Plusieurs mois après le début de l'Intifada d'Al-Aqsa, la réalité
quotidienne des populations civiles confrontées à la violence est
extrêmement préoccupante. La violence de l'occupation israélienne, le
piège dans lequel est prise la population palestinienne, la
disproportion des moyens employés ont de lourdes conséquences pour les
civils qui les subissent. La répression israélienne prend des allures
de punition collective et les moyens militaires utilisés sont ceux
habituellement déployés dans les situations de guerre conventionnelle,
et non contre des civils.
Le
blocus économique imposé par Israël aux territoires palestiniens
fragilise encore une structure sociale déjà précaire et souligne
l'extrême dépendance dans laquelle sont maintenues les familles
palestiniennes.
De fait, les conditions de vie quotidienne de ces familles ne cessent
de se dégrader. Les Palestiniens vivent dans la peur permanente des
représailles de l'armée israélienne et des colons juifs. Leur
frustration à l'égard de l'Autorité Palestinienne augmente. Les
familles palestiniennes disposent de moins en moins de revenus pour
vivre. Les Palestiniens employés en Israël ne peuvent plus se rendre à
leur travail, la circulation des personnes et des biens est
régulièrement entravée.
Entraves quotidiennesSous
prétexte de prévenir des actes terroristes, des maisons palestiniennes,
situées à proximité de colonies juives, ou de routes utilisées par les
colons, sont rasées, réquisitionnées, en toute impunité ; des familles
palestiniennes se voient contraintes de fuir leur foyer en raison de
tirs réguliers contre leur village. Les intimidations et les
humiliations sont quotidiennes.
Les obstacles à l'accès aux
soins sont nombreux. Il est devenu difficile de circuler librement ;
les contrôles sont fréquents, longs et humiliants. Autant dire que,
pour certaines familles, il devient impossible de se rendre dans les
structures médicales palestiniennes ou d'avoir accès à un médecin. Pour
certains malades, la peur de voir leur maison réquisitionnée ou
détruite pendant leur absence est si grande qu'elle les pousse à
renoncer à se faire soigner. L'accès aux soins pour la population est
dès lors soumis à de nombreux aléas, alors même que la violence exercée
contre les familles palestiniennes et le climat de terreur dans lequel
elles vivent génèrent des états de stress et de peur panique très
intenses, réclamant une prise en charge soutenue.
Soutien psycho-médical à domicile aux personnes les plus exposées
Dans ce nouveau contexte de violence, Médecins Sans Frontières vient
d'ouvrir deux nouvelles missions d'assistance dans les Territoires
palestiniens. L'une dans la bande de Gaza, la deuxième dans la vieille
ville d'Hébron.
Adaptées à un contexte de violence très particulier, ces interventions ont pour spécificité de:
1 - rassembler des médecins et des psychologues dans une pratique clinique conjointe,
car les événements actuels provoquent à la fois des troubles
physiologiques et psychologiques : accentuation des pathologies
chroniques ou antérieures par le stress, colère, angoisses, peur "
d'avoir été empoisonné ", troubles du sommeil ou de l'alimentation...
La consultation médicale permet de détecter et de soigner les troubles
physiologiques. Parallèlement, le psychologue peut commencer un travail
thérapeutique permettant aux patients d'exprimer leur peur, de traiter
leurs traumatismes et de réduire leur stress.
2 - être axées sur des visites à domicile,
car les entraves opposées à la circulation des personnes ainsi que la
terreur ressentie par les patients les empêchent le plus souvent de se
déplacer pour consulter.
3 - s'adresser en priorité aux personnes (adultes et enfants) les plus exposées,
c'est-à-dire celles qui vivent à proximité de lieux d'affrontements, de
zones bombardées, de colonies juives ou de camps militaires israéliens.
Ce document présente les observations des équipes de Médecins
Sans Frontières dans les Territoires palestiniens recueillies depuis
novembre 2000, lors de leurs premières visites dans les familles. Les
extraits du journal de bord de l'équipe de Gaza, et le témoignage de
l'anesthésiste qui a travaillé dans l'hôpital de Qalqylia en
Cisjordanie décrivent, tous deux, les conditions de vie quotidienne des
familles palestiniennes, entre violences, peur, intimidations et
humiliations. Ils soulignent également les contraintes imposées au
travail des équipes médicales.