« La réponse aux situations d’urgence est l’essence même de MSF »

Intervention de MSF dans le sud du Niger en août 2016.
Intervention de MSF dans le sud du Niger, en août 2016. © Louise Annaud/MSF

Épidémies, déplacements de populations, inondations… Voici quelques-unes des situations d’urgence auxquelles l’équipe mobile d’urgence de MSF au Niger et au Mali a répondu cette année. Adolphe Masudi a dirigé l’équipe pendant 15 mois. Il témoigne ici de cette expérience.

Adolphe Masudi, coordinateur d'urgence MSFComment fonctionne cette équipe dédiée aux urgences ?

L’équipe est composée de différents professionnels (infirmiers, experts en logistique, experts en promotion de la santé, etc.) basés au Niger et au Mali. Nous sommes 19 personnes au total.

Notre travail est axé sur la surveillance épidémiologique et humanitaire dans les deux pays afin de pouvoir détecter des alertes. Lorsque nous recevons une alerte, nous devons enquêter (appeler nos contacts, collecter des informations, visiter la zone touchée, etc.) afin d’évaluer la pertinence d’une intervention.

Durant mon expérience à la tête de cette équipe, nous n’avons répondu à aucune situation d’urgence au Mali, mais nous avons assuré une surveillance de la situation dans le pays, et mobilisé le personnel de l’équipe basée au Mali pour répondre aux urgences du Niger.

En outre, mon assistant et moi-même avons travaillé pendant deux mois à Jakusko dans l’État de Yobe, dans le nord du Nigeria, où une urgence malnutrition et paludisme frappait la population. La plupart des enfants atteints de malnutrition sévère ont été traités en ambulatoire, et ceux souffrant de complications médicales graves ont dû être transférés au centre nutritionnel intensif de l’hôpital de Jakusko. Nous avons également vacciné plus de 140 000 enfants âgés de six mois à 15 ans contre la rougeole.

Quelle a été la toute première urgence à laquelle vous avez dû faire face avec cette équipe ?

Je suis arrivé au Niger en juin 2015 et la première intervention d’urgence que j’ai eu à coordonner a été une distribution de produits de première nécessité pour les réfugiés nigérians de la région de Diffa, dans le sud du pays, près de la frontière avec le Nigeria, qui fuyaient la violence liée à Boko Haram.

Au cours des six derniers mois de l’année 2015, notre équipe s’est principalement focalisée sur le soutien aux activités de MSF dans la région : de nombreuses attaques se produisaient à la frontière entre le Niger et le Nigeria, provoquant le déplacement de milliers de personnes. 

Au cours de l’année 2016, quelles sont les urgences auxquelles l’équipe a dû faire face ?

Tout d’abord, en janvier 2016, nous avons répondu à une épidémie de méningite à Tahoua, au Niger. Nous avons apporté notre aide au ministère de la Santé dans le traitement de plus de 130 cas et la vaccination de près de 70 000 personnes dans deux zones de la région.

Nous nous sommes ensuite rendus à Diffa, pour mener une campagne de vaccination préventive contre le choléra. Le risque élevé d’apparition de nouveaux cas, en particulier près du lac Tchad, le contexte d’insécurité qui pouvait se traduire à tout moment par une restriction de l’accès à cette région et le grand nombre de personnes déplacées rendaient cette campagne nécessaire. Plus de 84 000 personnes ont été ainsi vaccinées dans le camp de personnes déplacées de Yebi, dans la région de Bilabrim, ainsi que dans les villes de Bosso et de Toumour.

Par ailleurs, alors que nous organisions cette campagne contre le choléra, nous avons reçu une autre alerte : une épidémie de rougeole se répandait dans le camp de Yebi. Nous avons commencé la campagne de vaccination mais hélas la population a dû fuir en raison d’une attaque lancée par Boko Haram au début du mois de juin. Elle s’est alors refugiée dans deux camps situés près de la route principale qui traverse la région, à Kitchandi et à Wari Gazan. Nous avons donc dû réorganiser notre réponse vers ces nouveaux sites, et pu vacciner 24 000 enfants âgés de six mois à 15 ans. Dans le même temps, l’équipe s’est organisée pour répondre aux besoins les plus urgents de ces personnes déplacées en assurant, par exemple, la distribution de l’eau et la mise en place de cliniques mobiles.

Enfin, nous avons apporté un secours aux personnes sinistrées suite aux graves inondations qui ont touché quelques 10 000 personnes à Abalak, dans la région de Tahoua. Nous avons distribué 500 kits contenant des produits de première nécessité et avons mis en place des cliniques mobiles dans les cinq quartiers les plus touchés, dans les écoles où les personnes s’étaient regroupées. Nous avons également mis en place un soutien psychologique et organisé des séances de sensibilisation aux mesures d’hygiène et à la veille épidémiologique.

Quel a été le plus grand challenge de cette mission ?

L’élément le plus compliqué à gérer est la mobilité : une semaine vous vous trouvez  sur un site, la semaine suivante sur un autre. Vous n’avez pas encore terminé une intervention que vous avez déjà reçu une alerte concernant une autre urgence. A titre d’exemple, nous avons parfois dû diviser l’équipe en deux et répondre à plusieurs urgences en même temps.

Cependant, l’expérience a été positive. La réponse aux situations d’urgence est l’essence même de MSF, et nous devons continuer à mener ce genre d’intervention. Des équipes comme celle-ci nous permettent d’être plus efficaces dans la réponse aux situations d’urgence d’un pays ou d’une zone géographique, ce qui constitue notre première responsabilité en tant qu’organisation MSF.


 

Notes

    À lire aussi