Nous avons été profondément émus par les massacres et les atrocités commis par le Hamas le 7 octobre. Leur ampleur et leur barbarie sans précédent sont révoltantes. Nous partageons l’angoisse des familles des 137 otages encore retenus par le Hamas.
Une guerre totale est menée en retour à Gaza par Israël, sous les yeux du monde entier.
Malgré ses affirmations, Israël ne mène pas uniquement une guerre contre le Hamas. Elle s’abat sur l'ensemble de la bande de Gaza et sa population. Israël applique aujourd’hui une doctrine militaire fondée sur le caractère disproportionné des frappes et la non-distinction entre cibles militaires et civiles, et la revendique publiquement : dès les premiers jours de l’offensive, le porte-parole de l’armée israélienne reconnaissait que cette campagne de bombardements visait à « faire des dégâts et non à être précise ». Selon les autorités sanitaires locales, plus de 15 500 personnes ont été tuées, dont plus de 6 000 enfants. Cela représente plus d’un habitant de Gaza sur 200. Et des dizaines de milliers de personnes ont été blessées.
Les hôpitaux du nord de Gaza ont été anéantis, l’un après l’autre. Certains sont devenus des morgues, voire des ruines. Alléguant que les hôpitaux auraient été détournés de leur fonction à des fins militaires, l’armée israélienne les a bombardés, encerclés et pris d'assaut, tuant des patients et du personnel médical. Le 29 novembre, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) avait recensé 203 attaques contre des structures de santé.
Quatre membres du personnel de MSF ont été tués depuis le début de la guerre. Les soignants qui ont pu continuer de travailler l’ont fait dans des conditions inimaginables. Par manque d’anti-douleurs, de nombreux blessés sont morts dans d’atroces souffrances. En raison des évacuations forcées ordonnées par les soldats israéliens, certains médecins ont dû abandonner des blessés ou malades après avoir été confrontés à un dilemme insoutenable : sauver leur vie ou celle de leurs patients.
S’ajoutent à cela les effets du siège complet imposé dès le début de son offensive militaire par le gouvernement israélien, qui a coupé l’approvisionnement en nourriture, en carburant, en médicaments et l’aide humanitaire dont dépendaient déjà 80 % des 2,3 millions de personnes dans l'enclave en raison du blocus en vigueur depuis 2007. Si la trêve a permis d’augmenter le nombre de camions acheminés chaque jour, la reprise des combats a entraîné à nouveau leur diminution et compromet les capacités de distribution au sein de l’enclave. La disponibilité de nourriture et d’eau à Gaza est aujourd’hui minime, et ceci alors que 1,8 million de personnes déplacées vers le sud, selon les Nations unies, sont entassées dans des abris précaires et surpeuplés et que l’hiver arrive. Le 16 novembre, la Directrice générale du Programme alimentaire mondial alertait ainsi que « les civils sont confrontés au risque immédiat de mourir de faim. »
MSF a récemment envoyé une équipe internationale d'urgence dans le sud de Gaza pour soutenir ses collègues palestiniens et renforcer les capacités de prise en charge dans les hôpitaux. Ces derniers jours, nos collègues sont témoins d’importants afflux de blessés après d’intenses bombardements, y compris à proximité des hôpitaux. De nombreux blessés souffrent de blessures complexes, de traumatismes multiples, de brûlures. Ils s’entassent dans des hôpitaux surchargés et débordés où le manque de place, d’hygiène et d’équipement rend impossible l’exercice de la médecine. Tous les jours, nos équipes essaient de soigner des patients qui devraient plutôt être évacués en urgence dans des hôpitaux spécialisés, à l’abri des bombardements.
Le nord de Gaza a été rayé de la carte. Pilonné, meurtri, privé de structures médicales fonctionnelles, il est devenu un lieu impropre à la vie, inhabitable.