Souffrant, traumatisés, et sans autre alternative que la détention arbitraire
« Nous sommes extrêmement inquiets pour nos patients: comment peuvent-ils guérir en étant enfermés dans des cellules, dans des conditions d’hygiène très précaires, et en dormant sur des couvertures ou des matelas posés à même le sol ? Dormir ainsi cause une douleur inimaginable pour les grands brûlés. Certains ne peuvent ni s’asseoir ni marcher, poursuit Jay Defranciscis. Nos équipes commencent à voir des patients développer de graves infections respiratoires, des pneumonies par exemple, après les heures passées à se débattre dans l’eau. » L’accès limité des détenus à de l’eau potable et à une alimentation adéquate peut ralentir ou empêcher leur guérison et aggraver au contraire leur état de santé.
De nombreux rescapés font le deuil de proches perdus lors du naufrage. Ils viennent de vivre un épisode particulièrement traumatisant en mer, qui vient s’ajouter à tous les dangers affrontés lors de leur parcours en Libye. Au lieu de recevoir l’assistance dont ils ont besoin, ces réfugiés et migrants sont arrêtés et détenus dans des conditions de vie déplorables, sans aucun garde-fou, sans recours ni alternatives légales.
Parmi les détenus, MSF a rencontré des demandeurs d’asile et des réfugiés qui ont été enregistrés ou reconnus par le HCR en Libye ou dans un autre pays. Leurs perspectives sont particulièrement sombres : le mécanisme géré par le HCR pour les évacuer depuis la Libye vers le Niger et les réinstaller dans un pays tiers, lancé dans la foulée de l’indignation globale générée par les images de CNN l’année dernière, est à l’arrêt depuis des mois. Les demandeurs d’asile et réfugiés en Libye font ainsi désormais face à une détention arbitraire prolongée et sont exposés au risque du trafic humain, les réseaux criminels étant bien souvent la seule option disponible pour les personnes qui continuent leur parcours en quête de sécurité.
Les violents combats qui ont éclaté à Tripoli le 26 août ont également joué un rôle déterminant dans la fuite d’une partie des personnes qui étaient à bord de ces canots ayant pris la mer le 1er septembre.
MSF réitère son appel pour mettre fin à la détention arbitraire des réfugiés et migrants en Libye et pour tout mettre en œuvre pour évacuer ces personnes en danger. MSF appelle plus particulièrement :
- le HCR et les gouvernements des pays dits « sûrs » qui le peuvent à organiser l’évacuation des réfugiés et demandeurs d’asile et faciliter leur réinstallation;
- l’OIM et les pays d’origine à accélérer les procédures de retours volontaires
- Enfin, l’Union européenne et les autorités libyennes doivent cesser d’intercepter en mer Méditerranée les réfugiés et migrants qui tentent de fuir la Libye pour les y ramener, dans le but de réduire les arrivées en Europe à tout prix.