Recrudescence des violences au Mozambique : « J’ai faim et je suis hanté par les souvenirs des attaques »

Une équipe MSF se rend dans un camp de déplacés. 2021.
Une équipe MSF se rend dans un camp de déplacés. 2021. © Tadeu Andre/MSF

Depuis le début de l’année 2024, plus de 80 000 personnes ont été obligées de fuir dans la région de Cabo Delgado, dans le nord-est du Mozambique, pour échapper aux nouvelles attaques de groupes affiliés à la mouvance islamiste. Le conflit qui oppose ces derniers aux forces gouvernementales a commencé en 2017 et a provoqué le déplacement de plus d’un million de personnes, parmi lesquelles 540 000 n’ont toujours pas pu regagner leur foyer. Les équipes MSF travaillent notamment dans le district de Macomia, l’un des plus touchés par la violence.

Les personnes qui ont fui les attaques et les combats décrivent des épisodes de violence extrême, notamment des meurtres, des violences sexuelles, des enlèvements, des extorsions et des incendies de villages. Beaucoup ont vu leurs proches et leurs voisins être assassinés, décapités ou tués par balle. Certains ont perdu toute leur famille.

« Les personnes déplacées sont souvent traumatisées par ces expériences extrêmes, explique Esperança Chinhanja, psychologue MSF à Macomia. Certaines souffrent d'anxiété, de crises de panique, d'insomnie ou de pensées suicidaires. » En outre, étant donné la récurrence et le nombre important d’épisodes de violence, certains habitants ont été obligés de fuir à plusieurs reprises au cours des dernières années.

« Lorsque nous avons entendu des coups de feu, nous avons commencé à courir, explique Amade*, un agriculteur âgé de 60 ans, qui vit désormais dans un camp de déplacés à Macomia. C’était la quatrième fois que les habitants de mon village fuyaient les attaques depuis 2020. Nous n’avons rien à manger. J’ai perdu tellement de poids que je ne reconnais même plus mon corps. La nuit, je n’arrive pas à dormir. J’ai faim et je suis hanté par les souvenirs des attaques. »

En janvier 2024, Macomia comptait 76 000 personnes déplacées, qui avaient rejoint le district ces dernières années pour échapper aux attaques. En février, 3 600 nouvelles personnes les ont rejointes. « Les dernières attaques ont été les plus brutales, car elles se sont répétées pendant deux semaines. Nous avons tout perdu, déplore Ernestina, une sage-femme qui habitait un village à 40 km de Macomia. C’est la troisième fois que je suis obligée de fuir mon foyer et aujourd’hui, je vis dans un centre pour déplacés à Macomia. J’aide les femmes enceintes de ma communauté et j’oriente les cas les plus compliqués vers la clinique MSF. Ce travail m’aide à rester debout. »

D’autre part, le conflit continue d’avoir un impact significatif sur l’accès aux soins de santé. À Macomia, sur sept centres de santé existants gérés par le ministère de la Santé avant le conflit, un seul fonctionne encore. Dans ce cadre, les équipes de Médecins Sans Frontières soutiennent trois cliniques dans le village de Macomia pour fournir une assistance vitale aux populations affectées par la violence.

*Le nom a été modifié pour protéger l'identité du témoin.

Notes

    À lire aussi