Côte d’Ivoire : MSF fait face à des besoins immenses à Abidjan

L'hôpital d'Abobo Sud à Abidjan  Mai 2011
L'hôpital d'Abobo Sud à Abidjan - Mai 2011 © Brigitte Breuillac / MSF

Jusqu'au 13 avril, deux jours après la chute du régime Gbagbo, la situation à Abidjan était très tendue. Depuis, l'amélioration est assez sensible : les grandes routes sont rouvertes, les étals ont réapparu au bord des rues jusque là désertes. Abidjan retrouve son agitation coutumière. Après avoir été terrés chez eux pendant la crise, les malades prennent le chemin de l'hôpital, en masse.

Dans l'hôpital d'Abobo Sud que MSF avait rouvert fin février, les équipes traitent surtout des urgences médicales alors que durant la période des combats - la ligne de front était alors toute proche - elles prenaient en charge essentiellement des blessés. Mais encore maintenant, 3 à 4 blessés par balle continuent d'arriver chaque jour et c'est la même chose dans d'autres hôpitaux d'Abidjan à Yopougon et Treichville où MSF intervient. « On entend encore des tirs tous les jours, note Caroline Séguin, coordinatrice de projet à Abobo. »

Des équipes MSF sont présentes dans plusieurs hôpitaux d'Abidjan et apportent une aide à des centres de santé. Et partout, c'est l'affluence. Dès cinq heures du matin, des femmes attendent avec leurs enfants devant la porte de l'hôpital d'Abobo Sud pour consulter un médecin. Dans la journée, les équipes MSF reçoivent en moyenne 300 patients. Et encore, en dehors des cas très urgents, la priorité est donnée aux enfants de moins de 15 ans.

« La saison des pluies vient de commencer, explique Caroline Séguin. 80% des patients qui consultent ou sont hospitalisés souffrent de paludisme, souvent d'une forme sévère. » Et les enfants sont particulièrement touchés. Nombre d'entre eux sont atteints d'une anémie due au paludisme. Avec la crise, ils n'ont pas reçu de traitement et ont traîné avec leur maladie. Pour ces petits patients et d'autres, le traitement est une transfusion sanguine. Signe de l'ampleur des besoins, MSF a pratiqué 146 transfusions la semaine dernière, un véritable défi du fait que les réserves de sang sont minimes pendant la crise.

Dans tous les services de cet hôpital situé dans un quartier populaire, l'activité est débordante. A la maternité, les sages-femmes font une cinquantaine d'accouchements par jour. Au bloc, ce sont trois à quatre césariennes. Dans toute la métropole ivoirienne, les besoins médicaux sont immenses. L'économie comme le système de santé a été chamboulé par la crise post-électorale et les affrontements armés à Abidjan. Pour développer l'accès aux soins, MSF a donc ouvert, quand les gens ont pu se déplacer, des hôpitaux qui avaient fermé ou fonctionnaient au ralenti. Dans les quartiers d'Anyama, Abobo Nord, Treichville, Yopougon, les équipes MSF prennent en charge, depuis un mois, les urgences médicales ou chirurgicales, donnent des consultations de médecine générale ou travaillent dans les services de maternité.

Pour que ces structures soient opérationnelles, il a fallu par exemple équiper un bloc opératoire d'un bistouri électrique, installer un générateur pour continuer à avoir de l'électricité en cas de coupures, mettre des réserves d'eau, rajouter des lits d'hospitalisation... Dans le sud d'Abidjan, MSF s'est lancé dans de plus gros travaux. Il s'agit de finir les travaux dans un bâtiment récent de l'hôpital de Port-Bouët pour l'équiper de trois blocs opératoires. Déjà, l'équipe MSF assure les soins post-opératoires de patients qui viennent d'être transférés et bientôt elle soignera aussi les cas de traumatologie, de pédiatrie et de gynécologie-obstétrique.

De très nombreuses équipes MSF sont ainsi à pied d'œuvre dans plusieurs hôpitaux d'Abidjan. Car la grande majorité des employés du ministère de la Santé n'ont pu aller sur leur lieu de travail ou avaient fui les zones de combats. Maintenant la plupart du personnel médical est de retour, mais il faut gérer les afflux de patients et faire un triage très serré. Alors qu'avant la crise, un service de consultations externes à l'hôpital recevait 30 à 50 patients par jour, maintenant ce sont 250 à 300 patients par jour.

Autre difficulté, la pénurie de médicaments reste aigüe. « Malgré la gratuité des soins décrétée par le gouvernement depuis le 16 avril et jusqu'au 31 mai, les structures MSF sont particulièrement ciblées par les malades. Nous sommes complètement débordés », note Xavier Simon, chef de mission MSF à Abidjan. Ainsi, dès que MSF a rouvert l'hôpital d'Anyama, le 18 avril, les gens se sont présentés spontanément. Sans que l'équipe MSF ait fait d'annonce, l'information est partie en ville. « MSF est là, tout est gratuit, il y a des médicaments ». Les patients sont venus et ne cessent d'affluer dans les structures MSF.

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Notes

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