Le premier est la signature de la Déclaration de Doha en 2001, par laquelle les gouvernements se sont engagés à faire passer l’accès à des médicaments abordables avant les droits de propriété intellectuelle. Mais une décennie plus tard, la lutte pour l’accès aux médicaments dans les pays en développement continue.
L’Inde constitue une première ligne de fracture importante : elle produit la majorité des médicaments de qualité et bon marché utilisés dans les pays en développement, mais elle subit les attaques des entreprises pharmaceutiques et des pays riches, qui tentent de restreindre la production de médicaments génériques. D’autres pays à revenus intermédiaires se trouvent confrontés à des prix de plus en plus élevés. Le prix des vaccins constitue un nouveau point de discorde qui risque de perdurer ; pour la première fois, les plus grands acheteurs mondiaux ont publié leurs prix d’achat.
L’année 2011 marque également le dixième anniversaire de la décision de création d’un fonds pour lutter contre les maladies les plus mortelles des pays en développement : le VIH/sida, la tuberculose et le paludisme. Par le biais du Fonds Mondial, des sommes d’argent sans précédent ont été débloquées. Mais dix ans plus tard, le financement de la santé au niveau international a considérablement baissé, et le recul des pays donateurs place le Fonds Mondial dans une situation financière désastreuse.
Sans un renouvellement des priorités de santé aux niveaux politique et financier, les récentes avancées politiques et scientifiques semblent fragiles. Cette année, un essai clinique décisif a montré de manière concluante que le traitement du VIH constituait également une forme de prévention, laissant entrevoir la perspective d’inverser le cours de l’épidémie Il est toutefois nécessaire d’étendre le traitement à davantage de patients pour obtenir des résultats. Le nombre de personnes recevant un traitement de qualité contre la tuberculose résistante reste très faible, alors même qu’un nouvel outil de diagnostic pourrait mettre un terme au cercle vicieux d’une faible demande et d’un approvisionnement limité en médicaments. Par ailleurs, une subvention destinée à améliorer l’accès à de meilleurs traitements contre le paludisme a été accordée cette année, mais elle a contribué à faire tripler le prix des matières premières, ce qui a sérieusement remis en question son efficacité.
Les enfants victimes de malnutrition commencent à recevoir des aliments mieux adaptés à leurs besoins nutritionnels, mais en dehors des crises nutritionnelles médiatisées, les besoins de millions d’enfants malnutris restent sans réponse. Le manque d’intérêt des fabricants a entraîné une pénurie du principal médicament contre la maladie de Chagas, alors que les résultats d’études médicales et l’engagement des gouvernements plaident en faveur d’une extension du traitement. Les nouvelles recommandations pour le traitement de la méningite cryptococcique sont prometteuses, mais constituent également un cas d'école des obstacles à l'accès à des médicaments efficaces et abordables.
Ces éléments représentent quelques-unes des barrières empêchant les populations des pays en développement de bénéficier des soins médicaux. La Campagne d’Accès aux Médicaments Essentiels de MSF a été créée il y a un peu plus de dix ans. Avec d’autres partenaires, son but est d’éliminer certains des obstacles qui ont limité la capacité de MSF, en tant qu’organisation médicale humanitaire, à fournir aux patients les meilleurs soins possible. Dix ans plus tard, malgré de réelles victoires, la bataille n’est pas gagnée.