Philippines : "Ceux qui ne pouvaient pas survivre plus de quatre jours sont soit morts soit déjà évacués par avion"

Aéroport de Tacloban aux Philippines le 15 novembre 2013.
Aéroport de Tacloban, aux Philippines, le 15 novembre 2013. © Yann Libessart/MSF

Yann Libessart témoigne de la destruction et du chaos à son arrivée à Tacloban, ville frappée de plein fouet par le typhon. Grâce aux médicaments et à l’hôpital gonflable entièrement équipé qui devraient bientôt y être débarqués, les médecins MSF se préparent maintenant à apporter les premiers soins aux Philippines.

Tacloban, le 15 novembre,

Les avions commerciaux ont enfin repris leurs vols réguliers entre Cebu et Tacloban. Avant même d’atterrir, le point de vue sur la côte est terrifiant. Pas une maison qui n’ait été détruite.

Des milliers de gens se sont rassemblés à l’aéroport, venant chercher de l’aide ou espérant simplement être évacués. Aucune panique. Les gens font la queue dans le calme alors que certains attendent là depuis déjà plusieurs jours. Quand les soldats jettent des barres de chocolat à la foule affamée, tout le monde essaie d’en attraper une mais sans bagarre. Les soldats philippins sont incroyablement serviables et polis. En fait je ne me rappelle pas avoir jamais rencontré de soldats aussi sympas.

La solidarité est partout. Tout le monde partage le peu qu’il a encore. Les enfants jouent n’importe où, avec n’importe quoi. Je suis toujours stupéfait de voir comment les enfants réussissent à rester des enfants dans des situations aussi catastrophiques.

Le flux des survivants évacués croise celui des armées locales et étrangères, des ONG internationales et des journalistes qui viennent de tous les coins du globe. Personne ne sait où dormir le soir même. On a réussi à trouver un coin dans un hôtel pour y passer la nuit.

Partout c'est le chaos. Ne serait-ce qu’atteindre le centre ville est en soi un défi. Les véhicules en état de marche et avec le plein d’essence sont vraiment difficiles à trouver. La plupart des gens se déplacent en rickshaws.

Tacloban est jonchée de débris et de corps enveloppés dans des sacs. L’odeur est insupportable. Je partage un peu de mon baume du tigre avec les collègues qui n’ont pas de masque pour se protéger de cette puanteur.

L'équipe MSF cherche un terrain où monter son hôpital gonflable qui devrait arriver ce week-end par bateau. Ce matin, on a visité l’hôpital Béthany complètement abandonné et qui a subi de lourds dégâts. On espérait que ce serait la solution pour installer notre hôpital gonflable mais l’amoncellement de gravats est tel que ça nous prendrait certainement des semaines à dégager. Alors on continue de chercher.

Les informations sont extrêmement difficiles à obtenir même si le réseau de téléphone portable s’améliore peu à peu. Les agences gouvernementales se démènent et sont très efficaces, tout comme l'armée.

Il s'agit d'organiser un gigantesque système d’approvisionnement depuis Cebu. Une partie de nos médicaments et du matériel médical arriveront aujourd’hui par hélicoptère. Nos deux médecins devraient alors commencer à soigner les patients. Malheureusement, c’est déjà trop tard pour les personnes souffrant des traumatismes les plus graves dus au passage du typhon. Celles qui ne pouvaient pas survivre plus de quatre jours sont soit mortes soit déjà évacuées par avion. Ce qui nous importe maintenant, ce sont les blessures qui s’infectent et les urgences gynécologiques et obstétriques. A cause du manque d’eau potable, d’autres maladies liées à l'hygiène pourraient bientôt apparaître.

Les gens ont besoin d'à peu près tout. Ici à Tacloban, on est en ville. J’ose à peine imaginer à quel point la situation est encore bien pire dans les régions plus isolées.

 

Des équipes de MSF sont actuellement présents dans plusieurs zones touchées par le typhon, dont les îles de Samar, Leyte, Panay et Cebu.

Pour garantir son indépendance financière, MSF a besoin du soutien du public. Pour pouvoir agir aux Philippines, comme sur tous les terrains de l'urgence, MSF a lancé une campagne de mobilisation  #avecmsf
Pour agir aux côtés de nos médecins : www.avecmsf.fr

Dossier Urgence Philippines

Retrouvez notre dossier spécial consacré à nos activités aux Philippines.


Yann Libessart

Yann, membre de l'équipe d'urgence aux Philippines

Notes

    À lire aussi