Dans la bande
de Gaza, MSF travaille dans plusieurs enclaves aux accès strictement
réglementés et contrôlés (check-points*). Les populations qui y vivent,
quasiment enfermées, ne peuvent donc pas facilement accéder aux soins.
C'est pourquoi l'équipe de MSF (composée d'un médecin généraliste,
d'une psychologue et d'un travailleur social), se rend directement au
domicile des familles qu'elle suit. Dernièrement, dans certaines zones
comme Beit Hanoun, l'armée israélienne a mené plusieurs incursions,
détruisant des maisons, rasant champs et vergers... De fait, les
familles craignent d'autant plus de quitter leur habitation et de la
retrouver en ruines à leur retour. Entre gravats, moignons d'arbres et
immeubles criblés d'impacts de balles et d'obus, la bande de Gaza
présente un véritable paysage de désolation. Pourtant, dans les rues
des villes et villages, la vie s'efforce d'être menée : les magasins,
les restaurants ouvrent, les habitants circulent, vont même à la
plage...
A
Hébron, nos visites (médicales et psychologiques) à domicile se font
dans la vieille ville et dans les villages alentours. Là aussi, des
familles ont vu leur maison détruite et ont dû fuir. Ce lieu saint de
la religion juive abrite les tombeaux des patriarches (Abraham,
Jéricho, Sarah). La colonie prend ici une toute autre forme, car les
colons vivent dans la ville même, au milieu de la population et des
immeubles palestiniens et en camp fermé et isolé comme c'est le cas à
Gaza. L'enfermement se ressent dans la rue et non plus dans des
zones/enclaves aux accès limités ; Déjà parce que le couvre-feu qui y
prévaut fait d'Hébron une ville morte, où rien ne s'active, ni
habitant, ni commerce ; Mais aussi du fait des nombreuses maisons
occupées par des soldats en charge de la protection des colons, aux
toits recouverts de filets militaires kaki. Présence oppressante dans
un contexte de cohabitation forcée.
Jénine est le dernier
programme ouvert par MSF dans les Territoires palestiniens (en avril
2002). Ici, les consultations médicales et psychologiques ont lieu chez
les patients, mais aussi au bureau de MSF. A Jénine, les stigmates de
la guerre ne se portent pas sur les murs pourtant recouverts d'affiches
de martyres palestiniens ; Ils se manifestent en plein coeur de la
ville, là où se dressait le camp de réfugiés, réduit à néant par les
bulldozers lors de l'invasion par l'armée israélienne. Aujourd'hui, au
milieu des quelques bâtiments " survivants " éventrés : le " ground
zero ", une esplanade de plusieurs m², totalement rase. Les gens disent
que la poussière qui recouvre les arbres et ternit la ville provient de
ces maisons détruites.
Pour toutes ces familles qui vivent
enfermées chez elles, dans l'humiliation et la peur, les visites de MSF
remplacent bien souvent celles de la famille et des amis qui n'osent
plus se déplacer et venir. Le besoin de parler et d'être écouté se fait
sentir à chaque rencontre. Recueillir des témoignages est chose facile,
les gens se confient, veulent que "le monde sache" : trois récits pour
trois villes et trois contextes finalement pas si différents. Celle
d'une consultation psychologique à Beit Hanoun, dans la bande de Gaza ;
Ou comment, grâce au dessin et au jeu, aider un enfant à surmonter le
traumatisme lié à l'anéantissement de sa maison. Celle de deux familles
à Hébron, vivant depuis des années avec des soldats sur leurs toits.
Celle d'un enfant né à un check point à Jénine, en pleine nuit d'hiver,
parce que l'ambulance n'a pas eu le droit de passer.