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Japon : des équipes MSF flexibles et mobiles au nord de Miyagi
17 mars 2011
- mis à jour le 4 août 2011
MSF se mobilise depuis samedi dans les régions du nord-est du Japon pour répondre aux besoins des populations sinistrées par le séisme. Eric Ouannes, directeur général de MSF au Japon, fait un point sur la situation et sur l'intervention de MSF.
Comment MSF est-elle intervenue après le séisme ?
Nous avons essayé de répondre très rapidement. Nous voulions dès le début déployer des petites équipes flexibles, mobiles et modulables. Elles devaient être capables de se déplacer rapidement d'une zone à une autre, pour couvrir une distance aussi grande que possible et visiter un maximum de centres d'évacuation.
Quelle est l'ampleur de la mobilisation ?
La réponse a été massive. Les chiffres ne sont pas très précis mais on parle de 80 000 à 250 000 personnes, essentiellement issues de l'armée japonaise, mais aussi de services médicaux d'urgence, dont des organisations humanitaires étrangères et japonaises.
Quels sont les principaux problèmes rencontrés dans ces zones ?
Pour l'instant, dans les 20 ou 30 centres d'évacuation que nous avons visités, la priorité concerne les maladies chroniques observées chez les personnes âgées. Ces personnes ont dû interrompre leur traitement. Nos médecins font de leur mieux pour qu'elles reprennent leur traitement et pour éviter une aggravation de leur état de santé.
En outre, nous rencontrons des problèmes avec le réseau de communication, dont le fonctionnement a été très irrégulier ces quatre derniers jours. La situation s'améliore mais reste compliquée. Le transport est également difficile : la plupart des routes sont coupées et nous manquons d'essence pour nos voitures.
Par ailleurs, les gens touchés directement par le séisme et les tsunamis affrontent actuellement un froid hivernal. Ils manquent de nourriture, d'eau et surtout de couvertures.
Quelles sont les maladies chroniques rencontrées ?
Les maladies dont souffre la plupart des personnes âgées, c'est-à-dire l'hypertension, les problèmes cardiaques mais aussi le diabète. Comme je l'ai dit, nous faisons en sorte qu'elles reprennent leur traitement. Nous rencontrons aussi des cas d'hypothermie et de déshydratation. Mais le nombre de cas est limité compte tenu du nombre de personnes qui ont été déplacées ou qui ont perdu leur maison.
MSF prévoit-elle une intervention sur le long terme ?
Il est trop tôt pour le dire. Aujourd'hui, nous réfléchissons à l'éventualité d'augmenter le nombre d'équipes mais la décision n'est pas encore prise. Nous cherchons à être présents dans plus de zones et nous savons que nous devons aller vers le nord par rapport à notre position actuelle. Actuellement, nous sommes dans le nord de la préfecture de Miyagi. Nous essayons de rejoindre Iwate pour évaluer la situation et voir si MSF peut y apporter une aide.
Ce qui est clair, c'est que ce système d'équipes très flexibles et mobiles permet de répondre aux besoins que nous avons identifiés au départ. Nous continuerons avec cette stratégie, en augmentant peut-être le nombre d'équipes, pour couvrir plus de besoins. Mais nous ne prévoyons pas d'intervention massive au regard de l'arrivée de centaines d'humanitaires venus du monde en entier. Aujourd'hui, ce n'est absolument pas ce que nous avons en tête.
Pourquoi cela ?
D'abord parce que le déploiement de l'aide gouvernementale et internationale a été massif. Les besoins les plus urgents étant couverts, on ne peut donc parler de crise humanitaire à ce stade. Un grand nombre d'hôpitaux fonctionnent toujours dans la région, le système de référence également. Il y a des médicaments et les médecins travaillent dans la plupart des hôpitaux. Certes, tous les besoins ne sont pas couverts. Rien d'anormal toutefois au regard des conséquences du séisme et des tsunamis. Face à l'ampleur de ces désastres, il y a des manques et nous sommes là pour tenter de les combler.
Qu'envisage MSF en cas d'aggravation de la situation nucléaire ?
La réponse est claire : nous évacuerons les équipes. Pour l'instant, nous surveillons la situation heure par heure. Chaque membre de l'équipe de terrain est équipé d'un détecteur de radiation. Nous recoupons nos informations en provenance de différentes sources gouvernementales et non gouvernementales, japonaises et internationales. Dès que le niveau de radiation nous paraîtra dangereux, alarmant ou présentant des risques pour la santé, nous évacuerons les équipes. Nous avons identifié des itinéraires routiers qui nous permettent d'évacuer rapidement.
MSF peut-il intervenir en cas de maladies causées par les radiations ?
En l'état actuel, la réponse est non. Nous ne sommes pas spécialistes de ce type d'intervention. Néanmoins nous avons sollicité nos collègues du réseau MSF sur cette question des radiations. Parmi les 25 000 à 30 000 personnes qui composent le mouvement international MSF, certains ont déjà travaillé dans ce domaine spécifique. Nous rassemblons donc les données existantes afin de voir si nous serions utiles dans tel ou tel registre. Cela relève néanmoins des autorités japonaises qui semblent déjà s'y préparer, d'après les médias.
MSF compte-t-elle lancer un appel aux dons ?
Ne connaissant pas à ce stade l'étendue des activités que nous mènerons dans les prochaines semaines ou les prochains mois, c'est un peu tôt pour le dire. Nous en discutons néanmoins. Pour le moment, nous disposons des fonds nécessaires pour assurer nos opérations. Le cas échéant, nous pourrons toujours revoir notre position.
Détail des activités de MSF
Trois équipes mobiles de MSF viennent en renfort à une équipe soignante japonaise présente auprès de 10 000 personnes déplacées dans 20 centres d'accueil à la suite du tsunami dans la région de Tome, à 140 km au nord de Fukushima. Elles réalisent en moyenne 200 consultations médicales par jour, essentiellement pour des personnes âgées en rupture de soins. Les équipes rencontrent des cas de déshydratation, d'hypertension artérielle, de diabète, ou des personnes victimes du stress ou d'hypothermie (du froid). Elles assurent également un approvisionnement en médicaments.
MSF devrait par ailleurs expédier rapidement 5 000 couvertures aux populations sinistrées dans la région de Tome.
Une quatrième équipe mobile MSF explore d'autres centres d'accueil situés plus au nord et, en fonction des besoins, effectue des donations de médicaments ou aide à réaliser des consultations médicales.
Interview de Nobuko Kurosaki , Présidente de MSF au Japon