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Lutte contre le cancer: MSF mène deux projets d’oncologie au Malawi et au Mali

Fighting against cervical cancer
La salle d'attente du projet cancer du col de l'utérus de MSF, à l'hôpital Queens Elizabeth de Blantyre, au Malawi. © DIEGO MENJIBAR

A l’occasion de la  journée mondiale contre le cancer, le 4 février, nous faisons le point sur les projets d’oncologie de MSF au Malawi et au Mali. Interview avec Alice Authier, responsable d’unité médico-opérationnelle d’oncologie pour MSF.

Comment MSF a-t-elle été amenée à s’engager dans la lutte contre le cancer ? 

Dès 2017, nous avons mené un premier état des lieux en analysant la prévalence des différents types de cancers dans les pays où nous intervenons, et plus largement dans les pays à ressources limitées, et les enjeux liés à leur prise en charge.   

Le cancer est  l’une des principales causes de mortalité dans le monde, mais avec de grandes disparités: 70% des décès liés à la maladie surviennent dans les pays à revenu faible ou intermédiaire. Sur le continent africain des cancers qui pourraient être prévenus ou guéris, s’ils étaient dépistés à temps notamment, le sont beaucoup moins.

C’est sur la base de ce constat, que nous avons décidé, en 2018, de nous investir dans la prévention et la prise en charge des cancers féminins (cancer du col de l’utérus et cancer du sein), au Mali et au Malawi. Le taux de prévalence du cancer du col de l’utérus au Malawi est un des plus élevé au monde.  Il représente près de 40% des cancers chez les femmes et provoque plus de 2 300 décès par an. Au Mali, ces deux cancers sont les plus fréquents chez les femmes et provoquent plus de 2600 décès par an. 

Si nous nous sommes concentrés sur ces deux types de cancers, c’est d’une part en raison de leur forte prévalence mais également parce que ce sont des pathologies que l’on peut dans une certaine mesure prévenir, notamment dans le cas du cancer du col de l’utérus, et dans les deux cas, dont les chances de guérison sont élevées si la maladie est détectée et prise en charge à temps. Le manque d’accès à l'information et aux services de prévention et de traitement dans ces deux pays illustre particulièrement ces inégalités. 

Quels sont les spécificités de l’offre de soins en oncologie dans ces deux contextes ? 

Au Malawi, notre collaboration avec les autorités de santé depuis 25 ans, pour répondre à l’épidémie de VIH/sida nous a permis de développer une connaissance des enjeux liés à l’accès aux soins dans le pays, et de nous positionner comme acteur de santé reconnu. Cela nous a été très utile pour démarrer le projet autour du cancer du col de l’utérus. L’offre de soins était incomplète au moment du démarrage du projet, les services de dépistage rarement ou non disponibles dans les centres de santé et les traitements insuffisants au niveau tertiaire.

Au Mali, c’est un peu différent. Il existait déjà un début de prise en charge avec des spécialistes formés mais qui disposaient de moyens insuffisants aux vues des besoins importants comme, par exemple, la prise en charge de certains médicaments anticancéreux par l’Etat mais en quantité insuffisante, ou de séances de radiothérapie gratuites pour les patientes, mais avec de nombreuses jours de panne des machines. En ce qui concerne le dépistage et le diagnostic précoce, le constat était que les femmes consultaient peu en préventif et plutôt à l’apparition de symptômes, essentiellement en raison du manque d’information et des coûts élevés des bilans pré-thérapeutiques ou de diagnostic, qui restaient à leur charge. Résultat, les patientes arrivaient souvent à un stade de cancer déjà très avancé.

Campagne de dépistage de masse des cancers du sein et de l'utérus lancée par MSF et le ministère de la Santé dans la commune IV de Bamako, en mars 2022.
 © Mohamed Dayfour Diawara
Campagne de dépistage de masse des cancers du sein et de l'utérus lancée par MSF et le ministère de la Santé dans la commune IV de Bamako, en mars 2022. © Mohamed Dayfour Diawara

Et concrètement quels sont les différents volets d’activités menés par MSF dans ces deux projets ? 

Dans les deux pays, les programmes se sont construits progressivement pour répondre aux besoins de prise en charge de ces cancers sur tout le continuum de soins. Aujourd’hui nous intervenons à quatre niveaux principaux :  la prévention primaire et secondaire (par la sensibilisation, la vaccination et le dépistage); le diagnostic et le traitement (que ce soit de la chirurgie, de la chimiothérapie ou radiothérapie); les soins palliatifs si nécessaire ;  les soins de support aux patientes tout au long de leur parcours (santé mentale, lien avec les associations de patientes, kinésithérapie, soutien social).

