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Malnutrition en Afghanistan : à Hérat « Nous avons 50 enfants dans 20 lits »

Entrée du centre de nutrition thérapeutique MSF de l'hôpital régional d'Hérat. Afghanistan 2021.
Entrée du centre de nutrition thérapeutique MSF de l'hôpital régional d'Hérat. Afghanistan 2021. © Sandra Calligaro

Chaque semaine, des dizaines d’enfants malnutris sont pris en charge à l’hôpital d’Hérat, dans l’ouest de l’Afghanistan, où les équipes MSF travaillent au sein du service pédiatrique de soins intensifs et gèrent un centre de nutrition thérapeutique. Six mois après la prise de pouvoir des talibans, le système de santé est encore fragilisé et la crise économique est toujours présente. 

Nyayesh est dans le coma depuis trois jours. « Elle a huit mois et souffre d’une pneumonie, car son corps est affaibli par la malnutrition, explique la Dr Solveig Köbe, une pédiatre MSF. Elle était inconsciente lorsqu'elle est arrivée à l’hôpital. Son cœur était extrêmement faible. » Malgré l’injection d’adrénaline, l’apport en oxygène et de fortes doses d’antibiotiques pour lutter contre l’infection, l’enfant est encore inconsciente.

Les enfants atteints de malnutrition aiguë sévère sont plus vulnérables face à de nombreuses complications, comme les infections respiratoires ou la rougeole. « Ils manquent d'énergie et de force pour combattre les infections, détaille Solveig Köbe. Une malformation cardiaque congénitale rend la situation encore plus difficile pour Nyayesh. » 

L'accès à la nourriture était compliqué en Afghanistan bien avant la prise de pouvoir des talibans en août dernier. Toutefois, les récoltes ont diminué à cause du conflit et lorsque celui-ci a pris fin, les bailleurs internationaux ont cessé de donner des fonds, ce qui a contribué au développement d’une crise économique dans le pays. Les banques étaient paralysées et des milliers d’Afghans ont perdu leur emploi, tandis que le prix des denrées alimentaires a augmenté. « Nous n'avons rien à manger, ni blé ni quoi que ce soit, explique une femme dont la petite-fille est prise en charge par l’équipe MSF d’Hérat. Il n'y a pas de travail pour nous. Ma petite-fille est tombée malade à cause du manque de nourriture et de la pauvreté. »

Une mère en discussion avec une infirmière MSF dans le centre de nutrition thérapeutique MSF de l'hôpital régional d'Hérat. Afghanistan. 2021.
 © Sandra Calligaro
Une mère en discussion avec une infirmière MSF dans le centre de nutrition thérapeutique MSF de l'hôpital régional d'Hérat. Afghanistan. 2021. © Sandra Calligaro

Le système de santé a menacé de s'effondrer après le changement de pouvoir. « Il était déjà sous-financé et dépendant de l'aide internationale. Cette aide s’est arrêtée brutalement », explique Solveig Köbe. Elle a été rétablie depuis, mais dans des proportions moindres. De nombreuses administrations ne peuvent plus payer les salaires du personnel, ni les frais de fonctionnement.

Des soins vitaux

En septembre 2021, lorsque le système de santé s’est retrouvé au plus bas, MSF a embauché des médecins supplémentaires pour la clinique mobile que l’association gère dans la banlieue d’Hérat. L’équipe a traité jusqu’à 200 patients par jour : des femmes enceintes, des enfants et des personnes atteintes de maladies non transmissibles. En octobre, MSF a augmenté la capacité d’hospitalisation de son centre de nutrition thérapeutique. Puis, en décembre 2021, l’association a commencé à soutenir la salle d'urgence et l'unité de soins intensifs du service pédiatrique de l'hôpital régional d'Hérat. Au cours des premières semaines, le nombre de patients a quintuplé par rapport à l'année précédente.

Solveig Köbe, pédiatre MSF, avec Nyayesh. Afghanistan. 2022. 
 © MSF
Solveig Köbe, pédiatre MSF, avec Nyayesh. Afghanistan. 2022.  © MSF

« En ce moment, nous avons 50 enfants dans 20 lits, détaille Solveig Köbe. Leurs mères restent avec eux 24 heures sur 24. Elles dorment à côté de leurs enfants sur des fauteuils pliants. Nous sommes au-delà de nos capacités, c'est incroyablement stressant, nous vivons chaque jour de grandes difficultés, mais nous faisons tout pour soigner ces enfants. » En janvier, en moyenne 66 enfants étaient admis dans le service de nutrition thérapeutique chaque semaine, soit 40 % de plus que le mois précédent.

Après une autre journée dans le coma, Nyayesh se réveille enfin. Elle se rétablit progressivement, n'a plus besoin d’oxygène et prend à nouveau du lait. Pourtant, des inquiétudes quant à son état de santé demeurent. « Nyayesh peut vivre avec sa malformation cardiaque. Mais ses chances de rester en bonne santé seraient encore meilleures si elle pouvait être opérée. Bénéficier de ce type de traitement est difficile en Afghanistan, explique Solveig Köbe. Elle a quand même surmonté le pire : sortir du coma et vaincre sa pneumonie. »

Notes

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