Paris/Niamey, le 22 août 2005. Alors que les distributions de nourriture ont commencé au Niger, Médecins Sans Frontières constate qu'elles ne portent pas secours en priorité à ceux qui en ont un besoin essentiel pour survivre, les enfants de moins de cinq ans des zones les plus touchées.
MSF appelle le Secrétaire général des Nations unies à prendre des mesures pour que les agences humanitaires des Nations unies (Programme alimentaire mondial (PAM), UNICEF) distribuent l'aide en fonction des besoins réels des populations.
En effet, à ce jour les distributions de nourriture organisées par le PAM ne répondent, ni en quantité, ni en qualité à la gravité de l'épidémie de malnutrition aiguë que les équipes de Médecins Sans Frontières prennent en charge, en particulier aux besoins des enfants souffrant de malnutrition aiguë.
Ainsi, depuis janvier 2005, plus de 21.000 enfants souffrant de malnutrition sévère ont été pris en charge dans les programmes de réhabilitation nutritionnelle de Médecins Sans Frontières des provinces de Tahoua, Maradi et Zinder (à partir de fin juillet ). Parmi ces enfants, plus de 12.000 sont originaires des trois départements du sud de la province de Maradi, où la situation nutritionnelle continue de s'aggraver. Durant la semaine du 8 au 14 août, 1.053 enfants ont été admis dans les centres MSF de la région, alors qu'ils étaient 403 la première semaine de juillet.
Or dans ces départements, le Programme alimentaire mondial ne prévoit de distribuer des rations alimentaires qu'à 110.000 personnes, soit à peine 10% d'une population de 1,2 millions.
Médecins Sans Frontières constate également que la qualité de la nourriture distribuée n'est pas adaptée à l'alimentation des enfants en bas âge, qui sont pourtant les principales victimes de la malnutrition. Pour guérir de la malnutrition, les enfants ont besoin d'aliments spécialisés (farines enrichies). Or ceux-ci ne sont pas présents dans les rations alimentaires distribuées par le PAM.
Enfin le ciblage des zones de distributions s'effectue une fois de plus à partir du système d'alerte précoce, basé sur la surveillance des récoltes, mais ne prend pas du tout en compte l'état nutritionnel réel des populations. Or, depuis novembre 2004, cette méthode a fait la preuve de son inefficacité.
Les Nations unies ont déjà répondu tardivement à l'épidémie de malnutrition aiguë qui sévit au Niger et persistent dans l'erreur. Ainsi, elles ont imputé la crise nutritionnelle à la seule combinaison de la sécheresse et de l'invasion de criquets. Puis, en novembre 2004, elles ont soutenu le gouvernement nigérien dans son choix de répondre à cette situation d'urgence par une aide payante, à laquelle les plus démunis, c'est à dire ceux qui en avaient le plus besoin, n'ont pas eu accès.
Médecins Sans Frontières appelle donc les "agences humanitaires" des Nations unies, à respecter le principe humanitaire d'impartialité qui veut que l'aide soit distribuée à ceux qui en ont le plus besoin. Nous demandons que les distributions de nourriture viennent effectivement en appui de notre intervention auprès des enfants souffrant de malnutrition aiguë dans les régions où ces derniers meurent de faim.