Coronavirus : plus de ressources nécessaires dans les EHPAD

Entre avril et mai 2020, MSF a soutenu 30 EHPAD en Île-de-France, où résidaient plus de 2 000 personnes âgées. Dans ce contexte, les équipes ont pu observer qu’au plus fort de la pandémie, les résidents comme le personnel ont été livrés à eux-mêmes. 

Dès leurs premières visites en avril 2020, les équipes MSF ont constaté la grande souffrance des résidents, mais également de leurs familles et des personnes qui travaillent à leurs côtés. Alors que les soignants en milieu hospitalier étaient érigés en héros, les EHPAD ont été pointés du doigt. En sous-effectif, démuni, en manque criant de soutien tant matériel qu’humain, le personnel de ces établissements n’a vu ses efforts ni soutenus ni reconnus.

Des EHPAD abandonnés

Cet abandon par les autorités sanitaires publiques laisse derrière lui son lot de sinistrés. Nombreuses sont les personnes travaillant dans des maisons de retraite qui manifestent aujourd’hui des symptômes post-traumatiques, notamment de l’anxiété, voire un état de stress aigu. En juillet, MSF a mis en place un programme d’accompagnement et de formations visant à diminuer les risques psycho-sociaux des personnels en EHPAD et à les sensibiliser à la santé mentale des personnes âgées. 

21 EHPAD sont actuellement soutenus par les équipes MSF en France. S’il est crucial, d’un point de vue médical, de permettre à ces personnes de se reconstruire psychologiquement et de mieux appréhender la santé mentale des résidents qu’ils accompagnent, des conclusions structurelles et organisationnelles doivent également être tirées. Il est primordial de donner à ces établissements les ressources financières, humaines et matérielles pour se préparer et se protéger en cas de nouvelle recrudescence des cas de Covid-19. 

Conclusions similaires côté espagnol

En Espagne, le constat est similaire et partagé par les équipes MSF sur place. C’est d’ailleurs le modèle de gestion espagnol des EHPAD qui est remis en question dans une enquête menée par MSF dans le pays. L’association y a soutenu près de 500 centres de soins pendant les phases aiguës de la pandémie dans des domaines tels que la prévention et le contrôle des infections, la réorganisation des flux de patients et l'utilisation d'équipements de protection individuelle. 

L’enquête montre notamment que la priorité n’a pas été donnée à l’orientation des malades des maisons de retraite vers les établissements de santé en capacité de les accueillir, laissant la charge des soins au personnel des résidences : des soins qu’ils n’étaient pas en capacité de fournir malgré toute leur bonne volonté. 

« Les maisons de retraite n’ont pas assez de ressources, d'infrastructures, et leur personnel manque de formation aux soins médicaux, à l’utilisation des équipements de protection. Il n'y a pas eu de réponse adéquate et coordonnée entre les maisons de retraite et les services de santé qui puissent permettre de sauver des vies », explique la Dr. Ximena Di Lollo, coordinatrice de la réponse MSF en Espagne. 

Les mesures de prévention et de contrôle des infections, essentielles pour faire face à une pandémie, étaient également déficientes, tout comme la prise en charge médicale des patients pour empêcher la détérioration de leur état de santé. La mise en place de mesures d’isolement strictes pour les résidents des maisons de retraite, qu’ils aient ou non la Covid-19, ont eu des conséquences sur leur état de santé physiques et psychologique. De même pour les restrictions des visites de famille et les refus des derniers adieux.

Adapter la réponse aux personnes âgées

« Les gestionnaires de ces maisons doivent s'assurer que les mesures d’isolement ne coupent pas les résidents de leurs liens sociaux, et que la priorité soit donnée à leur santé physique et mentale. Le confinement ne doit pas se faire au détriment des facultés physiques et cognitives des personnes âgées, mais y être adapté », précise la coordinatrice.

L’enquête de MSF réalisée en Espagne pointe également le manque de coordination entre les autorités et les entreprises privées travaillant dans les maisons de retraite, y compris le manque de stratégies pour prévenir et gérer la pandémie. « Ils ont donné la priorité à la réponse aux soins dans les hôpitaux, ce qui a négligé les personnes âgées dans les maisons de soins, bien qu'elles soient le groupe le plus vulnérable présentant les taux de mortalité les plus élevés », conclut Dr. Ximena Di Lollo. 

En Espagne, les personnes âgées décédées dans les maisons de retraite – au nombre de 27 359 entre le 6 avril et le 20 juin, selon le ministère de la Santé – représentait 69 % de la totalité des décès liés à la maladie.