Haïti : à Port-au-Prince, des cliniques mobiles pour atteindre les populations prises au piège de la violence

Les équipes MSF en briefing avant leur départ pour déployer des cliniques mobiles à Port-au-Prince. Haïti. 2023.
Les équipes MSF en briefing avant leur départ pour déployer des cliniques mobiles à Port-au-Prince. Haïti. 2023.   © Alexandre Marcou/MSF

Depuis 2021, Port-au-Prince est frappée par une vague de violences extrêmes, marquée par des combats lourds entre groupes armés pour le contrôle des différents quartiers de la capitale haïtienne. Selon les Nations unies, au cours des quatre premiers mois de 2023, plus de 1 200 personnes y ont été tuées. De nombreux habitants sont ainsi piégés et il est presque impossible pour eux de circuler sans craindre pour leur vie. Les équipes MSF leur apportent des soins de santé primaire à l’aide de cliniques mobiles.

« Les cliniques mobiles sont nécessaires dans un contexte comme celui de Port-au-Prince, explique Michele Trainiti, chef de mission de MSF en Haïti. Dans certains des quartiers les plus touchés par la violence, les structures de santé sont fermées. Celles qui fonctionnent partiellement sont difficiles d’accès et pour beaucoup, leurs coûts sont inabordables. »

Quatre fois par semaine, les trois cliniques mobiles de MSF se rendent dans différentes zones touchées par la violence urbaine, dans le centre de Port-au-Prince. Composées d’une équipe pluridisciplinaire, qui comprend des médecins, des infirmiers, des psychologues, des agents de santé et des logisticiens, elles transportent du matériel médical et offrent des soins quasi impossibles à trouver sur place.

Une clinique MSF installée dans un bâtiment public du quartier Bel-Air à Port-au-Prince. Haïti. 2023.
 © Alexandre Marcou/MSF
Une clinique MSF installée dans un bâtiment public du quartier Bel-Air à Port-au-Prince. Haïti. 2023. © Alexandre Marcou/MSF

« Les établissements de soins publics sont confrontés à des pénuries régulières de personnel, de médicaments et de fournitures, poursuit Michele Trainiti. D’autre part, les habitants craignent trop de se déplacer et de recevoir une balle perdue, un risque réel à Port-au-Prince. Ces cliniques mobiles ne sont pas parfaites, mais elles nous permettent de rapprocher les soins de santé des personnes qui en ont besoin. »

Chaque session de clinique mobile permet d’effectuer des dizaines de consultations. « Je reçois généralement entre 50 et 70 personnes par jour, explique la Dr Engleed Emeran. Il s’agit surtout de jeunes femmes qui viennent consulter pour des infections sexuellement transmissibles, de femmes âgées pour des  maladies chroniques, et de jeunes enfants pour des infections respiratoires. Lors de ces cliniques mobiles, nous ne pouvons pas utiliser des méthodes de diagnostic avancées, mais c’est le seul moyen pour de nombreuses personnes d’avoir accès à des soins de santé et à des médicaments gratuits. »

Un groupe de femmes reçoit des informations de santé sexuelle et reproductive lors d'une clinique mobile MSF à Port-au-Prince. Haïti. 2023.
 © Alexandre Marcou/MSF
Un groupe de femmes reçoit des informations de santé sexuelle et reproductive lors d'une clinique mobile MSF à Port-au-Prince. Haïti. 2023. © Alexandre Marcou/MSF

Ce jour-là, une partie de la clinique mobile, installée dans un bâtiment public du quartier Bel-Air, offre des soins contre la gale, hautement contagieuse. Cette affection cutanée, causée par de minuscules acariens, résulte de conditions de vie insalubres - il s'agit de la maladie la plus fréquemment observée par les équipes MSF dans ces quartiers touchées par la violence. 

Une autre composante importante de ces cliniques mobiles est d’offrir un soutien en santé mentale. « Ces personnes sont obligées de vivre avec le bruit des balles, la peur d’être attaquées par des groupes armés, et certaines ont perdu des proches au cours des derniers mois, explique Camille Dormetus, psychologue MSF. La violence dont les gens sont victimes et témoins a un impact significatif sur leur santé mentale. J’ai vu de nombreuses personnes souffrant d’anxiété, de dépression ou de troubles du sommeil. Certains consomment des substances psychoactives pour échapper à leur réalité. »

Lorsque c’est possible, les équipes de MSF orientent les patients nécessitant une prise en charge avancée vers d’autres structures de santé. « Nous tentons de faire le maximum pour apporter des soins à ces populations touchées de plein fouet par la violence, mais les besoins sont tout simplement trop importants », conclut Michele Trainiti.

Au cours des quatre premiers mois de 2023, les équipes mobiles de MSF ont pris en charge 7 700 personnes. Elles ont aussi distribué plus de 300 000 litres d’eau potable dans les zones de Delmas et Bel-Air, particulièrement touchées par la violence. En février, 300 000 litres d’eau potable et 607 kits d’hygiène ont été distribués aux personnes déplacées par la violence dans les quartiers de Fort National et de Poste Marchand.

Notes

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