À l’hôpital Nasser, la dernière maternité fonctionnelle du sud de Gaza

GAZA: Al Nasser Hospital. Pedriatric and Maternity
Hin So, sage-femme pour MSF, ausculte des nouveaux-nés à l'hôpital Nasser, dans le sud de la bande de Gaza.  © Mariam Abu Dagga/MSF

Après neuf mois de combats incessants, l'hôpital Nasser, situé à Khan Younès, est le dernier établissement en capacité d’offrir des services de maternité et de pédiatrie dans le sud de Gaza. Entre le 29 juin et le 5 juillet, le service des urgences pédiatriques a enregistré plus de 2600 consultations, soit plus de 300 enfants pris en charge quotidiennement. Chaque jour, 25 à 30 accouchements ont lieu à la maternité de l’hôpital. Sur place, les équipes de Médecins Sans Frontières (MSF) observent une augmentation du nombre d’accouchements prématurés et des cas de malnutrition infantile.

Lorsque Hanin a cherché des soins pour sa fille souffrant de malnutrition à Khan Younès, chaque seconde comptait pour sa survie. « Ma fille était dans un état critique, raconte la mère palestinienne. On m'a orientée vers l'hôpital, mais il n'y avait aucun moyen de transport. » Elles ont finalement réussi à rejoindre le centre nutritionnel thérapeutique de Médecins Sans Frontières en charrette. « Ma fille était épuisée, se souvient Hanin. Sur le trajet, elle avait la tête appuyée contre moi et ne bougeait plus, elle était à deux doigts de mourir. »

« Dans des contextes de guerre comme celui de Gaza, les retards aux soins constituent un grave danger pour les femmes enceintes et leurs enfants, explique Mercè Rocaspana, conseillère en santé pour MSF. Après neuf mois de guerre, le système de santé est en ruine, ce qui augmente considérablement les risques de complications graves, y compris celui de mourir. »

Une membre du personnel de MSF s'occupe d'un enfant malade à l'hôpital Nasser, dans le sud de la bande de Gaza. 
 © Mariam Abu Dagga/MSF
Une membre du personnel de MSF s'occupe d'un enfant malade à l'hôpital Nasser, dans le sud de la bande de Gaza.  © Mariam Abu Dagga/MSF

Les principaux risques pour la santé des femmes enceintes incluent des complications liées à l'hypertension, comme l'éclampsie, ainsi que des hémorragies et des infections sévères, et sont toutes potentiellement fatales sans prise en charge médicale adéquate. Après l'accouchement, les jeunes mères retournent vivre dans des conditions insalubres, souvent sous des tentes. À cela s’ajoutent le manque de nourriture et le stress constant qui dégradent davantage leur état de santé, ainsi que celui de leurs enfants. 

« Certaines femmes accouchent prématurément et développent des complications post-partum aggravées par leurs conditions de vie précaires », précise Mohamad, superviseur de l'équipe d'infirmiers de MSF, qui travaille dans l'unité de soins intensifs néonatals de l'hôpital Nasser. « Il n'y a ni couches, ni vêtements pour mon bébé, témoigne Khadra, qui a accouché dans la maternité. Nous vivons sous une tente, il n’y a même pas de lit pour lui, ce sont des conditions extrêmes. » 

Actuellement, l'hôpital Nasser est le dernier établissement offrant des services de maternité et de pédiatrie dans le sud de la bande de Gaza. En février, après des semaines de combats intenses avec des groupes armés palestiniens à Khan Younès, les forces israéliennes ont assiégé puis pris d'assaut l'hôpital, entraînant le retrait des équipes de MSF. En mai 2024, ces dernières y sont retournées et, en juin, en collaboration avec le ministère de la Santé et d'autres partenaires, elles ont rouvert les services de maternité et de pédiatrie, incluant un centre nutritionnel thérapeutique. Les équipes soutiennent également les unités de soins intensifs pédiatriques et néonatals.

(de gauche à droite) Portraits de Mohammad Shihada, superviseur de l'équipe d'infirmiers de MSF à l'hôpital Nasser, de Khadra, une patiente qui vient de donner naissance à son enfant et de Suad, qui vient tout juste d'accoucher.
 © Mariam Abu Dagga/MSF
(de gauche à droite) Portraits de Mohammad Shihada, superviseur de l'équipe d'infirmiers de MSF à l'hôpital Nasser, de Khadra, une patiente qui vient de donner naissance à son enfant et de Suad, qui vient tout juste d'accoucher. © Mariam Abu Dagga/MSF

Depuis plusieurs semaines, le personnel médical de l’hôpital Nasser fait face à une pénurie critique de fournitures médicales essentielles, ce qui entraîne la dégradation de la qualité des soins. En l’absence d’autres structures de santé opérationnelles dans la zone, l'établissement prend en charge des afflux massifs et récurrents de blessés, en raison de la violence des combats et des bombardements sur des zones densément peuplées.  

L'augmentation continue du nombre d'enfants admis a entraîné la saturation des services pédiatriques de l’hôpital Nasser. « On peut voir plusieurs enfants partager le même lit, explique Joanne Perry, référente médicale pour MSF. Nous observons des cas de malnutrition chez les enfants, un phénomène inédit à Gaza. Les bombardements ont détruit les systèmes d’eau et d’assainissement, les familles vivent dans des tentes avec un accès limité à l'eau potable et dans des conditions d'hygiène désastreuses. » Des cas de diarrhée, de déshydratation, d'hépatite A et d'infections cutanées ont également été observés chez les enfants.  

La réouverture des services de maternité et de pédiatrie de l’hôpital Nasser permet d’améliorer de façon limitée l'accès aux soins des Gazaouis vivant dans le sud de Gaza. Un cessez-le-feu immédiat et durable ainsi qu'une aide humanitaire sans entrave sont indispensables pour répondre aux besoins immenses des Palestiniens de Gaza, notamment les femmes enceintes et les enfants.  

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