Territoires palestiniens - Grève dans le secteur de la santé

La tension a monté d'un cran lors des manifestations qui se sont déroulées dans les Territoires palestiniens. Les fonctionnaires poursuivent leur grève, notamment dans le secteur de la santé. Ce qui provoque de graves perturbations. Laura Brav, chef de mission à Jérusalem, décrit la situation actuelle et ce que MSF s'efforce de faire.

La situation est actuellement très tendue dans les Territoires palestiniens. Comment arrivez-vous à travailler ?

Lors des affrontements inter-palestiniens à Gaza, le 1er octobre, nous avons suspendu toutes nos activités. Et le lendemain, nous avons réduit nos déplacements à Gaza et en Cisjordanie, pour parer au risque d'éventuels affrontements. D'une manière générale, nous pouvons être amenés à restreindre nos déplacements, pour des raisons de sécurité. A Gaza, nous devons parfois annuler des consultations dans nos centres de Beit Lahya et de Beit Hanoun, et annuler des visites à domicile dans d'autres endroits s'il y a des bombardements ou des incursions de l'armée israélienne. Et les patients peuvent aussi avoir des difficultés pour se déplacer et venir dans nos centres.

L'Autorité palestinienne ne peut plus payer les salaires de ses fonctionnaires depuis la suspension de l'aide financière internationale au début de l'année. Quelles sont les répercussions de la grève des fonctionnaires dans le secteur de la santé?

Depuis février, l'Autorité palestinienne n'a pu verser qu'une petite partie des salaires. Les fonctionnaires du ministère de la Santé n'ont reçu que trois paiements partiels en sept mois et ils font grève pour réclamer le paiement de leur dû. De ce fait, les services de soins sont très sévèrement perturbés en Cisjordanie. Les urgences ne sont assurées que pour les cas extrêmement graves dans les hôpitaux publics. Quand une femme doit accoucher, elle ne peut aller dans les maternités des hôpitaux publics, parce qu'elles sont fermées. Si elle se présente dans une clinique privée, elle doit avoir l'argent pour payer les frais médicaux sinon elle est renvoyée chez elle, à moins que le travail soit vraiment trop avancé.
De plus, presque tous les centres de santé sont fermés : il n'y a donc plus de consultations pré-natales, de références aux hôpitaux pour des interventions chirurgicales ou des grossesses à risque, ni de prescriptions pour les maladies sévères, et même presque plus de vaccination.

Depuis plus d'un mois, les pharmacies rattachées au ministère de la santé sont fermées dans toute la Cisjordanie, pour cause de grève. Comment fait-on pour avoir des médicaments?

Les personnes qui ont besoin d'un médicament, par exemple pour une maladie chronique sévère, font le tour de toutes les pharmacies, des ONG (organisations non gouvernementales) humanitaires et des centres de soins de l'ONU avec l'espoir que quelque part, quelqu'un va finir par leur donner le médicament qu'elles recherchent. Il y a des pharmacies privées, mais les populations les plus démunies - et elles sont nombreuses du fait de la quasi-paralysie de l'économie avec le blocage des territoires - n'ont pas les moyens d'y acheter de médicaments. Il leur faut donc sans cesse recommencer. Aller frapper à une porte, puis à une autre... Et cela peut prendre une journée entière. Ceux qui sont trop malades pour faire cet effort peuvent envoyer un membre de leur famille, mais cela est pratiquement impossible pour ceux qui habitent un village isolé et doivent passer par un checkpoint pour aller à une pharmacie.

Que font, face à cela, les équipes de Médecins Sans Frontières?

Pour pallier les pénuries de médicaments provoquées par les difficultés financières du ministère de la Santé, nous avions commencé, dès mars, à faire des donations de médicaments très ciblées aux hôpitaux publics d'Hébron et de Gaza. Puis pour remédier aux pénuries croissantes constatées à Hébron, nous avons ouvert, en août, une salle de consultation où les patients peuvent recevoir certains médicaments essentiels qui ne sont plus disponibles dans le système de soins palestinien, pour des pathologies chroniques sévères. Maintenant avec la grève, nous avons élargi la gamme des médicaments proposés pour permettre à ces malades de poursuivre leur traitement.
Par ailleurs, nos psychologues et psychiatres continuent de suivre les patients qui ont besoin d'un soutien psychologique, dans cette situation difficile marquée par le conflit israélo-palestinien et l'effondrement de l'économie.

Notes

    À lire aussi