Soudan : quand des obstructions bureaucratiques entravent l’action de MSF

Des membres des équipes MSF en discussion pour l'organisation d'une clinique mobile à Wad Madani au Soudan, en juin 2023. 
Des membres des équipes MSF en discussion pour l'organisation d'une clinique mobile à Wad Madani au Soudan, en juin 2023.  © Ala Kheir

Au troisième mois du conflit entre les Forces armées soudanaises (SAF) et les Forces de soutien rapide (RSF), les violences et le manque d’accès aux soins de santé persistent lourdement au Soudan, en particulier à Khartoum et dans la région du Darfour. Les équipes de Médecins Sans Frontières sont présentes, notamment dans ces deux zones, mais leurs activités sont entravées par des restrictions administratives et bureaucratiques, qui les empêchent de développer leurs activités.

« Le système de santé soudanais est débordé et des personnes décèdent faute d’avoir eu accès à une prise en charge adaptée, explique Jean Nicolas Armstrong Dangelser, coordinateur des urgences MSF au Soudan. En empêchant les organisations médicales d’intervenir correctement et plus largement, les belligérants font preuve d’un mépris total pour la vie des civils. »

Si les équipes de Médecins Sans Frontières travaillent actuellement dans 11 États du Soudan, le volume de leurs activités ne correspond pas à l’ampleur des besoins identifiés sur le terrain. MSF s’est efforcée d'accroître son intervention, mais ces tentatives ont été constamment entravées, malgré les nombreux engagements publics des belligérants.

Une équipe MSF, comprenant du personnel médical d'urgence expérimenté, n’a par exemple pas pu se rendre, depuis Port-Soudan, vers des zones où les besoins médicaux sont plus importants. Les membres de cette équipe ont réussi à réorienter leurs activités, mais l’impact de leur travail a été amoindri par ces obstructions administratives.

« On ne comprend toujours pas pourquoi, malgré nos nombreuses demandes et nos multiples tentatives de dialogue avec les autorités, nous n’avons pas été autorisés à nous rendre dans les États de Khartoum et du Nil, souligne Dr Javid Abdelomoneim, coordinateur médical MSF. Cela nous a pris des semaines pour rien, pendant lesquelles toute cette équipe est restée bloquée à Port-Soudan. »

Depuis le début du conflit, cette obstruction administrative prend différentes formes. Les autorités ont entravé à plusieurs reprises la circulation du personnel humanitaire et des fournitures entre et à l'intérieur des États. Les demandes de permis de voyage soumises à temps et avec les documents requis par MSF ont été retardées, rejetées, annulées ou non respectées, le tout sans que des raisons claires soient données. 

Même lorsque des permis ont été délivrés, dans certains cas, le personnel et les fournitures de MSF ont été refoulés par le personnel de sécurité aux points de contrôle, parfois harcelés, menacés ou détenus. Dans certains endroits, les autorités ont indiqué que des escortes armées seraient nécessaires pour les mouvements d'approvisionnement, ce qui aurait eu pour effet de réduire la capacité de l’association à se déplacer sans entrave. 

 

Malgré des demandes répétées, les autorités soudanaises ont délivré beaucoup moins de visas que nécessaire et le processus d’attribution de ces visas semble incohérent. Cette incertitude rend difficile la planification des activités de MSF et incertain l’avenir de ses opérations dans le pays, dans un contexte où l’envoi de personnel supplémentaire est essentiel. 

À ce stade, s’il n’est pas clair qu’il s’agisse d’une tentative délibérée de restreindre l'aide humanitaire, le résultat pour la population est le même : un accès réduit aux soins de santé au moment où il est le plus urgent.

Notes

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