Du chaos aux soins médicaux : MSF reconstruit des services vitaux dans un hôpital de Mossoul détruit par la guerre

Un nouveau né dans l'unité de soins intensifs de l'hôpital Al Khansaa à Mossoul en octobre 2017.
Un nouveau-né dans l'unité de soins intensifs de l'hôpital Al Khansaa, à Mossoul, en octobre 2017. © Sacha Myers/MSF

Nicholas Papachrysostomou est chef de mission pour Médecins Sans Frontières (MSF) en Irak. Il a supervisé le projet de MSF dans l'hôpital pédiatrique universitaire Al Khansaa à Mossoul-Est, qui a récemment été remis au ministère de la Santé irakien.

Quel est l’état du système de soins de santé à Mossoul ?

La ville de Mossoul a connu des épreuves terribles et douloureuses avant d’en arriver là où elle est aujourd'hui. Dans l'Est de la ville, moins touché, la vie revient peu à peu à la normale mais la partie Ouest a été détruite.

L’accès aux soins de santé est très insuffisant et on constate une pénurie de services. Le matériel médical, le personnel médical et les médicaments manquent. Le nombre de personnes qui reviennent est en augmentation, mais très peu d'hôpitaux fonctionnent.

La plupart des hôpitaux sont fermés et quand ils sont ouverts, les patients doivent payer pour y aller. Pour nous, une somme de 2 000 dinars irakiens (1,45 euro) n'est rien, mais pour les personnes de retour à Mossoul, cela fait beaucoup d'argent. Si elles ont des enfants qui ont besoin d’être soignés, elles ne peuvent souvent pas se le permettre.
En outre, nombreux sont ceux qui doivent faire un long trajet à pied pour arriver à des structures médicales car ils n'ont pas les moyens de prendre un taxi ou des transports publics.

À quels problèmes ont été confrontées les équipes de MSF ?

Les personnes qui viennent à l'hôpital Al Khansaa souffrent souvent de diarrhées et d'infections respiratoires. Nous voyons aussi des patients qui viennent des camps et de Mossoul-Ouest souffrant de malnutrition. Ils n'ont pas accès à une alimentation normale.

Lorsque la ville était contrôlée par l’État islamique, le prix d'une boîte de lait maternisé était extrêmement élevé, donc les mères étaient obligées de diluer le lait pour leurs enfants. Les enfants nourris avec ce lait dilué perdaient du poids.

Un patient qui souffre de malnutrition sévère peut présenter différentes complications pouvant conduire à la mort. Son système immunitaire est en danger et son corps ne réagit pas normalement aux infections. Une petite infection peut alors entraîner la mort. 

C’est dans la partie Ouest de Mossoul que les problèmes sont les plus graves. MSF y intervient dans l’un des deux seuls hôpitaux fonctionnels, mais l’accès aux soins reste difficile car le nombre de gens qui reviennent est bien supérieur à la capacité des infrastructures sanitaires dans cette partie de la ville.
De même, beaucoup n'ont pas les moyens de payer un taxi ou les transports publics pour se rendre à Al Khansaa dans Mossoul-Est, et nous faisons face à des problèmes de suivi. De nombreux patients traités pour malnutrition aiguë sévère iraient mieux s’ils restaient à l'hôpital. Malheureusement, en général, ils rentrent chez eux et ne reviennent pas pour le suivi. Les patients que nous avons revus après une absence prolongée souffraient de nouveau de malnutrition aiguë.

L'hôpital Al Khansaa, détruit à 60% lors de la reprise de Mossoul des mains de l'Etat islamique.Octobre 2017 © Sacha Myers/MSF

L'hôpital Al Khansaa, détruit à 60% lors de la reprise de Mossoul des mains de l'Etat islamique.
Octobre 2017 © Sacha Myers/MSF

Qu'a fait MSF à l'hôpital Al Khansaa ?

Quand nous avons commencé à y travailler, c'était le chaos. C'était vraiment choquant de voir l'intérieur de l'hôpital, entièrement détruit.

Nous nous sommes attachés à rétablir les services essentiels dans cet hôpital, l'un des plus grands de Mossoul. Le but était de reconstruire une salle d'urgence. Nous avons restauré une unité de soins intensifs et rénové quelques chambres du service pédiatrique.
L'unité de soins intensifs est la seule en son genre à Mossoul. Il s'agit d'une petite unité avec quatre lits, mais si elle n'existait pas, les patients grièvement malades ne survivraient pas.
Notre équipe a aussi mis en place un programme de prise en charge de la malnutrition, avec des espaces pour l’hospitalisation et pour le traitement en ambulatoire des patients.

Notre objectif était de remédier au manque de soins de santé de base et d’assurer une amélioration de l’accès aux soins et des services offerts dans l’hôpital.

Il est extrêmement important que ce travail se poursuive. La remise en route de services médicaux vitaux est d'une importance capitale durant cette phase de reconstruction d'après-guerre à Mossoul.

MSF a effectué la passation du projet au ministère de la Santé en novembre 2017 après quatre mois de travail. MSF intervient également dans un autre hôpital à Mossoul-Ouest.

MSF a commencé à travailler en Irak en 1991 et dispense des soins médicaux aux communautés irakiennes vulnérables, aux familles déplacées et aux réfugiés syriens qui ont des difficultés à accéder aux services de santé. L'association travaille sur tout le territoire irakien dans les gouvernorats de Dohouk, Erbil, As-Suleymaniye, Diyala, Ninive, Kirkouk, Salah ad-Din, Anbar, Bagdad et Babylone.

Notes

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