Au cours d'une nuit de gel de l’hiver 2013, la maison d'Ibrahim a été soumise à un raid très violent mené par des soldats israéliens. « Il y avait beaucoup de soldats autour de la maison. Ils ont cassé les fenêtres et la porte principale, se souvient Ibrahim. Ils sont entrés d'une manière sauvage, ils nous interdisaient de parler et ne se souciaient pas de savoir s’il y avait des personnes âgées ou des enfants. Nous avons tous été obligés de sortir dans le froid. » Sa famille vit dans une petite communauté qui compte environ 400 personnes, au nord d'Hébron.
Les soldats ont arrêté Youssef, le fils d’Ibrahim, âgé de 26 ans. Ils lui ont attaché les mains, bandé les yeux et l'ont emmené. Lors de l'arrestation, Youssef raconte qu’il a été sévèrement battu et frappé aux testicules. Les soldats se moquaient de lui, il s’est senti humilié. Youssef a demandé à être examiné par un médecin qui lui a donné quelques analgésiques mais qui a refusé de l’examiner davantage. En prison, il a été mis en cellule d’isolement, une pièce minuscule sans ventilation. Il explique aux équipes de MSF que pendant 59 jours, il a été soumis à des interrogatoires continus. Battu à plusieurs reprises, il a ensuite été déplacé dans une autre cellule avec un ’oiseau’ (terme utilisé pour désigner un collaborateur) qui a également tenté de l’interroger à maintes reprises pour lui soutirer des informations. Il confie enfin qu’un de ses amis incarcéré est mort sous la torture. Lui a survécu. Il aura passé 7 mois en prison.
Après le raid et l'arrestation de Youssef, les équipes MSF ont immédiatement rencontré sa famille. Ibrahim, le père, la mère de Youssef et sa sœur avaient besoin d'un soutien psychologique. Les incursions menées dans la région par les forces israéliennes sont monnaie courante et imposent aux familles de vivre dans une peur et une angoisse continues.
La détention de Youssef a eu des conséquences désastreuses pour lui et sa famille. Sous surveillance médicale à sa sortie de prison, Youssef n’a pas pu reprendre son travail de plombier, ce qui a causé des difficultés financières pour sa famille. A sa libération, il n’arrivait pas à trouver le sommeil et ne faisait plus confiance à personne. Il a commencé à se faire aider par un psychologue, un médecin et un travailleur psychosocial. Même s'il devait faire plus d’une heure de trajet à cause des points de contrôle, il a réussi à assister régulièrement aux séances de thérapie. Tandis qu’il se remet peu à peu de ses blessures, il a décidé de suivre une formation de plombier pour approfondir ses connaissances. Youssef retrouve peu à peu espoir et pense que, malgré les difficultés auxquelles il fait face aujourd’hui, le pire est derrière lui.