Soudan : MSF contrainte de suspendre ses activités dans le camp de Zamzam, au Darfour du Nord, assiégé et attaqué

Soudan : MSF contrainte de suspendre ses activités dans le camp de Zamzam, au Darfour du Nord, assiégé et attaqué
Zone d'attente des mères et des enfants à l'extérieur de la clinique MSF du camp de Zamzam, située à 15 kilomètres d'El Fasher, au Nord Darfour. Soudan, 15 février 2024. © MSF

L’intensification actuelle des affrontements dans et autour du camp de déplacés de Zamzam, près d’El Fasher au Darfour du Nord, rend impossible pour Médecins Sans Frontières (MSF) de continuer à y fournir une assistance médicale. Malgré une famine généralisée et des besoins humanitaires immenses, MSF n’a d’autre choix que de suspendre toutes ses activités dans le camp, y compris celles de son hôpital de campagne. 

La région est le théâtre d’intenses combats entre les Forces de Soutien Rapide et les Forces Conjointes, une coalition de groupes armés alliés aux forces armées soudanaises, avec des conséquences dramatiques pour les civils. Assiégeant et bombardant la ville d’El Fasher depuis dix mois, les Forces de Soutien Rapide ont intensifié leur offensive ces dernières semaines et ont attaqué le camp de Zamzam, notamment les 11 et 12 février. Les habitants, qui survivaient déjà difficilement, ont désormais un accès encore plus restreint à l'eau et à la nourriture, le marché central ayant été pillé et incendié. 

Au cours des trois premières semaines du mois de février, les équipes de l’hôpital de campagne de MSF à Zamzam ont pris en charge 139 patients, pour l’essentiel blessés par des balles et éclats d’obus. Conçu pour lutter contre la crise massive de malnutrition qui sévit dans le camp, classé l’an dernier en situation de famine par l’Integrated Food Security Phase Classification, l'hôpital de MSF n’a pas la capacité d’assurer des interventions chirurgicales et des soins traumatologiques pour les blessés. 

« Onze patients sont décédés à l’hôpital de MSF, dont cinq enfants, car nous n’avons pas pu les soigner correctement ni les transférer à l’hôpital Saoudien, le seul établissement disposant d’une capacité chirurgicale situé à quelques kilomètres à El Fasher. En décembre et janvier, deux de nos ambulances transportant des patients du camp vers El Fasher ont essuyé des tirs. Aujourd’hui, la situation est encore plus dangereuse, et de nombreuses personnes, y compris des patients nécessitant une chirurgie d’urgence ou une césarienne, se retrouvent piégées à Zamzam », explique Yahya Kalilah, chef de mission de MSF au Soudan. 

« Suspendre nos activités alors que la catastrophe s'aggrave à Zamzam est une décision déchirante. Pendant plus de deux ans, nos équipes ont fait tout leur possible pour fournir des soins malgré le siège autour du camp, les pénuries d'approvisionnement et de nombreux autres défis, tout en appelant à une réponse humanitaire renforcée qui ne s'est jamais concrétisée. », ajoute Yahya Kalilah. « Aujourd’hui, les combats pour le contrôle de la ville d’El Fasher atteignent Zamzam, et les conditions de sécurité les plus élémentaires ne sont pas réunies pour nous permettre de rester dans le camp. Les violences, les grandes difficultés d’acheminement du matériel, l’impossibilité d’envoyer du personnel expérimenté en soutien aux équipes de MSF sur place et d’avoir des routes d’évacuation sûres pour nos collègues et les civils ne nous laissent guère d’autre choix. » 

Accueillant environ 500 000 personnes, le camp de Zamzam a vu arriver de nouveaux déplacés fuyant Abu Zerega, Shagra et Saluma, qui sont maintenant hébergés dans des écoles, des bâtiments communautaires ou sous les arbres en plein air. Ils ont raconté à nos équipes les maisons incendiées, les pillages, les violences sexuelles, les meurtres, les passages à tabac et autres abus dans les villages et sur les routes de la localité d'El Fasher. Quelques centaines de familles ont également atteint Tawila, parfois pieds nus, après avoir tout laissé derrière eux et échappé aux violences en chemin. 

MSF est inquiète pour la sécurité de son personnel et des centaines de milliers de personnes dans le camp de Zamzam et demande instamment aux Forces de Soutien Rapide, aux Forces conjointes soutenant l’armée soudanaise et à tous les acteurs armés présents dans la région de protéger les civils et de permettre à ceux qui souhaitent fuir de le faire en sécurité.  

Dans le Darfour du Nord, MSF poursuit ses activités d'urgence à Tawila et examine toutes les possibilités pour venir en aide aux populations de Zamzam et El Fasher en maintenant un niveau de risque acceptable pour son personnel. Dans l'ouest, le centre et le sud du Darfour et dans d'autres régions du pays, nos équipes continuent de lutter contre la crise nutritionnelle et sanitaire catastrophique, provoquée par un conflit incessant ainsi que les obstructions continues des parties belligérantes et exacerbée par l'échec de la réponse humanitaire. MSF réitère son appel à une augmentation drastique de I'aide dans les nombreux endroits où elle est encore possible. Les parties belligérantes doivent permettre un accès sans entrave à l'aide, et leurs alliés et les États influents doivent faire pression pour atténuer ces obstacles qui causent morts et famine.  

Notes

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