La section française de Médecins Sans Frontières contrainte de quitter le Niger

MSF demande au gouvernement du Niger, à l'Unicef et au Programme Alimentaire Mondial (PAM) d'intervenir à Maradi pour que les enfants malnutris soient pris en charge à hauteur des besoins

Paris / Niamey - Le 18 juillet 2008 dernier, le gouvernement nigérien a mis brutalement et sans explications un terme aux activités médicales et nutritionnelles de la section française de MSF dans la région de Maradi, entraînant de lourdes conséquences sur la mortalité des jeunes enfants.

Au cours de ces trois derniers mois, MSF a tout fait pour connaître les raisons de cette suspension, clarifier son travail médical et redéfinir avec les autorités nigériennes les modalités de son intervention. Le 21 octobre à Niamey, devant le refus du gouvernement d'autoriser MSF à reprendre ses activités, nous en appelions à l'arbitrage de M. Mamadou Tandja, Président de la République du Niger. Force est de constater qu'aucun signe autre que le silence ne nous est adressé. La section française de MSF a donc décidé de prendre acte de la position du gouvernement « de voir MSF s'en aller ».

L'arrêt des activités de la section française de MSF survient au moment le plus difficile de l'année pour les jeunes enfants, pendant la période de soudure et le pic de paludisme. A la date de la suspension, plus de 3.000 enfants étaient en cours de traitement et 500 nouveaux enfants étaient admis dans le programme chaque semaine. Par ailleurs, la dernière enquête nutritionnelle, effectuée en juin 2008 par le gouvernement et l'Unicef, estimait entre 35.000 et 67.000 le nombre d'enfants atteints de malnutrition aiguë dans la région de Maradi. Ces chiffres, officiels, contredisent les raisons invoquées publiquement par le gouvernement nigérien pour expliquer la suspension des activités de l'organisation à Maradi.

« Maradi est une des régions du Niger les plus affectées par la malnutrition. Depuis l'arrêt des activités MSF dans le sud de Maradi, et malgré une augmentation des admissions dans d'autres centres de santé et sur d'autres équipes MSF en périphérie, des milliers d'enfants n'ont pas été pris en charge,
explique le Dr Christophe Fournier, président du Conseil international de MSF. Alors que des avancées majeures dans le domaine de la malnutrition rendent possible la prévention de la malnutrition et le traitement d'enfants malnutris à large échelle, il est choquant qu'un gouvernement, après avoir permis la mise en place de programmes de traitement innovants, choisisse d'ignorer les besoins de milliers d'enfants. »

Le départ de la section française de MSF survient à un moment où un effort est plus que jamais possible et nécessaire pour avancer dans la lutte contre la malnutrition qui ne devrait plus être perçue comme une fatalité, mais comme un réel enjeu de santé publique.

Les pays touchés par la malnutrition, comme le Niger, et les organisations internationales tardent à reconnaître les possibilités réelles qu'offrent les nouveaux produits nutritionnels prêts à l'emploi. Les Nations Unies ne recommandent aucune approche particulière pour les gros foyers de malnutrition et de mortalité, comme celui de Maradi, et limitent l'utilisation des aliments efficaces aux enfants les plus sévèrement dénutris. Enfin, les financements internationaux à destination de la malnutrition restent largement insuffisants.

MSF demande au Gouvernement, à l'Unicef et au PAM d'intervenir au plus vite, à Maradi, pour que les enfants malnutris soient pris en charge et aux bailleurs de fonds de mettre en place une politique internationale et des moyens de traitement adaptés aux gros foyers de malnutrition.

Médecins Sans Frontières travaille au Niger depuis 2001 et mène des programmes de prise en charge de la malnutrition dans les régions de Zinder, de Maradi et de Tahoua. Depuis le début de l'année 2008 jusqu'à mi-septembre, un total de 61 051 enfants souffrant de malnutrition aiguë ont été admis dans les centres nutritionnels de MSF. En collaboration avec les autorités sanitaires, Médecins Sans Frontières répond également au Niger à des épidémies en assurant le traitement des malades ou en menant des campagnes de vaccination. En 2008, des interventions ont eu lieu sur des épidémies de rougeole, de méningite et de choléra. Les équipes de MSF au Niger comptent 1 537 personnes, dont 1 468 Nigériens.

Notes

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