Témoignages de femmes : Sarah, travailleuse en santé mentale au Pakistan

Une petite fille assise près des objets de première nécessité que sa famille a reçu via une distribution de MSF à Peshawar au Pakistan en 2009.
Une petite fille assise près des objets de première nécessité que sa famille a reçu via une distribution de MSF, à Peshawar, au Pakistan, en 2009. © Eymeric Laurent-Gascoin

MSF est présente au Pakistan depuis le début des années 1980 et fournit aujourd'hui des soins obstétricaux d'urgence aux populations vulnérables, qui comprennent les réfugiés afghans et les personnes déplacées.

Sarah Dina travaille au département de santé mentale MSF au Pakistan.

« Pour beaucoup de gens, raconter leur histoire c’est parcourir la moitié du chemin vers la guérison. Nous ne pouvons pas soulager leur douleur dans sa totalité. Mais nous pouvons être là pour eux. Pour leur tristesse, leur culpabilité et leur peur.

Imaginez prendre la décision de quitter votre pays d’origine, le lieu de votre naissance, votre enfance, votre peuple, votre pays. Imaginez quitter votre maison verrouillée mais toujours meublée, laissant des boîtes et des valises de ce que vous ne pouvez pas emporter avec vous. Vous ne pouvez pas les emporter parce que vous partez à pied. Vous ne pouvez pas voyager à travers les montagnes en voiture. Les routes ne sont pas bonnes, et même si elles l'étaient, vous pourriez vous faire arrêter.

Imaginez que vous partiez parce que vous avez peur. Peur d’être tué. Peur que votre sœur soit violée. Peur que votre frère soit abattu.

Imaginez qu’avant de partir, vous voyiez les cadavres de plusieurs membres de votre famille. Imaginez que leurs corps ne soient pas intacts. Ils sont en morceaux. Une jambe, à quelques mètres du corps auquel elle appartient, un bras dans l'autre direction.

Imaginez la peur d’être resté. Imaginez la culpabilité d’être parti.

Imaginez que pour une randonnée d'un mois à travers la montagne en quête de sécurité, vous ayez peu de nourriture et d’eau. Vous avez d’abord des ampoules sur les pieds causées par les chaussures, puis des coupures aux pieds à force de marcher pieds nus.

Imaginez avancer dans la neige, sur une pente raide, en se cachant dans les buissons dès que vous entendez une explosion.

Imaginez que vous croisiez en chemin des enfants abandonnés par leurs parents car il devenait impossible de les porter plus longtemps sur un terrain accidenté et dans des conditions aussi difficiles.

J'ai essayé d'imaginer ce que ces parents ressentaient. Mais je me suis arrêté. C'est trop douloureux de penser à leur douleur. »

Dossier Journée des femmes

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Notes

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