Pourquoi l’aide humanitaire ne rentre-t-elle pas en quantité suffisante dans Gaza ?
Il existe plusieurs obstacles à l’entrée de l’aide. Tout d’abord, pour entrer dans la bande de Gaza, tout article, bien de première nécessité, médicament, nourriture doit être autorisé par Israël qui a mis en place une série de règles administratives complexes et opaques. Par exemple, des autorisations spéciales sont nécessaires pour certains objets, considérés par les autorités israéliennes comme pouvant être utilisés à des fins militaires. Cela peut toucher le matériel du quotidien, comme une paire de ciseaux pour couper des bandages, des générateurs ou encore des stérilisateurs. Ce processus bureaucratique ralentit et limite massivement l’entrée de l’aide dans Gaza.
Ensuite, il n’existe qu’un seul point de passage dans le sud de la bande de Gaza : celui de Kerem Shalom où là aussi, les contrôles des camions prennent du temps et limitent à nouveau les quantités qui entrent dans Gaza. Lorsque les camions réussissent enfin à rentrer, ils sont régulièrement pillés : 30 à 50 % de l'aide serait détournée et ne parviendrait pas aux habitants de Gaza. Cette situation est la conséquence de plusieurs facteurs, notamment l'ampleur des pénuries, mais aussi l'élimination des forces palestiniennes de maintien de l'ordre à Gaza : la police a par exemple été ciblée dès le début du conflit par l'armée israélienne.
C’est une situation exceptionnelle pour MSF : nous avons accès à la population, nos équipes nationales et internationales sont prêtes à travailler, les besoins sont immenses, mais nous ne pouvons pas déployer d’interventions d’ampleur en raison des blocages de l’aide.
L'aide humanitaire n'est pas à la hauteur de l'urgence dont nous sommes témoins. Il faut que les organisations humanitaires puissent être en mesure de travailler pour faire face à une situation humanitaire catastrophique, d'une gravité rare dans l'histoire de MSF.
Nos équipes ont ouvert deux hôpitaux de campagne, chacun disposant d’une capacité d’hospitalisation de 110 lits, une goutte d’eau lorsqu’on pense aux près de 100 000 blessés de guerre actuellement à Gaza. Pourtant, dans ces deux structures, lors de ma visite, seulement 20 patients étaient hospitalisés. L’obstacle principal à l’ouverture de lits supplémentaires reste la lenteur de l’approvisionnement en matériel médical et en médicaments.