Les progrès de la vaccination tournent le dos aux enfants réfugiés

MSF a vacciné 5000 enfants de moins de 2 ans à Yida au Soudan du Sud. Yann Libessart/MSF
MSF a vacciné 5000 enfants de moins de 2 ans à Yida, au Soudan du Sud. © Yann Libessart/MSF © Yann Libessart/MSF

Alors que Médecins Sans Frontières débute pour la première fois une campagne de vaccination contre le pneumocoque dans le camp de réfugiés de Yida au Soudan du Sud, l’organisation médicale internationale déplore que les acteurs mondiaux de la vaccination négligent l’accès aux nouveaux vaccins pour les enfants en situation de crise.

Médecins Sans Frontières a dû faire face à de multiples obstacles bureaucratiques pour acquérir des doses de nouveaux vaccins à un prix abordable afin d’organiser une campagne de vaccination contre les infections à pneumocoque dans le camp de Yida.

« Les enfants réfugiés sont particulièrement vulnérables face aux maladies infectieuses, réagit Kate Elder, conseillère pour la Campagne d'Accès aux Médicaments Essentiels de MSF. Tous les efforts possibles devraient être faits afin qu’ils puissent bénéficier des vaccins les plus récents. Pourquoi les acteurs internationaux de la vaccination continuent de dire que ces enfants ne sont pas leur problème ? »

Les nouveaux vaccins ont jusque ici été introduits dans les pays pauvres grâce au soutien de l'Alliance mondiale pour les vaccins et l’immunisation (GAVI Alliance). Or GAVI ne couvre pas la vaccination dans les camps de réfugiés ou les situations d’urgence humanitaire, laissant de nombreux besoins insatisfaits. De plus, les prix négociés par GAVI ne s’appliquent pas systématiquement aux acteurs humanitaires qui travaillent dans ce type de contextes. En dépit de demandes répétées, notamment auprès des sociétés pharmaceutiques Pfizer et GlaxoSmithKline (GSK) qui produisent ces nouveaux vaccins et auprès de GAVI, un accès aux prix réduits pour les organisations humanitaires comme MSF n’a pas pu être mis en place.

Les populations soudanaises de l'Etat du Sud-Kordofan ont commencé à traverser la frontière vers le Soudan du Sud quand le conflit a éclaté en juin 2011 entre le gouvernement de Khartoum et la rébellion du mouvement de libération du peuple du Soudan (SPLM-Nord). L'été dernier, au plus fort de la crise, un taux de mortalité élevé était constaté chez les jeunes enfants admis à l'hôpital de MSF dans le camp de Yida.

Les infections des voies respiratoires étaient alors parmi les principales causes de décès. En raison notamment de la promiscuité dans le camp, les enfants réfugiés sont particulièrement vulnérables aux pneumocoques, bactéries à l’origine de la majorité des pneumonies. « La situation était désespérante. Les enfants mourraient de maladies contre lesquelles des vaccins existent », relate Audrey Landmann, coordinatrice du projet MSF à Yida en 2012.

Dans le but de réduire significativement la mortalité à Yida, MSF a alors décidé d’organiser une campagne de vaccination utilisant le récent vaccin anti-pneumococcique conjugué (PCV). C'est une des premières fois que le PCV est utilisé dans un camp de réfugiés, et la première fois au Soudan du Sud.

A plusieurs reprises, MSF a dû reporter sa campagne de vaccination en raison de longues négociations et des contraintes d’approvisionnement international. Des donations ad hoc ont été proposées par les fabricants de vaccins ; MSF ne souhaite pas dépendre de la générosité de l’industrie pharmaceutique mais plutôt privilégier des solutions durables qui lui permettront d’intervenir vite dans des contextes d’urgence similaires à l’avenir.

MSF a finalement réussi à acheter des vaccins PCV chez GSK à un prix préférentiel, mais les retards accumulés ont décalé la vaccination jusqu’à la saison des pluies, période compliquée en termes logistiques.

« Depuis plus de quatre ans nous tentons d’obtenir un accès aux nouveaux vaccins régulier et abordable, mais nous n'avons toujours pas de solution pour les réfugiés, explique le Dr Greg Elder, directeur adjoint des opérations MSF à Paris. Nous avons besoin que les compagnies pharmaceutiques et GAVI garantissent des vaccins au plus bas prix pour les organisations humanitaires. Il est possible de sauver la vie d’enfants en difficulté. Alors faisons le. »


Présente à Yida depuis octobre 2011, MSF gère actuellement un centre de soins de santé primaire (10 000 consultations par mois en moyenne), un hôpital de 60 lits, une unité de traitement de la malnutrition, et dispose d'équipes médicales mobiles à l’intérieur du camp. MSF est également impliquée dans l’approvisionnement en eau et la construction de latrines. De mai 2012 à mai 2013, MSF a traité près de 3 000 enfants sévèrement malnutris à Yida.

MSF travaille depuis 1983 dans la région qui constitue aujourd'hui la République du Soudan du Sud et est aujourd’hui présente dans six des dix Etats du nouveau pays. MSF répond aux urgences telles que les déplacements de population, les afflux de réfugiés, les crises de malnutrition et les épidémies de paludisme ou de kala-azar, en plus de fournir des soins de santé de base et des services spécialisés.

Notes

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