Quelles sont les priorités de MSF dans ce contexte et ses préoccupations principales ?
Les priorités d’intervention varient d’un contexte à l’autre.
Dans certaines zones qui semblent aujourd’hui épargnées, comme la République centrafricaine, le Soudan du Sud, le Yémen, et dont les systèmes de santé, fragiles ou éprouvés par le guerre, peinent déjà à faire face aux besoins sanitaires des populations, il faut protéger le personnel soignant, limiter au maximum les risques de propagation de l’épidémie en mettant en place des programmes de prévention – identification des zones ou populations à risque, sensibilisation et information sanitaire, distribution de savon et d’équipements de protection pour le personnel soignant, renforcement des mesures d’hygiène dans les structures médicales – afin d’éviter que nos hôpitaux et dispensaires ne deviennent des lieux de transmission de la maladie. Dans ces pays où MSF a une présence de longue date, nous souhaitons contribuer à ces efforts contre le Covid-19, tout en assurant la continuité des soins contre le paludisme, la rougeole, les infections respiratoires... Cette continuité est aujourd’hui fragilisée par les restrictions (interdiction d’entrée sur le territoire, mise en isolement préventif pendant 14 jours…) imposées par les gouvernements pour le personnel en provenance de certains pays, comme l’Italie, la France, le Japon... d’où est originaire une partie de notre personnel international, ainsi que la fermeture des frontières, et la suspension de certaines liaisons aériennes. Malgré ces contraintes, notre force est de pouvoir nous appuyer sur le personnel recruté localement dans nos pays d’intervention, qui représente 90% de nos employés sur le terrain.
Dans des pays où les systèmes de santé sont plus robustes, mais où l’épidémie est particulièrement active, tels que l’Italie ou l’Iran, l’enjeu principal est d’éviter le débordement des capacités de prise en charge à l’hôpital. Dans ces contextes, nous pouvons contribuer aux efforts des équipes médicales nationales en mettant du personnel MSF à disposition, pour les soutenir ou les relayer si besoin ; en partageant nos expériences des procédures de triage et de contrôle des infections acquises au contact d’épidémies. Actuellement, nous avons mis à disposition des équipes en soutien à quatre hôpitaux dans le Nord de l’Italie ; nous avons également proposé notre soutien aux autorités iraniennes afin de renforcer leurs capacités d’hospitalisation, ce que nous savons faire en déployant rapidement des structures du type hôpital gonflable. En fonction de l’évolution de l’épidémie en France, s’ils s’avèrent utiles, nous pourrons mettre à disposition de la riposte notre expérience, notre logistique et les savoir-faire de nos personnels.
Un des nerfs de la guerre contre le Covid-19 est la disponibilité des équipements de protection, et notamment les masques et les gants utilisés pour les examens médicaux, etc. L’anticipation de pénuries entraîne des réquisitions de la part de nombreux Etats, qui peuvent tourner en réflexes d’accaparement : dans le contexte actuel, ces équipements devraient au contraire être considérés comme des biens communs à utiliser de façon rationnelle et appropriée, et donc à allouer en priorité aux soignants exposés au virus, partout dans le monde.
D’une manière générale, cette pandémie impose de faire preuve de solidarité à tous les niveaux, entre Etats, dans des logiques d’entraide, de coopération, de transparence et de partage des ressources, et dans les zones affectées, envers les populations les plus vulnérables et envers les soignants.
[1] OMS : DRAFT landscape of COVID-19 candidate vaccines – 4 March 2020