Haïti : une demande de soins psychologiques importante

Projet "Kindergarden Mickey" de MSF Suisse à Port au Prince. MSF fournit des soins post opératoires physiotherapiques et psychiques.
Projet "Kindergarden Mickey" de MSF Suisse à Port-au-Prince. MSF fournit des soins post-opératoires, physiotherapiques et psychiques. © Tristan Pfund / MSF

Trois mois après le tremblement de terre, le temps n'a pas effacé le choc psychologique. De nombreux habitants de Port-au-Prince et des environs ont besoin d'une écoute professionnelle, souvent de courte durée, et parfois de soins plus complexes. MSF a développé un large volet de soins de santé mentale.

Le 12 janvier dernier, tout à basculé en 37 secondes. Ce bref moment est revécu, plus ou moins fréquemment, par de nombreuses victimes du tremblement de terre. Cyrel, petit garçon de 9 ans, est resté 3 jours sous les décombres. Il relate chaque instant avec une précision déconcertante : « Un moment, j'ai senti une main sur mon épaule. C'était la main de ma mère, sa main était morte... devant moi j'ai vu les pieds de mon père, ils ne bougeaient plus, ils étaient tout cassés. Mon père aussi était mort, j'étais vivant ». Les survivants qui ont été prisonniers des décombres peuvent connaître des crises d'angoisse fortes, même si l'incarcération n'a duré que quelques heures et indépendamment de la gravité des blessures.

Cyrel tente de contrôler ses émotions : « Je ne pleure pas parce que je n'aime pas pleurer. Je ne pense à rien. Je me demande quelle nourriture il y aura à midi, quand j'irai au bloc pour le pansement, comment ça fait mal et parfois pas, comment sera la prochaine anesthésie...voilà... des choses qui empêchent de penser, c'est ça de penser à rien.»

Les équipes médicales de MSF ont soigné en priorité les traumatismes physiques mais très rapidement un soutien psychologique a été proposé aux patients hospitalisés, puis plus largement à la population de Port-au-Prince et des autres zones détruites par le tremblement de terre.

« La population haïtienne s'appuie sur des recours culturels et religieux qui apportent un soutien important » remarque le docteur Frédérique Drogoul, référent psychiatre à MSF. « Mais nous constatons aussi une forte demande de soutien psychologique. Dans les cliniques de médecine générale, l'annonce de l'offre de consultations avec un psychologue suscite l'intérêt d'une bonne partie des patients, parfois un quart de la file d'attente s'inscrit. Les symptômes sont plutôt classiques, perte de sommeil et d'appétit par exemple. Ni la nature des problèmes psychologiques ni leur sévérité ne sont très différents d'autres situations de catastrophe naturelle. Mais nous avons ici, en Haïti, une population massivement touchée ».

Les consultations pour des maladies représentent une occasion d'aborder des douleurs reléguées au second plan. C'est pour son neveu malade, un bébé, qu'une jeune fille de 17 ans, Naïda, est venue à la clinique. Pendant un moment, elle a pu parler des nombreux décès dans sa famille, de sa nouvelle responsabilité vis-à-vis des deux jeunes enfants survivants, ses neveux. Naïda répète sans cesse : « Je veux partir, je veux voyager car je suis inconsolable ». De nombreux déplacés vivent encore dans les décombres de leur ancienne vie et sont sans cesse confrontés à la destruction qu'ils ont subie.

« Une grande partie de la population est encore occupée au quotidien à trouver un toit, un repas, un médecin, un emploi. Cette recherche intensive pour répondre aux besoins immédiats diffère les réactions post-traumatiques » explique Frédérique. « Des troubles psychologiques se manifesteront lorsque les conditions de vie seront enfin décentes, donc le besoin de soins de santé mentale ne va certainement pas diminuer rapidement ». Les soins de santé mentale mis en place par MSF comprennent des sessions de groupe et des consultations individuelles et familiales. De plus, des activités ludiques ou encore la visite de clowns sont organisées dans les hôpitaux, particulièrement mais pas uniquement en pédiatrie.

Dossier "Tremblement de terre en Haïti"

Retour au dossier consacré aux interventions de MSF en Haïti après le séisme du 12 janvier 2010.

Notes

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