Haïti - La population civile paie au prix fort la flambée de violence à Port-au-Prince

MSF appelle tous les groupes armés de la capitale d'Haïti à respecter la sécurité des civils et à permettre un accès immédiat aux soins médicaux d'urgence.

MSF appelle tous les groupes armés de la capitale d'Haïti à respecter la sécurité des civils et à permettre un accès immédiat aux soins médicaux d'urgence.


Face à l'intensification et à la propagation de la violence à de nombreux endroits de Port-au-Prince, l'organisation médicale humanitaire internationale Médecins Sans Frontières (MSF) appelle tous les groupes armés de la ville à respecter la sécurité des civils et à permettre aux personnes blessées lors d'affrontements un accès immédiat aux soins d'urgence. L'organisation demande également que la sécurité des secouristes et des travailleurs humanitaires soit respectée.

Ces dernières semaines, les équipes médicales et chirurgicales de MSF ont observé une augmentation alarmante du nombre de personnes ayant besoin d'un traitement pour des blessures liées à la violence, notamment des blessures par balle ou par arme blanche. En décembre 2005, MSF a soigné plus de 220 blessés par balle dans deux structures de soins - le centre de traumatologie de Saint-Joseph dans le quartier de Turgeau et l'hôpital Choscal à Cité Soleil.

Ce chiffre comprend 26 blessés par balle soignés les 26 et 27 décembre à l'hôpital Choscal et traduit une augmentation importante par rapport aux 147 blessés par balle pris en charge dans les deux structures le mois précédent. Près de la moitié des patients soignés par MSF pour des blessures liées à des actes de violence étaient des femmes, des enfants ou des personnes âgées.

"Il est inacceptable que tant de civils soient victimes de cette récente vague de violences", estime Ali Besnaci, chef de mission pour le centre de traumatologie de MSF à l'hôpital Saint-Joseph, dans le centre-ville. "Nous recevons des patients en provenance des quartiers de Saint-Martin, Centre-Ville, Martissant, Carrefour et d'autres zones de Port-au-Prince. Récemment, nous avons soigné un enfant de 15 mois et un homme de 77 ans pour des blessures par balle."

Depuis décembre 2004, les équipes médicales et chirurgicales à l'hôpital Saint-Joseph ont soigné près de 2.500 personnes pour des blessures liées à la violence, dont plus de 1.500 blessures par balle et 500 blessures par arme blanche. En août 2005, MSF a rouvert l'hôpital Choscal et le centre de santé de Chapi au coeur du quartier de Cité Soleil. Le personnel a assuré près de 12.000 consultations médicales et 800 interventions d'urgence au cours des trois premiers mois. Depuis le 1er janvier, MSF a soigné 47 personnes blessées par balle dans ses structures de soins à Cité Soleil.

Selon les témoignages des patients, la population est victime des tirs des différents groupes armés de la ville, de manière délibérée ou non. "Différents acteurs, dont la Minustah, qualifient les victimes civiles de 'dommages collatéraux'", observe Loris De Filippi, chef de mission pour les programmes MSF à Cité Soleil. "Mais il est inexcusable que tant de vies soient emportées chaque jour dans les échanges de tirs."
La situation à Cité Soleil - épicentre d'une violence généralisée, d'origine politique ou criminelle - est particulièrement grave pour ceux qui ont besoin de soins médicaux d'urgence. "Notre capacité de travailler à Cité Soleil est précaire. D'une semaine à l'autre, nous ne savons pas dans quelle mesure nous y aurons accès", explique Loris De Filippi. "La sécurité des travailleurs humanitaires doit aussi être respectée. Si nous ne pouvons pas faire notre travail, un quart de million de personnes - l'équivalent de la population d'une petite ville américaine ou européenne - aura peu d'alternatives en termes de soins."

Consternée par la flambée de violence en juin et en juillet 2005, MSF avait lancé un appel similaire aux groupes armés de la ville, leur demandant de respecter la sécurité des populations civiles et de garantir un accès immédiat aux soins d'urgence.

"La situation insupportable à l'heure actuelle s'apparente à ce que les Haïtiens ont enduré l'été dernier et nous craignons que cela ne fasse qu'empirer", explique Ali Besnaci. "La population vit constamment dans la peur et nous savons que de nombreux blessés ont peur de se déplacer ou sont empêchés d'avoir accès aux soins dont ils ont besoin. C'est tout simplement inacceptable."

 

MSF travaille en Haïti depuis 1991. Outre les soins de traumatologie d'urgence à Port-au-Prince, à l'hôpital Choscal et au Centre de santé de Chapi à Cité Soleil, MSF offre des services de soins de santé primaire à la population de la zone de Decayette, également dans la capitale haïtienne.

Notes

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