Dès le début des affrontements entre armée sud-soudanaise et groupes armés, le 24 juin dernier, les habitants de Wau ont fui et se sont dispersés dans les environs ; 10 000 personnes se sont ainsi réfugiées dans l’enceinte d’une base des Nations unies. « Il y a une semaine, les champs qui entourent cette base étaient vides. Ils sont depuis occupés par des milliers de personnes. Et nous savons que des dizaines de milliers d’autres sont regroupées ailleurs, dans des écoles, des églises, mais aussi en forêt, sans abri, soins ou protection », témoigne le Dr David Kahindi, coordinateur médical adjoint au Soudan du Sud avec MSF depuis plus de trois ans.
« Les déplacés continuent d’affluer sur la base des Nations unies. Ce sont principalement des familles dépourvues de tout, affamées, assoiffées et dont l’état nécessite des soins médicaux », rapporte le Dr Kahindi. Les 26 et 27 juin, MSF a envoyé un dispensaire mobile sur ce site : en deux jours, plus de 330 personnes ont été reçues en consultation. Après plusieurs mois d’instabilité, de violences et d’insécurité, l’état de santé de ces patients s’est avéré très inquiétant : « les personnes que nous soignons sont bien plus malades que ce que nous imaginions. Il y a des cas sévères de paludisme, de malnutrition, de diarrhées et d’infections respiratoires. Nous avons aussi pris en charge des blessés par balle et des femmes violées. Certains sont bouleversés, traumatisés », explique le Dr Kahindi.
Lorsque, mi-2016, MSF a démarré son intervention d’urgence à Wau, la situation en ville était alors très tendue avec une importante présence d’hommes en armes, y compris au sein de l’hôpital de la ville. « Certains de nos patients se sont enfui de l’hôpital de la ville car ils ne s’y sentent pas en sécurité. Aujourd’hui, j’ai soigné une femme dont les brûlures aux mains et à l’abdomen s’étaient infectées ; elle était terrorisée à l’idée d’y retourner », raconte le Dr Kahindi.
Avant les derniers évènements, près de 40 000 personnes déplacées cohabitaient déjà avec la population résidente de Wau. Dès le début de son intervention, MSF avait également mené une évaluation en périphérie de la ville, dans des zones plus difficiles d’accès où la situation s’est révélée dramatique : villages et centres de santé incendiés, populations terrées dans la forêt. « Depuis plusieurs mois, nous essayons d’atteindre ces personnes isolées. 500 consultations étaient assurées, en moyenne, chaque semaine dans les zones rurales environnantes. Nous soignions des cas de malnutrition, de paludisme sévère, d’infections respiratoires et cutanées, de diarrhées… Autant de pathologies liées à l’impact du conflit qui empêche les habitants de cultiver leurs champs, et leur impose des conditions de vie insalubres : dehors, sous les arbres, sans moustiquaire, ni eau potable, ni nourriture. »
Depuis le dernier regain de tensions et d’insécurité, MSF a dû suspendre ses activités ambulatoires. « Il est à craindre que ces nouvelles violences aient forcé des centaines, voire des milliers de personnes à fuir encore plus loin. Ce sont ces populations qui nous inquiètent le plus ; si elles sont malades, elles ne peuvent bénéficier d’aucun soin. Dans les jours à venir, nous allons travailler d’arrache-pied pour tenter de les retrouver », assure le Dr Kahindi.
Le conflit en cours au Soudan du Sud avait, jusque-là, relativement épargné l’ouest du pays. Mais, depuis quelques mois, cette zone est en proie, à son tour, à des pics de violences, notamment autour de Wau. Mi-2016, MSF a mené une mission exploratoire et ouvert, dans la foulée, un projet d’urgence à Wau et sa périphérie pour les déplacés résidant en ville comme en périphérie.
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