’habitants de Goma : un quart d’entre eux en est privé depuis que la coulée de lave a endommagé le principal réservoir et les canalisations de la ville. Depuis le 22 mai, l'eau est devenue une denrée rare, et le lac Kivu, une source potentielle de contamination par le bacille du choléra. Nombreux sont ceux qui doivent se résoudre à acheter des bidons d’eau potable.
Jean-Claude Bazibuhe est vendeur d'eau à Goma depuis 17 ans. « Je fais partie de l'association des vendeurs d'eau à vélo de Goma, une structure qui nous permet en cette période particulière d'approvisionner les gens en eau potable, explique-t-il. La demande en eau potable a beaucoup augmenté. Mais, je ne veux pas profiter de cette situation pour faire de l’argent en doublant les prix. J’ai sept enfants, je comprends la difficulté de ces familles qui n’ont pas d’eau. »
« Quand la nuit est devenue rouge, nous nous sommes précipités hors de la maison pour fuir le danger, se rappelle Jean-Claude Bazibuhe. Deux de mes enfants se sont blessés et ils souffrent encore aujourd’hui. Ils se sont réfugiés à Minova, dans le Sud-Kivu. »
Depuis que le gouvernement a autorisé le retour progressif des populations, les besoins d’assistance humanitaire des habitants de Goma ont augmenté. La mobilisation de tous est nécessaire pour accompagner ces personnes au quotidien et assister au mieux ceux qui ont tout perdu. Jean-Claude Bazibuhe a récemment retrouvé sa famille et tous les enfants, de retour à Goma. « Désormais, c’est la faim qui les tenaille », déplore-t-il.