Médecins Sans Frontières (MSF) a accueilli positivement l'annonce faite
par CIPLA, un producteur indien de médicaments génériques, de lui
vendre son traitement contre le SIDA (trithérapie) pour 350$ par an et par patient et aux gouvernements pour
un prix de 600$. Les détails de cette offre précisent que les achats
effectués par les gouvernements doivent être " garantis " par MSF, ce
qui n'est ni pratique ni nécessaire. MSF demande donc que CIPLA offre
directement ce prix aux gouvernements et aux agences des Nations Unies.
Cette
offre illustre le fait que le prix de 200$ par année pour une
trithérapie, présenté comme un objectif majeur par MSF à la conférence
sur le SIDA de Durban en juillet
passé, est presque atteint. Ce prix de 350$ représente une baisse de
96,6% par rapport au prix de la même combinaison de médicaments aux
Etats-Unis, qui coûterait environ 10'400$.
A court terme, MSF invite les cinq compagnies pharmaceutiques impliquées dans l'initiative d'ONUSIDA (UNAIDS Accelerating Access Initiative) d'aligner leur offre sur celle
de CIPLA, de rendre leurs prix publics et d'accélérer la mise en place
de mesures concrètes, de manière à ce que des médicaments soient
rapidement fournis aux patients. L'offre de CIPLA démontre que les
grandes compagnies pharmaceutiques peuvent encore réduire leurs prix.
Lors de la journée mondiale du SIDA, MSF avait demandé sans succès aux cinq compagnies partie prenante à l'initiative d'ONUSIDA d'abaisser leurs prix pratiqués aux Etats-Unis de 95%.
Toujours
dans le cadre de cette initiative, le Sénégal paye actuellement entre
1008 et 1821$ par traitement par an - presque le triple d'un traitement
générique - et les grandes compagnies ont refusé de révéler leurs prix
pour l'Ouganda et le Rwanda.
L'engagement politique et l'amélioration de l'accès au soin sont des éléments fondamentaux dans la lutte contre le SIDA. Au Brésil l'engagement politique du gouvernement a permis de limiter de moitié les décès dus au SIDA, en grande partie grâce à la production de médicaments génériques.
De
gros producteurs, y compris le gouvernement du Brésil, peuvent à la
fois approvisionner en médicaments d'autres pays en voie de
développement et appuyer le lancement de production nationale dans de
nouveaux pays.
Les pays en voie de développement devraient
pouvoir bénéficier pleinement de leurs droits de produire ou importer
des médicaments génériques contre le SIDA comme mentionnés dans les accords ADPIC conclus à l'Organisation Mondiale du Commerce.
Le
défi dans l'immédiat est de pratiquer réellement ce prix générique. La
communauté internationale doit pour cela fournir un soutien politique,
pratique et financier. Un appui politique est nécessaire pour permettre
aux pays en voie de développement de surmonter les barrières liées aux
brevets. Le système onusien peut prendre en charge les aspects
pratiques de la distribution. Les donateurs peuvent apporter l'appui
financier nécessaire en allouant suffisamment de fonds pour l'achat de
médicaments et la mise en place de programmes de traitement aux
antirétroviraux. Une réunion internationale devrait immédiatement
rassembler pays en voie de développement, agences de l'O.N.U.,
fabricants de médicaments et bailleurs de fonds pour déterminer la
meilleure stratégie à mettre en place.