Cent jours après l’arrêt des financements américains, des effets dévastateurs sur le système de l’aide
Communiqué de presse

Plus de trois mois après que l'administration Trump a suspendu ses financements de l’aide internationale, Médecins Sans Frontières (MSF) constate les conséquences dévastatrices de cet arrêt brutal. Des patients peinent à accéder à leur traitement, des soignants tentent de maintenir un accès aux soins et des organisations humanitaires alertent sur l'explosion des besoins dans des pays déjà en crise. Le statut des programmes encore financés par les États-Unis, dont le nombre est désormais très réduit, demeure incertain. Selon un courrier interne du département d’État publié par les médias, l'administration américaine prévoit désormais de prolonger de 30 jours la période initiale d'examen de l’aide internationale, qui devait se terminer le 20 avril.
Ces coupes s'inscrivent dans un agenda politique qui a des répercussions considérables sur les personnes dont l'accès aux soins est déjà limité par la persécution et la discrimination, comme les réfugiés et les migrants, les civils piégés dans les conflits, les femmes et les personnes LGBTQIA+.
« Nous sommes une organisation spécialisée dans les interventions d'urgence, mais nous n'avons jamais vu un tel bouleversement des programmes humanitaires et de santé mondiaux », déclare Avril Benoit, directrice générale de MSF aux Etats-Unis. « Cette situation, entièrement nouvelle et très dangereuse, est inacceptable. Nous demandons instamment à l'administration et au Congrès de maintenir leurs engagements en matière de santé mondiale et d'aide humanitaire. »
N'acceptant pas de financement du gouvernement américain, MSF n'est pas directement affectée par ces évolutions radicales. Cependant, MSF travaille en étroite collaboration avec d'autres organisations humanitaires et de santé pour fournir des services vitaux, et beaucoup de ses activités sont étroitement liées à des programmes de santé qui ont été interrompus en raison des coupes budgétaires. Fournir des soins devient plus difficile et coûteux à mesure que les ministères de la Santé sont touchés dans le monde et qu'il y a moins de partenaires. MSF devra également faire face à une diminution des possibilités d’orienter les patients vers des services spécialisés, ainsi qu'à des pénuries dues à la paralysie des chaînes d'approvisionnement.
Les équipes de MSF sont déjà témoins du chaos et de certaines conséquences des mesures prises par l'administration Trump. Des organisations auparavant financées par les États-Unis ont réduit ou interrompu des activités vitales, mettant en danger la vie de patients.
Ainsi, dans les premières semaines qui ont suivi le gel des financements américains, plusieurs organisations ont interrompu la distribution d'eau potable aux personnes déplacées dans les zones touchées par les conflits, notamment dans la région du Darfour au Soudan, dans la région du Tigré en Éthiopie et dans la capitale d'Haïti, Port-au-Prince. En mars, MSF a mis en place un système de distribution d'eau par camions-citernes afin d'approvisionner plus de 13 000 personnes déplacées vivant dans quatre camps de Port-au-Prince.
Dans les régions de Baidoa et de Mudug, en Somalie, les coupes budgétaires américaines s’ajoutent au manque de financement chronique et à une pénurie de service de santé, et entrainent une augmentation des cas de malnutrition aigüe sévère, constatée par les équipes de MSF à Baidoa. L'hôpital régional de Bay, soutenu par MSF, a reçu des patients qui ont parcouru jusqu’à près de 200 km pour recevoir des soins en raison de la fermeture d'autres établissements.
Les réductions de PEPFAR et de l'USAID ont également entraîné la suspension et la fermeture de programmes de lutte contre le VIH dans des pays comme l'Afrique du Sud, l'Ouganda et le Zimbabwe, menaçant ainsi la vie des personnes recevant une thérapie antirétrovirale (ARV). Dans le cadre du programme de MSF à San Pedro Sula, au Honduras, la distribution de comprimés de prophylaxie pré-exposition (PrEP) a augmenté de 70 % de janvier à mars par rapport au trimestre précédent.
Dans les régions frontalières du Sud-Soudan et de l'Éthiopie, les équipes de MSF répondent à une épidémie de choléra qui se propage rapidement dans un contexte d'escalade de la violence, alors que d'autres organisations ont réduit leur présence faute de financements.