« Si, il faut parler du viol »

« Diverses techniques telles que le jeu la relaxation et la gestion de l’anxiété ont été mises en place » explique Clare Brennan qui était en charge des soins psychologiques.
« Diverses techniques, telles que le jeu, la relaxation et la gestion de l’anxiété, ont été mises en place », explique Clare Brennan, qui était en charge des soins psychologiques. © Kiera Sargeant & Clare Brennan/MSF

En 2015, Clare Brennan était  en charge des soins psychologiques proposés par MSF aux victimes de violences sexuelles de la ville de Port Harcourt, dans l’Etat de Rivers, au sud du Nigeria. Selon elle, l’un des plus grands défis était, et demeure, de lutter contre l’idée qu’on ne devrait pas parler du viol ; parce que cet acte est tabou, honteux ou, pire, parce que la victime en serait responsable. Pour contrer ces a priori, MSF a mis en place une prise en charge et des activités adaptées, hébergées dans un cadre et un lieu d’expression, d’échange et de parole rassurant.

« J’ai compris assez vite qu’au Nigeria on ne parle pas de ses émotions. Déjà parce que la santé mentale est assez mal comprise, voire stigmatisée, mais aussi parce que la violence sexuelle n’est pas perçue comme étant « à part », différente des nombreux autres difficultés et problèmes que les Nigérians doivent  affronter tous les jours.

Du coup, on dissuade les victimes de partager leurs sentiments, surtout les enfants. Introduire le soutien psychologique pour les victimes de violences sexuelles au Nigeria demandait que l’on s’adapte aux besoins immédiats et à la réalité des victimes et de leurs familles.

Diverses techniques, telles que le jeu, la relaxation et la gestion de l’anxiété, ont été mises en place. Les parents étaient impliqués. Il fallait faire court, simple et « amusant » dans la mesure du possible. Et cela fonctionnait. Finalement, peut-être que nous compliquons trop les choses dans le monde occidental ?

Le personnel nigérian était enthousiaste et essentiel dans la mise en place de ces activités qui permettent d’amener un changement, de soutenir un processus de  guérison et donnent des résultats : les victimes vont mieux ».

Le problème des violences sexuelles est un phénomène connuet fréquent dans l'État de Rivers en général et dans la ville de Port Harcourt en particulier. Les agressions ont lieu dans le cadre familial et/ou du voisinage, ou bien sont le fait de l’importante violence urbaine notamment due aux activités des gangs mafieux.

En plus de la stigmatisation dont souffrent les victimes, l’offre de soins, médicaux et psychologiques, pour leur prise en charge spécifique n’existe pas. C’est pourquoi, en juin 2015, MSF a ouvert un projet de prise en charge des victimes de violences sexuelles, hommes, femmes et enfants, à Port Harcourt. En 6 mois, 190 personnes ont été prises en charge, dont 60% étaient âgés de moins de 18 ans et 25% de moins de 10 ans. Les patients sont amenés au centre MSF par la police dans 50% des cas ; les autres ont entendu les appels et explications que nous diffusons régulièrement sur la radio locale. Si la plupart de nos patients viennent juste d’être agressés, d’autres sont victimes de faits remontant à plusieurs années et dont ils/elles ressentent toujours les conséquences aujourd’hui.

Notes

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