La passation du programme VIH/sida de MSF à l'hôpital de l'Amitié khméro-soviétique (AKS) présente-t-elle des difficultés ?
Le défi a été de transférer une très grosse cohorte de patients VIH - 3660 patients - sans avoir de partenaires. Dans un autre hôpital du Cambodge, celui de Kampong Cham, nous avons déjà transféré notre programme sida aux autorités sanitaires. Mais nous avions face à nous une ONG qui prenait en charge les questions relevant du financement et de la gestion. Or à Phnom Penh, à l'hôpital de l'Amitié khméro-soviétique, nous avons dû faire rentrer tout le projet MSF dans le système de santé publique. L'enjeu technique a consisté à adapter le fonctionnement du service des Maladies infectieuses pour qu'il soit réintégré dans l'hôpital.
La passation du programme VIH/sida de MSF à l'hôpital AKS présente-t-elle des difficultés ?
Le défi a été de transférer une très grosse cohorte de patients VIH - 3660 patients - sans avoir de partenaires. Dans un autre hôpital du Cambodge, celui de Kampong Cham, nous avons déjà transféré notre programme sida aux autorités sanitaires. Mais nous avions face à nous une ONG qui prenait en charge les questions relevant du financement et de la gestion. Or à Phnom Penh, à l'hôpital de l'Amitié khméro-soviétique, nous avons dû faire rentrer tout le projet MSF dans le système de santé publique. L'enjeu technique a consisté à adapter le fonctionnement du service des Maladies infectieuses pour qu'il soit réintégré dans l'hôpital.
Quels changements cela a-t-il induit ?
Quand le programme était géré par MSF, les patients VIH arrivaient directement dans le service. Maintenant ils passent par les urgences et par le circuit habituel de l'hôpital. Alors que MSF disposait de sa propre pharmacie, désormais tous les médicaments sont fournis par la pharmacie centrale de l'hôpital qui a son propre mode de fonctionnement. Toute l'activité de counselling ou d'éducation thérapeutique a été confiée à une association de patients AUA (Antiretroviral Users' Association) avec laquelle MSF a collaboré avec succès si bien que maintenant AUA a des éducateurs thérapeutiques en nombre suffisant et compétents. Autre point plus délicat, les horaires de consultations risquent d'être réduits. Les équipes MSF donnaient les consultations de 8 heures à 18 heures. Or dans les autres services de l'hôpital, les consultations sont assurées entre 8 heures et 11h30, seule une garde étant assurée l'après-midi et la nuit. Comme plus de 100 patients doivent être vus par jour, les consultations externes ont été espacées, les rendez-vous sont donnés tous les six mois, et non plus tous les trois mois. Mais cela ne suffira pas à régler le problème. Cette question des horaires de consultation est encore donc en suspens.
Comment vous avez réglé la question de l'approvisionnement en médicaments?
La question des antirétroviraux (ARV) qui sont des médicaments très coûteux avait été réglée avant. Depuis 2007, NCHADS, autrement dit le Programme national de lutte contre le sida, fournit 100% des traitements ARV, via le Fonds global (le mécanisme international de financement de la lutte contre le sida notamment). En revanche avec les médicaments pour les maladies opportunistes, cela marche moins bien. Des ruptures d'approvisionnement se produisent. Aussi avons-nous été amenés à fournir en complément des médicaments essentiels pour le traitement des maladies opportunistes chez les patients hospitalisés. Et même chose pour du matériel médical, type seringues, matériel de perfusion...
Les patients VIH bénéficiaient de la gratuité des soins. La gratuité sera-t-elle maintenue?
MSF prenait tout en charge financièrement. Maintenant les patients vont payer les frais d'hospitalisation. Il a fallu préparer les patients à ce changement avec l'aide des éducateurs thérapeutiques qui ont fait un travail d'information. Mais surtout nous avons travaillé avec des partenaires à la coopération pour mettre en place, avec l'aval du ministère de la Santé, un mécanisme de financement permettant aux patients démunis d'avoir accès aux soins. Car au Cambodge, près de 40% de la population vit avec moins de un dollar par jour. A l'issue d'une enquête rigoureuse, les patients les plus pauvres ont été identifiés. Puis ils ont reçu une carte leur donnant droit à la gratuité des soins. Et c'est un point vraiment positif: grâce à ce mécanisme de financement dénommé «Equity Fund», près de 1000 patients sur les 3660 patients VIH suivis à l'hôpital AKS vont continuer à bénéficier de soins gratuits.
En revanche, tout n'est pas encore réglé pour le financement de la prise en charge des patients en 2010?
Effectivement. Alors que notre départ était programmé pour décembre 2009, il nous a été demandé de rester impliqués financièrement six mois de plus et donc de verser des compléments de salaires au personnel jusqu'en juin 2010. Car le Fonds mondial (un mécanisme de financement multilatéral pour la prise en charge du VIH/sida) a rejeté une demande du Cambodge. Le ministère de la Santé s'est donc trouvé confronté, cette année, à une interruption des financements et ne recevra qu'en octobre la prochaine tranche de versements du Fonds mondial. Le financement des examens de laboratoire est de ce fait remis en question. On ne sait pas encore qui va payerles examens seront-ils à la charge du patient oude l'hôpital. Et le nombre de lits d'hospitalisation pour les patients VIH à l'hôpital AKS pourrait être réduit pour équilibrer les comptes. Il passerait de 60 à 30. Les 30 lits libérés seraient réservés aux autres maladies infectieuses et là, l'hospitalisation serait systématiquement payante.