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Mineurs non accompagnés à Paris : « C’est le naufrage de l’accueil »

Des policiers demandent à un jeune installé sous le pont d’Ivry-sur-Seine de quitter sa tente. Décembre, 2022
Des policiers demandent à un jeune installé sous le pont d’Ivry-sur-Seine de quitter sa tente. Décembre, 2022 © Mohammad Ghannam/MSF

A Paris, le 20 juin, journée mondiale du réfugié, quelque 450 mineurs non accompagnés ont été évacués violemment par les forces de l’ordre de la place du Palais Royal qu’ils avaient occupé pour demander une mise à l’abri, après des mois d’errance à la rue et d’abandon dans une école désaffectée du XVIe arrondissement de la capitale. Médecins Sans Frontières dénonce l’inertie des autorités qui prive ces jeunes de la protection à laquelle ils ont droit.

450 jeunes évacués

Depuis le 4 avril 2023, plus de 700 adolescents étrangers arrivés en France seuls et sans famille dormaient dans une école désaffectée du XVIᵉ arrondissement de Paris. Hier soir, face aux conditions de vie insalubres et à l'absence de solutions proposées par les pouvoirs publics, les jeunes et les associations qui les accompagnent au quotidien ont décidé de manifester en occupant la place du Palais Royal avec leurs tentes pour demander une mise à l’abri digne de ce nom. Se défaussant de leurs responsabilités, les autorités ont répondu avec une évacuation du campement improvisé en éparpillant les jeunes et en les poussant à quitter le lieu par la force et avec violence. Aucune mise à l’abri ne leur a été proposée.

Depuis la dernière mise à l’abri en décembre, la situation des mineurs non accompagnés n’a pas changé et les associations qui les encadrent au quotidien ont continué à assurer leur accompagnement médical, psychologique, social et juridique afin qu’ils puissent accéder à leurs droits. « Les associations ne peuvent pas compenser l’inaction des autorités qui au lieu d’assurer la protection de tous les enfants, organisent le naufrage de l’accueil des mineurs étrangers. Le 2 juin, le Comité des droits de l’enfant de l’ONU a appelé la France à prendre des mesures urgentes concernant la maltraitance et la négligence des enfants privés de milieu familial et des enfants migrants. L’inertie et la réponse des autorités face à la situation dramatique des mineurs non accompagnés est intolérable. Nous continuons à demander à la France de respecter le principe de présomption de minorité et d’ouvrir des places d’hébergement supplémentaires pour accueillir ces jeunes », affirme Euphrasie Kalolwa, responsable du plaidoyer pour MSF.

Souffrances psychiques

Au-delà du suivi continu et individuel mené au centre d’accueil de jour pour mineurs non accompagnés de MSF à Pantin, en Ile-de-France, Médecins Sans Frontières assure depuis mars, un suivi médical des jeunes à la rue, dont certains évacués hier, par le biais d’une clinique mobile. L’équipe s’est déplacée dans les principaux lieux de rassemblement de ces jeunes, où les associations organisent la distribution des repas et leur mise à l’abri. « Depuis mars, nous avons réalisé 155 consultations médicales. Les pathologies que notre équipe a observées sont le résultat de la précarité des conditions dans lesquelles ces jeunes sont contraints de vivre : infections dermatologiques et respiratoires, ainsi que traumatismes physiques et problèmes digestifs. Sans accès à l’eau et avec un nombre de toilettes insuffisant, ils ont passé plus de deux mois dans une école qui avait été déjà classée comme insalubre par les services de la mairie. Le surpeuplement du lieu n’a fait qu’aggraver l’état de santé des jeunes les plus vulnérables, qui étaient souvent remis à la rue après une hospitalisation, sans aucun suivi médical ou social », affirme le Dr. Patrizia Giangrande, coordinatrice médicale pour MSF.

« Plusieurs jeunes ont manifesté une souffrance psychique due à un parcours migratoire éprouvant et violent et à des événements traumatiques comme la disparition des proches pendant le voyage. Devoir choisir entre la rue et une école désaffectée ne fait que prouver le cynisme de l’Etat, qui ignore la souffrance vécue par ces jeunes. La mise à l’abri et une prise en charge pluridisciplinaire seraient le seul traitement efficace pour ces jeunes. », selon le Dr. Giangrande.

Parmi les jeunes pris en charge par MSF, Ahmed* a survécu à un naufrage dans la mer Méditerranée et il a vu son frère se noyer devant lui. « Ces blessures sont invisibles et, si elles ne sont pas soignées, handicapantes. En laissant ces jeunes à la rue, sans un hébergement, qui est le minimum pour se sentir en sécurité, les autorités font primer les questions administratives sur les questions de santé, et assument de renforcer la détresse psychique de ces jeunes. », alerte Euphrasie Kalolwa.

Notes

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