Au Cameroun, Médecins Sans Frontières contrainte de retirer ses équipes de la région du Nord-Ouest

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Felix a été attaqué par des hommes armés qui lui ont coupé la main gauche. Il s'est rendu à l'hôpital St Mary Soledad, soutenu par MSF, à Bamenda, dans le nord-ouest du Cameroun, où des chirurgiens et des médecins l'ont soigné et lui ont apporté un soutien psychologique. Mars 2020 © Albert Masias/MSF

Après près de huit mois de suspension par les autorités camerounaises, l’organisation médicale humanitaire Médecins Sans Frontières (MSF) se voit contrainte de retirer ses équipes de la région du Nord-Ouest, durement affectée par des années de violence armée entre forces de sécurité et groupes armés séparatistes.

« Nous ne pouvons rester plus longtemps dans une zone où nous ne sommes pas autorisés à offrir des soins à la population », explique Emmanuel Lampaert, coordinateur des opérations de MSF pour l’Afrique centrale. « Nous n’avons donc d’autre choix que de retirer nos équipes. Nous garderons toutefois un petit bureau de liaison à Bamenda, la capitale régionale, afin de poursuivre le dialogue avec les autorités. »

Depuis 2018, MSF assurait des soins médicaux d’urgence et un service d’ambulance gratuit dans la région du Nord-Ouest. En décembre 2020, les autorités camerounaises y suspendaient toutefois leurs activités [1], officiellement jusqu’à ce que son cadre de collaboration avec le gouvernement soit revu. Cette décision intervenait cependant après une série d’allégations accusant MSF de soutien aux groupes armés locaux, accusations que MSF a sans cesse catégoriquement rejetées, que ce soit dans ses échanges avec les autorités ou dans l’espace public[2]. En dépit de mois d’échanges avec les autorités, aucune reprise des activités n’a jusqu’ici été accordée.

« Cette suspension réduit considérablement l’offre de soins disponible dans une zone où les populations sont particulièrement affectées par les violences », poursuit Lampaert. « Mais nous voulons croire que la fourniture d’une aide médicale humanitaire pour tous, sans distinction, reste possible. La population paie un très lourd tribut de cette situation. Si les autorités décident de lever notre suspension, nous reprendrons nos interventions médicales au plus vite. »

Depuis 2018, MSF était l’une des rares ONG internationales à offrir des soins gratuits aux populations du Nord-Ouest, et assurait le seul service d’ambulance gratuit disponible jour et nuit. Chaque année, plusieurs dizaines de milliers de patients bénéficiaient de son appui dans une région où l’accès aux soins s’est considérablement réduit du fait de la violence armée.

Près de quatre années de crise ont entraîné le déplacement de centaines de milliers de personnes, et un grand nombre de structures sanitaires ne sont plus fonctionnelles. L’accès aux structures de soins reste difficile pour une partie de la population du fait de contraintes financières, sécuritaires et géographiques.

« Il est fondamental que d’autres organisations viennent apporter un soutien  supplémentaire au ministère de la Santé pour garantir des soins aux populations vulnérables de cette région », poursuit Emmanuel Lampaert. « Mais cela doit se faire dans le respect absolu des patients, des structures et du personnel de santé », souligne-t-il. « Depuis 2018, nous avons été témoins de nombreuses attaques et intimidations à leur encontre. Nous en avons été victimes aussi. Si nous sommes aujourd’hui contraints de réduire notre présence, nous appelons toutes les parties à respecter les acteurs de soins de santé, qu’ils soient membres d’organisations non-gouvernementales ou du ministère de la Santé. Toute menace ou violence à leur encontre ou à l’encontre des patients est inacceptable. »

En 2020, jusqu’à la suspension de ses activités le 8 décembre, les équipes de MSF dans le Nord-Ouest ont soigné 180 survivantes de violences sexuelles, assuré 1725 consultations de santé mentale, effectué 3272 interventions chirurgicales et transporté 4 407 patients en ambulance, dont plus de 1000 étaient des femmes sur le point d’accoucher.

Les travailleurs de santé communautaire soutenus par MSF ont assuré 42 578 consultations, principalement pour des maladies comme le paludisme, la diarrhée et les infections des voies respiratoires. Le personnel médical de MSF a également soigné les victimes directes des violences armées dans la région, dans le strict respect des principes du droit international humanitaire, de l'article 3 commun des Conventions de Genève et de l'éthique médicale.

[1] https://www.msf.fr/communiques-presse/cameroun-la-suspension-des-activites-imposee-a-msf-dans-le-nord-ouest-prive-des-milliers-de-personnes-de-soins-vitaux

[2] https://www.msf.org/fr/msf-rejette-les-all%C3%A9gations-de-soutien-%C3%A0-des-groupes-arm%C3%A9s-dans-le-nord-ouest

Notes

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