« A la fin de la première journée, plus de 900 migrants avaient déjà rejoint le camp de la Linière, principalement via les bus affrétés par la mairie. A la tombée de la nuit, l’atmosphère y était détendue : les gamins couraient, les femmes étendaient leur linge, les gens prenaient le thé sous le grand hall… Un retour à un semblant de vie normale après des mois de boue et de confinement sous les tentes », commente Angélique Muller, coordinatrice du projet à Grande Synthe.
Depuis des mois, les migrants survivaient sous des tentes de camping disposées au milieu de la boue, des ordures et des rats, dans des conditions de vie indignes et dangereuses. Le déménagement s’est effectué après un long travail de sensibilisation mené par les équipes de médiateurs MSF auprès des migrants, expliquant les conditions de déménagement et de vie sur le nouveau site.
« Les migrants n’en pouvaient plus, se sentaient déshumanisés. Le Basroch était une cocotte-minute où les tensions dégénéraient rapidement en violences. La principale inquiétude des migrants était que l’entrée dans le nouveau camp soit conditionnée à la prise d’empreintes, ce qui ne sera évidemment pas le cas », ajoute Angélique Muller.
Le nouveau camp, conçu à l’origine pour 2500 personnes (nombre de migrants présents en janvier 2016), sera constitué de 375 abris en bois chauffés, pouvant contenir chacun 4 personnes. 270 abris ont déjà été construits. Si les familles et enfants y sont désormais tous logés, certains migrants ont été provisoirement placés sous des tentes chauffées. Ils devront attendre que de nouvelles places soient créées, les abris en bois étant construits au rythme d’une vingtaine par jour. La construction a coûté 2,6 millions d’Euros à MSF, financé sur fonds propres.
Le camp ne sera pas géré par MSF mais par l’association UTOPIA 56, mandatée par la mairie. Il n’y aura pas de contrôle d’identité à l’entrée du camp, dont les entrées et sorties seront libres. Les associations locales et internationales qui ont fourni pendant des mois aide et assistance sur le camp de Basroch continueront à intervenir sur le nouveau site (distribution de nourriture, biens essentiels etc.). Elles participent en outre à l’amélioration de son aménagement, via la construction de structures communautaires (écoles, cuisines etc.).
« L'amélioration des conditions d'accueil des migrants était devenue une véritable urgence humanitaire. Elle est la seule réponse possible face au déni de réalité et d’assistance des pouvoirs publics, qui ne voulaient pas d’un nouveau camp et qui contestent toujours le bien fondé de son ouverture », dénonce André Jincq, responsable des programmes migrations à MSF. Il ajoute : « En Europe, la construction de camps humanitaires ne peut être qu’une solution provisoire pour les populations fuyant les zones de conflit ou d’instabilité ; les politiques et les pratiques en matière de migration doivent rompre avec les méthodes inhumaines employées aujourd'hui par de nombreux Etats censées dissuader des milliers de personne sans autre option de continuer leur exode ou de reconstruire leurs vies ».
Sur le nouveau camp, MSF se recentrera principalement sur ses activités médicales. La clinique mobile autrefois présente sur le Basroch a trouvé place dans un bâtiment dédié, en partenariat avec Médecins Du Monde, Gynécologues Sans Frontières et la Croix Rouge Française.
Le camp du Basroch, fin janvier :
Le nouveau camp de la Linière :