Gaza : après le silence d’Emmanuel Macron en Israël, MSF rappelle l’urgence absolue d’une pause humanitaire

Vue aérienne de Gaza détruite
La situation n'a cessé de se détériorer depuis l'éruption de la guerre entre Israël et Gaza. Octobre 2023.  © Mohammed ABED

Alors que s’est achevée la visite au Proche-Orient d’Emmanuel Macron, Médecins Sans Frontières (MSF) regrette son refus d’évoquer une pause humanitaire à Gaza, qui faisait pourtant partie des objectifs annoncés par l’Elysée.

« Tous les efforts pour acheminer de l’aide à la population de Gaza – y compris ceux annoncés en Egypte par Emmanuel Macron ce mercredi - sont aujourd’hui vains si les bombardements se poursuivent avec cette fréquence et cette intensité », déclare Sarah Chateau, responsable des programmes de MSF en Palestine. « Depuis deux semaines, rien ne laisse espérer une accalmie. Nous demandons à la France d’utiliser les moyens d’influence dont elle dispose pour obtenir une pause humanitaire, afin que la population obtienne un peu de répit, et qu’un dispositif d’aide humanitaire digne de ce nom se mette enfin en place ».

MSF appelle la France à soutenir toutes les initiatives diplomatiques à venir, notamment au sein du Conseil de Sécurité des Nations Unies afin d’obtenir une telle pause. Deux précédents projets de résolution, présentés les 16 et 18 octobre, demandant respectivement un cessez-le-feu et une pause humanitaire, n’ont pas été adoptés.

Selon les chiffres publiés par les autorités sanitaires à Gaza, près de 5 800 personnes ont été tuées et 18 000 ont été blessées par les bombardements israéliens depuis le 7 octobre, faisant suite aux tueries de masse commises par le Hamas en Israël, qui ont fait 1 400 morts selon les autorités.

« Un si grand nombre de victimes en si peu de temps, c’est inouï, même si on le compare aux précédentes offensives israéliennes de grande ampleur sur Gaza : le nombre de morts en deux semaines est déjà plus du double de celui de la ‘guerre des 50 jours’ de 2014 », explique Sarah Chateau, responsable des programmes de MSF en Palestine. « Quant aux blessés, leur nombre dépasse largement la capacité du système de santé Gazaoui, qui est de 3 500 lits ». 

Depuis l’instauration d’un siège complet sur la bande de Gaza par l’armée israélienne, les hôpitaux rapportent des pénuries de matériel et des médicaments de base, comme des antibiotiques, des antalgiques, des narcotiques nécessaires à l’anesthésie. Le personnel médical est épuisé quand il n’est pas victime lui-même des bombardements : selon les chiffres de l’OMS, 16 soignants ont été tués et 30 blessés entre le 7 et le 22 octobre.

La population n’a pas de lieu sûr où s’abriter : des dizaines de milliers de personnes se sont déplacées vers le sud de la bande de Gaza à la suite des appels par l’armée israélienne à évacuer le nord. Mais face à la multiplication des bombardements dans le sud aussi, et qui ont encore gagné en intensité ces dernières heures, de nombreuses personnes préfèrent retourner chez elles, dans le nord, malgré les risques encore plus élevés.

Des pénuries sont également constatées en matière d’eau, de nourriture, et en particulier de carburant, indispensable pour produire de l’eau potable et pour le fonctionnement des hôpitaux, et dont Israël n’autorise pas l’acheminement.

« L’entrée de quelques dizaines de camions par le poste de frontière de Rafah ces derniers jours ne représente qu’une infime réponse à des besoins constants et en augmentation » explique Bérengère Guais, responsable adjointe des opérations d’urgence de MSF. « Avant le début de la guerre, 80% de la population de Gaza dépendait déjà de l’aide humanitaire pour survivre. Aujourd’hui, avec des besoins médicaux et humanitaires qui se multiplient, il faut pouvoir organiser de toute urgence le passage de plusieurs centaines de camions et de citernes par jour. Mais il faut aussi et surtout créer les conditions du stockage et de la distribution à l’intérieur de Gaza. Pour que l’aide atteigne la population, là où elle se trouve, il faut que les bombardements s’arrêtent, et qu’une pause humanitaire soit déclarée ».

Dans ce contexte, les capacités de réponse de MSF sont aujourd’hui très limitées. Le personnel international qui intervenait avant la guerre dans la bande de Gaza s’est déplacé dans le sud, et n’est aujourd’hui pas en mesure de coordonner des activités humanitaires. Parmi les quelque 300 Palestiniens travaillant pour MSF, beaucoup ont également fui dans le sud, pour mettre leur famille à l’abri. Seul un petit nombre d’entre eux continue son travail dans les hôpitaux de Gaza.

MSF se tient prête à augmenter ses capacités d’aide à Gaza, en remplaçant ses équipes internationales sur place avec du personnel spécialisé dans les situations d’urgence.

Il est urgent que le point de passage de Rafah soit ouvert pour permettre le renouvellement des équipes humanitaires, et la mise à l’abri des personnes qui souhaitent se réfugier en Egypte, avec la possibilité de retourner à Gaza par la suite.

MSF est également en train de se coordonner avec les autorités égyptiennes et d’autres partenaires humanitaires afin d’organiser l’acheminement de plusieurs dizaines de tonnes de matériel médical et médicaments via le point de passage de Rafah, dès que l’occasion lui en sera donnée et que la situation sécuritaire le permettra.

Notes

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