Évacuations des campements à Paris : à quand une véritable solution pour les exilé.e.s ?

Condition of migrants in Paris
Condition de vie des exilé.e.s à la Porte de la Chapelle.  © Antoine Kremer/MSF

Le 6 novembre dernier, le gouvernement s’est engagé à réaliser avant la fin de l’année l’évacuation des campements parisiens, en promettant l’inconditionnalité de l’hébergement de l’ensemble des personnes.

Une promesse oubliée

Une opération de mise à l’abri s’est déroulée le lendemain Porte de la Chapelle et avenue Wilson à Saint Denis, mais contrairement aux engagements pris, le principe d’inconditionnalité n’a pas été respecté. Dans les 48 heures, nous avons constaté le retour à la rue de plusieurs dizaines de personnes, ces dernières « ne correspondant pas aux critères administratifs requis ». Leurs tentes et duvets ayant été détruits lors de l’évacuation, pour ces personnes, une nouvelle errance commence dans le dénuement le plus total.

Une mise à l’abri sous-dimensionnée puis annulée

Le 21 novembre, une mise à l’abri d’environ 350 personnes était prévue sur le campement de la Porte d’Aubervilliers, alors que plus de 2000 personnes y vivent. Plusieurs centaines de personnes, dont des familles, ont attendu des heures dans la nuit et le froid afin de pouvoir en bénéficier. Les bus de la Préfecture d’Ile-de-France sont bien venus les chercher, mais sont repartis à vide, en raison de l’absence des forces de police pour assurer la sécurité de l’évacuation. Cette opération catastrophique illustrant les désaccords entre les Préfectures d’Ile de France et de Police a eu pour conséquence de fragiliser encore davantage des personnes déjà extrêmement vulnérables.

La politique de “zéro-retour” : seul engagement respecté à ce jour

En parallèle, la Préfecture de Police a annoncé la mise en place d’une stratégie de “zéro retour” Porte de La Chapelle, renforçant le déploiement des forces de l’ordre dans la zone pour éviter toute reconstitution de campement. Ce harcèlement policier qui contrôle, disperse et invisibilise les exilé.e.s semble pour l’instant être la seule promesse tenue. Pourtant, il ne résout en rien la situation des personnes à la rue, et ne permet pas à celles et ceux qui le souhaitent de demander l’asile dans de bonnes conditions. 

Bien au contraire, les exilé-e-s sont poussés à se cacher et à vivre dans des conditions inqualifiables. Cette politique réduit leur accès aux distributions alimentaires, aux soins, aux informations sur leurs droits, et les éloigne encore davantage du système d’hébergement. Nous avons déjà observé l'inefficacité de tels dispositifs policiers Porte de la Chapelle en 2017 et au Millénaire en 2018 : leur seul effet est de déplacer les campements sur d’autres sites moins visibles.

L’errance sans cesse renouvelée

Nous, collectifs et associations engagés auprès des personnes exilées dans le Nord-Est parisien, alertons une fois de plus, après 59 évacuations en 4 ans, sur ce cycle infernal fait de campements, évacuations et harcèlements policiers. 59 fois, une prise en charge inconditionnelle et durable a été promise mais effectuée dans la plus grande opacité. 59 fois, dans les semaines qui ont suivi, nous avons
observé le retour à la rue d’hommes, de femmes et d’enfants, contraints de se disperser et de s’isoler pour éviter tout harcèlement policier.

Nous ne cessons de dénoncer la volonté du gouvernement de maintenir ainsi ces personnes dans la précarité, et nous ne cessons de nous indigner de cette mise en danger délibérée. Nous sommes très inquiets de cette nouvelle dégradation de la situation à l’approche de l’hiver. Le gouvernement ne peut continuer de reproduire ces opérations d’évacuations sans garantir un hébergement pérenne, un accès aux soins et aux droits pour toutes les personnes exilées sur le territoire.

Structures signataires :

Action Contre la Faim - ACF, Agir pour le Développement de la Santé des Femmes - ADSF, Amnesty International - Région Paris, La Chorba, La Cimade - Région Ile-de-France, Collectif Audonien Solidarité Migrants, Collectif pour une Nation Refuge, Collectif P’tits Dej Solidaires, Collectif Solidarité Migrants Wilson, Collectif Stalingrad Connection, Le COMEDE, Emmaüs France, Etats Généraux des Migrations Paris - EGM 75, La Gamelle de Jaurès, Le GISTI, Ligue des Droits de l’Homme – LDH Fédération de Paris, Médecins du Monde France – MDM, Médecins Sans Frontières - MSF, Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples - MRAP Fédération de Paris, Paris d’Exil, Paris Refugees Ground Support, Utopia 56, Watizat.

Notes

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