Brésil : les communautés indigènes plus vulnérables face au coronavirus

Erica Cravo, infirmière MSF, lors d'une visite à domicile pour vérifier la température d'une famille qui reste isolée après que l'un d'entre eux a été testé positif au coronavirus.
Erica Cravo, infirmière MSF, lors d'une visite à domicile pour vérifier la température d'une famille qui reste isolée après que l'un d'entre eux a été testé positif au coronavirus. © Diego Baravelli/MSF

Le Brésil enregistre le deuxième plus important nombre de décès liés à la Covid-19 au monde. Abandonnée par le pouvoir fédéral et exclue des systèmes de soins, la population indigène est particulièrement vulnérable à la maladie. Dans l'État du Mato Grosso do Sul, dans le centre-ouest du pays, MSF mène des activités de prévention, de diagnostic et de traitement du coronavirus auprès de ces communautés.

Exclusion des soins

Les peuples autochtones du Brésil sont historiquement négligés par le pouvoir fédéral. Les communautés sont marginalisées dans de nombreux domaines, dont celui de la santé. Les coupes budgétaires dans le financement du système de soins, le manque de médecins et l'accès difficile à des établissements médicaux dans la région rendent les communautés indigènes encore plus vulnérables à la Covid-19. 

Avec très peu de médecins dans l'État du Mato Grosso do Sul, il n'y a souvent personne pour identifier le moment où les symptômes s'aggravent et où la personne a besoin de soins hospitaliers. Lorsque les patients arrivent enfin à l'hôpital, il est parfois déjà trop tard pour les sauver. 

 

Gauche : Dans la ville d'Aquidauana, MSF soutient l'équipe de santé de la municipalité qui visite les patients atteints par la Covid-19. Droite : Mayra Leandro, infirmière MSF, travaille avec un agent de santé local qui s'occupe des patients du village de Lagoinha. La prise de sang va permettre de connaître le taux de sucre dans le sang de la patiente, car de nombreux autochtones souffrent de diabète.
 © Diego Baravelli/MSF
Gauche : Dans la ville d'Aquidauana, MSF soutient l'équipe de santé de la municipalité qui visite les patients atteints par la Covid-19. Droite : Mayra Leandro, infirmière MSF, travaille avec un agent de santé local qui s'occupe des patients du village de Lagoinha. La prise de sang va permettre de connaître le taux de sucre dans le sang de la patiente, car de nombreux autochtones souffrent de diabète. © Diego Baravelli/MSF

« Depuis le début de l'année, nous n'avons eu qu'un seul médecin pour près de 10 000 autochtones. Notre inquiétude s'est accrue lorsque nous avons appris que la maladie était déjà présente dans les villes voisines, car nous savions que nous n'avions aucun établissement médical ici », confie Oto Lara, chef du village autochtone de Colônia Nova. 

Depuis fin août, en plus de soutenir l'hôpital régional d'Aquidauana, MSF a déployé des équipes mobiles dans onze villages aux alentours pour dispenser des consultations dans les postes de santé locaux, dépister les cas suspects de coronavirus et effectuer un suivi médical des cas positifs à domicile. 

Prévalence des maladies chroniques

Le fort taux de prévalence des maladies chroniques, comme le diabète et l'hypertension, au sein des communautés autochtones de l'État de Mato Grosso do Sul, semblerait lié à des changements dans les modes de vie traditionnels : de plus en plus de sédentarisation et une alimentation qui comprend davantage de produits transformés. 

Les maladies chroniques ne sont souvent pas traitées car la population indigène rencontre des obstacles pour accéder aux soins, est victime de discrimination dans les structures de santé et manque d'informations sanitaires appropriées. Ces maladies augmente le risque qu'une personne touchée par la Covid-19 développe des symptômes sévères et en décède.

 

Le docteur Pedro Ueda explique la prescription médicale à une patiente du village indigène de Lagoinha, dans l'État du Mato Grosso do Sul. Elle et son mari ont contracté le coronavirus et sont restés isolés chez eux. Ils ont reçu un suivi médical à domicile.
 © Diego Baravelli/MSF
Le docteur Pedro Ueda explique la prescription médicale à une patiente du village indigène de Lagoinha, dans l'État du Mato Grosso do Sul. Elle et son mari ont contracté le coronavirus et sont restés isolés chez eux. Ils ont reçu un suivi médical à domicile. © Diego Baravelli/MSF

Prévention et prise en charge

Afin de sensibiliser les communautés, MSF mène des activités de promotion de la santé, dont une éducation sanitaire sur les mesures d'hygiène, de prévention et de contrôle des infections à adopter.  « La sensibilisation et la prévention sont très importantes pour que la population soit mieux informée et puisse suivre des recommandations appropriées », explique Pedro Ueda, médecin MSF sur place.

« Nous surveillons l'état des personnes qui ont eu des contacts avec des patients ayant été testés positifs, ainsi que l'état des patients qui sont rentrés chez eux. Notre objectif est de vérifier si les personnes doivent être référées à l'hôpital pour recevoir un traitement spécialisé », ajoute José Lobo, coordinateur du projet MSF dans l'État du Mato Grosso do Sul.

 

Gauche : La Dr. Luiza Cegalla et Erica Cravo, infirmière MSF, assurent le suivi médical d'une patiente testée positive au coronavirus à son domicile, dans le village de Limão Verde, dans l'État du Mato Grosso do Sul. Centre : La Dr. Jenny Martino et le Dr. Michael Jaung discutent d'un patient pris en charge à l'hôpital régional d'Aquidauana, soutenu par MSF. Droite : Erica Cravo, infirmière MSF, prélève un échantillon sur un patient du village de Limão Verde, pour un test Covid-19.
 © Diego Baravelli/MSF
Gauche : La Dr. Luiza Cegalla et Erica Cravo, infirmière MSF, assurent le suivi médical d'une patiente testée positive au coronavirus à son domicile, dans le village de Limão Verde, dans l'État du Mato Grosso do Sul. Centre : La Dr. Jenny Martino et le Dr. Michael Jaung discutent d'un patient pris en charge à l'hôpital régional d'Aquidauana, soutenu par MSF. Droite : Erica Cravo, infirmière MSF, prélève un échantillon sur un patient du village de Limão Verde, pour un test Covid-19. © Diego Baravelli/MSF

Agent de santé dans sa communauté autochtone, Edivaldo Felix vit et travaille dans le village de Limao Verde. En première ligne lorsque le nouveau coronavirus a frappé sa communauté, il a été l'une des premières personnes de son village à contracter la maladie. Après avoir éprouvé des difficultés respiratoires, il a passé 31 jours à l'hôpital d'Aquidauana, où MSF forme et accompagne le personnel dans la prise en charge des patients atteints de la Covid-19.

« C’est une maladie horrible. Vous essayez de respirer mais vous vous sentez toujours essoufflé. Grâce à mon travail, j'avais des connaissances et je pense que cela m'a aidé. Je pense que je serai en mesure de fournir une meilleure assistance à mes patients après avoir souffert du coronavirus », raconte Edivaldo Felix. De retour chez lui, l'agent de santé a été suivi par une équipe MSF qui a surveillé l'évolution de son état de santé.

« Nous avons eu environ 20 morts dans notre village. Avec Médecins Sans Frontières au sein de notre communauté, nous sentons maintenant que nos proches sont plus confiants et davantage pris en charge », conclut  Oto Lara, chef du village autochtone de Colônia Nova. 

 

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