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Aquarius : les gouvernements européens doivent cesser de marchander des vies humaines

A bord de l'Aquarius, navire de recherche et de sauvetage affrété par SOS MEDITERRANEE en partenariat avec Médecins Sans Frontières. 10 juin 2018.
629 rescapés étaient à bord de l'Aquarius, navire de recherche et de sauvetage affrété par SOS MEDITERRANEE en partenariat avec Médecins Sans Frontières, avant le transfert de 523 d'entre eux vers des navires italiens. 10 juin 2018. © Kenny Karpov/SOS Mediterranee

L’Aquarius a pu enfin accoster à Valence, et désembarquer les hommes, les femmes et les enfants à son bord qui avaient fui la guerre et la misère, et vécu l’horreur en Libye. Ils ont été transbordés d’un bateau à l’autre comme de la marchandise, et leur voyage en mer a été inutilement prolongé, dans des conditions très pénibles. Les gouvernements européens doivent cesser de marchander des vies humaines et d’obstruer les opérations de sauvetage.

En fermant ses ports, l’Italie a joué avec la vie de 630 rescapés

Pendant le week-end du 9 et du 10 juin, le navire de recherche et de sauvetage en mer l’Aquarius, affrété par SOS Méditerranée en partenariat avec MSF, a secouru plus de 200 personnes et en a recueilli 400 autres, transbordées par des navires des garde-côtes italiens.  Alors que le sauvetage et le transfert des 630 passagers avait été initié et coordonné par le Centre de coordination des secours maritimes italien (IMRCC), les autorités italiennes ont refusé que l’Aquarius accoste dans le port italien le plus proche, dans un geste de rupture avec les lois internationales et les pratiques prévalant jusqu’alors. Malte, qui disposait du port le plus proche a également refusé le désembarquement de l’Aquarius, en rejetant la responsabilité sur l’Italie.   

Le 11 juin, le gouvernement espagnol est intervenu en offrant à l’Aquarius la possibilité de désembarquer à Valence, 1300 kilomètres plus loin.

MSF a insisté auprès des autorités italiennes afin qu’elles autorisent l’Aquarius à accoster dans le port le plus sûr et le plus proche, comme le prévoit le droit maritime international. L’ONG a fait valoir les risques qu’un voyage de plus de quatre jours ferait prendre à ses 630 passagers, sur un bateau surchargé, avec des vivres et des possibilités de mise à l’abri limitées.

Au final, les autorités italiennes sont restées sourdes à nos appels.

D’abord, elles ont laissé entendre que MSF pourrait être autorisée à désembarquer les personnes vulnérables. Mais quand  nous avons fourni une liste de près de 200 personnes – mineurs non accompagnés ; malades et blessés, femmes enceintes et femmes seules avec enfants – les autorités italiennes ont dit non. Elles ont ensuite demandé que nous transférions seulement les sept femmes enceintes à bord, mais n’ont pas donné suite quand nous leur avons fait part des problèmes liés à la séparation des familles, et que nous leur avons demandé que ces femmes puissent être au moins accompagnées de leur mari. 

Le 12 juin, les autorités italiennes ont donné à l’Aquarius l’instruction de transférer 524 personnes sur les navires italiens et de se rendre avec les 106 rescapés restant à Valence.

Le sort des personnes rescapées ne doit pas faire l’objet d’un bras de fer politique

Aujourd’hui, les gouvernements européens ne cherchent pas à sauver la vie des migrants et des réfugiés en mer. Leur unique obsession est de fermer leurs portes et de renforcer leurs frontières. Ils ont activement soutenu les garde-côtes libyens, afin qu’ils ramènent les personnes interceptées dans les eaux internationales vers la Libye, où elles seront traitées de façon inhumaine et exposées à tous les abus. 

Les gouvernements européens doivent reconnaître la nécessité des opérations de recherche et de sauvetage en mer. En 2018, plus de 500 personnes se sont déjà noyées en Méditerranée centrale, en tentant de rejoindre l’Europe à bord d’embarcations précaires.
 

L’Aquarius est un des derniers navires de recherche et de sauvetage en Méditerranée centrale coordonné par des organisations non-gouvernementales.

Il doit continuer à être autorisé à sauver des vies.

© Kenny Karpov/SOS Mediterranee

Du 1er janvier au 8 juin 2018,  l’Aquarius avait déjà secouru et/ou transféré 2 350 personnes, toutes sauvées de la noyade. Mais depuis l’année dernière, la capacité des ONG et de la société civile à mener des opérations de recherche et sauvetage en mer a été entravée par la multiplication d’obstacles bureaucratiques, de mesures d’intimidation, et des procédures judiciaires à l’encontre de personnel d’ONG.

La campagne de dénigrement et d’intimidation visant les initiatives non gouvernementales en mer doit cesser.

Comment expliquer autant d’entraves spectaculaires à la mission de sauvetage de l’Aquarius alors même que le Dicotti, navire des garde-côtes italiens, était autorisé dans le même temps à désembarquer 900 personnes en Italie ? 

L’arrivée à Valence marque la fin d’un terrible voyage pour 630 personnes. Maintenant, l’Europe doit s’engager à sauver des vies, et permettre le désembarquement et la prise en charge des rescapés dans des conditions acceptables. Les équipes à bord de l’Aquarius restent quant à elle déterminées à continuer leurs opérations de recherche et de sauvetage en Méditerranée centrale.

Notes

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