La Lavender House de MSF © Jean-Christophe Nougaret/MSF
« Au début, le dispensaire n’était ouvert que du lundi au jeudi, de 8h à 17h. Les habitants de Mathare n’ont pas facilement accès aux moyens de transport et beaucoup de violences, y compris sexuelles, ont lieu après 16 ou 17h, notamment du fait de la consommation de drogues ou d’alcool, et ne nous étaient alors pas signalées, explique Corinne Torre, la coordinatrice du projet. Nous avons donc ajouté des ambulances, ce qui nous permet d’aller chercher les patients partout dans les bidonvilles. Nous avons aussi mis en place un numéro de téléphone d’urgence, lorsqu’un cas nous est signalé, nous allons chercher le patient et le ramenons au dispensaire ». Désormais, la plupart des victimes (près de 80% en 2015) se présentent au dispensaire de MSF dans les 72 heures qui suivent l’agression. Ces adaptations du projet ont eu pour conséquence une augmentation exponentielle du nombre de patients : avant 2014, le dispensaire recevait en moyenne 150 nouveaux cas par an, contre 200 à 240 cas par mois en 2015.
« Le fait que nous recevions plus de patients ne signifie pas qu’il y a plus d’agressions à Nairobi. Cela est dû au fait que nous développé notre offre de services, afin qu’ils soient mieux adaptés aux besoins de la population, et à une meilleure information quant à leur existence », poursuit Corinne Torre.
Lorsque les patients ont besoin d’une aide supplémentaire que MSF ne peut pas leur fournir telle qu'un logement, une place dans un shelter [hébergement d’urgence], une aide juridique ou un examen radiographique, MSF les transfère vers des hôpitaux ou des structures appropriées. Ainsi, nous recevons de nombreuses femmes réfugiées violées, après avoir parfois déjà subi une agression sexuelle dans leur pays d’origine, et les référons à l’UNHCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés.
D’autres catégories de patients, particulièrement vulnérables, demandent également une attention particulière. Les enfants âgés de moins de 12 ans représentent 25% des patients reçus à la Lavander House. « Les enfants doivent bénéficier d’une prise en charge spécifique, car leurs besoins psychologiques sont différents de ceux d'un enfant plus âgé ou d’un adulte, explique Pascale Pynson, psychologue à la Lavander House. Dans 80% des cas que nous recevons, l'agression est commise par quelqu'un que l'enfant connaît. Le traumatisme est encore plus fort car c’est une personne avec laquelle cet enfant a créé des liens. Dans 10% des cas, les agresseurs sont des membres de la famille proche, comme le père, le beau-père ou parfois le cousin ou le frère. La violence survient dans un environnement où l’enfant doit normalement être et se sentir en confiance, mais celle-ci disparaît subitement. »
A Mathare, la plupart des enfants ont le soutien d’un tuteur. Lorsque ce n’est pas le cas, le dispensaire de MSF les met en contact avec d’autres jeunes victimes, ainsi qu’avec les services sociaux qui leur apportent une aide extérieure.
Une affiche sur laquelle est inscrit le numéro à appeler en cas d'agression. © Jean-Christope Nougaret/MSF