Pourquoi porter une attention particulière aux enfants ?
Les enfants sont en cours de croissance. Parce que leur superficie corporelle est moins importante, le vibrion du choléra occupe l'intestin plus rapidement et la maladie se propage plus vite. En comparaison, une même quantité de vibrion affectera beaucoup plus un enfant qu'un adulte. Par ailleurs, leur système immunitaire n'est pas complètement développé. Ils sont donc plus vulnérables face au choléra et auront plus de difficultés à combattre l'infection.
De plus, les enfants ne maitrisent pas les mesures d'hygiène, ce qui peut favoriser leur contamination. Ce peut être un facteur de vulnérabilité supplémentaire mais ce n'est pas une vérité absolue car le comportement des adultes est sensiblement similaire.
Proposez-vous une prise en charge spécifique ?
Le traitement est identique à celui des adultes. Réhydratation orale pour les cas simple et par voie intraveineuse pour les cas sévères. La particularité essentielle réside dans le calcul de la dose et du flux de solution à administrer selon l'âge, le statut nutritionnel et d'éventuelles pathologies associées. Lorsque les pertes en liquides sont extrêmement abondantes, la réhydratation est complétée par un traitement antibiotique, administré selon le poids, pour les enfants de plus d'un an.
Le personnel doit être expérimenté en pédiatrie car la déshydratation entraine un assèchement des veines rendant difficile la pose d'une perfusion chez un enfant. Parfois, piquer dans le bras n'est pas possible, alors nous essayons dans la main, la jambe puis la tête. En dernier recours, nous pratiquons une injection intra-osseuse. Une opération délicate mais qui doit être réalisée rapidement car pour un enfant qui présente une déshydratation sévère, le facteur temps est déterminant.
Parce qu'ils demandent une attention particulière et du personnel soignant adapté, les enfants sont pris en charge dans un espace spécifique. Sur une capacité d'hospitalisation de 336 lits (14 tentes de 24 lits) dans notre centre de traitement du choléra de Sarthe, 72 lits sont dédiés à la pédiatrie. Un chiffre qui varie car nous adaptons continuellement notre réponse à l'évolution de l'épidémie.
Quelles sont les difficultés spécifiques liées aux enfants ?
Il y a d'abord la problématique des pathologies associées : pneumonie, asthme qui compliquent le traitement et vulnérabilise d'autant plus l'enfant. Nous traitons en priorité le choléra, qui est l'urgence vitale, puis l'autre pathologie avec un traitement adapté. Pour le cas particulier de la malnutrition, dont le traitement n'est pas compatible avec la prise en charge du choléra, nous transférons les enfants guéris du choléra dans des structures MSF spécialisées en nutrition.
Nous sommes également confrontés à des cas d'enfants sans autorité parentale. Il y a des enfants qui arrivent seuls, soit parce que leur(s) parent(s) sont malades soit parce qu'il y a d'autres enfants à charge à la maison. Parfois, l'enfant est abandonné car le choléra fait encore peur. Une fois guéris, l'assistance sociale les prend en charge. Mais avec les messages d'information et de sensibilisation, cela devient plus rare.
Depuis le début de l'épidémie mi-octobre 2010, les équipes MSF ont traités 84 500 patients dans près de 50 centres et unités de traitement du choléra à travers le pays ; soit 57% du nombre global de personnes affectées par le choléra selon les derniers chiffres du ministère de la Santé en Haïti qui font état de 147 787 patients et plus de 3 330 décès.
Dossier spécial choléra HaïtiConsultez notre dossier consacré à l'épidémie de choléra en Haïti.