Au Malawi, nous avons commencé par déployer des activités de dépistage, dans dix centres de santé dans les districts de Chiradzulu et de Blantyre, plus tard, couplé avec une activité de dépistage mobile (via un camion) Nous avons ensuite soutenu le renforcement de capacité de prise en charge ambulatoire et chirurgicale au sein de l’Hôpital Queen Elizabeth de Blantyre. Forte de plus de quatre années d’expérience, l’équipe MSF en place propose un parcours personnalisé pour chaque femme. Leur sont proposées des options thérapeutiques allant de la chirurgie à la chimiothérapie. 

Aujourd'hui ces traitements sont délivrés au sein de différentes structures : la chirurgie et la chimiothérapie dans l'hôpital Queen Elizabeth, et la radiothérapie dans une structure privée de Blantyre. Avant que le traitement par radiothérapie soit disponible au Malawi, nous avons organisé le référencement de certaines patientes au Kenya, pour bénéficier d’une prise en charge complémentaire. Lorsque la maladie est détectée à un stade trop avancé,  nous offrons un parcours de soins palliatifs à l’hôpital ou à domicile et dans les régions les plus éloignées de Blantyre. Enfin, chaque patiente peut disposer de service d’éducation thérapeutique, d’accompagnement, de soutien financier et de kinésithérapie tout au long de son parcours, pour mieux vivre avec ses traitements et la maladie.

La chanteuse Bintou Soumbounou lors de la cérémonie de lancement de la campagne d'Octobre Rose au centre de santé communautaire du quartier de Yirimadio à Bamako, octobre 2021. 
 © Mohammed Dayfour Diawara
La chanteuse Bintou Soumbounou lors de la cérémonie de lancement de la campagne d'Octobre Rose au centre de santé communautaire du quartier de Yirimadio à Bamako, octobre 2021.  © Mohammed Dayfour Diawara

Au Mali, nous nous sommes d’abord concentrés sur les soins palliatifs car il était urgent de prendre en charge toutes ces femmes qui se présentaient à l’hôpital du Point G à Bamako, avec des cancers à des stades très avancés. Nous avons donc travaillé sur la prise en charge de la douleur et des plaies tumorales, ces plaies extrêmement douloureuses et socialement excluantes car visibles et souvent malodorantes. Puis nous nous sommes investis dans le dépistage et le diagnostic précoce. D’abord, en organisant avec des associations des campagnes de communication (octobre rose) afin de sensibiliser, puis en renforçant les services de dépistages gratuits dans un nombre important de centres de santé de Bamako. En travaillant sur la disponibilité et la qualité des services de diagnostic, en réhabilitant le laboratoire d’anatomo-pathologie de l’hôpital du Point G, nous contribuons à détecter plus tôt un cancer du sein ou du col de l’utérus et ainsi à augmenter les chances de guérison.

La prise en charge se fait ensuite de manière pluridisciplinaire, dans les services de chirurgie des hôpitaux du ministère de la Santé, dans le service de chimiothérapie, que nous soutenons notamment dans l’approvisionnement en médicaments anticancéreux et dans l’administration et le suivi de ceux-ci. Le service de radiothérapie reste un axe d’amélioration important au Mali. Dans les deux projets, nous nous efforçons de garder une approche centrée sur la patiente tout au long du parcours thérapeutique. Les femmes que nous accueillons témoignent d’un parcours difficile, souvent stigmatisées à l’annonce de la maladie, parfois avec une perte de soutien de l’entourage familial, et / ou une perte d‘autonomie physique et financière. C’est pourquoi nous portons une attention particulière au support psychosocial et holistique : également en collaboration avec des associations de patientes, ou une collaboration avec des organismes de soutien financiers pour atténuer les effets de fardeau financier du cancer. 

Quelles sont aujourd’hui les pistes d’amélioration pour MSF dans ces deux projets ? 

De toute évidence, le dépistage précoce de ces cancers est essentiel ainsi que l’accès à des traitements de qualité, si l’on veut réduire la mortalité. La documentation et la recherche sont essentiels pour faire évoluer nos pratiques et définir les modèles de soins les plus adéquats. 

Au Malawi par exemple, nous participons à une initiative en collaboration avec le National Cancer Insitute, la Fondation MSF et Epicentre pour participer à l’amélioration de pratiques de dépistage du cancer du col de l’utérus plus performantes, combinant la mise à disposition de tests HPV à moindre coût, l’apport de l’intelligence artificielle pour catégoriser les femmes avec un haut risque de développer des lésions précancéreuses et pouvoir les traiter le plus rapidement.  

 

Notes

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