Tuberculose : accélérer la mise à disposition de nouveaux traitements, seule chance de guérison pour des milliers de malades

Hanif, un patient atteint de tuberculose multirésistante, prend sa dose quotidienne de médicaments, chez lui, à Mumbai.
Hanif, un patient atteint de tuberculose multirésistante, prend sa dose quotidienne de médicaments, chez lui, à Mumbai. © Atul Loke/Panos Pictures

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande désormais l’utilisation combinée de la bédaquiline et du délamanide, sur une période supérieure à six mois, dans le traitement de la tuberculose multirésistante. L’utilisation de ces deux nouveaux médicaments contre la tuberculose pour obtenir de nouvelles lignes de traitement plus efficaces est un espoir majeur pour les personnes atteintes des formes multirésistantes de la maladie. Mais les politiques sanitaires continuent de freiner leur mise à disposition, mettant ainsi en jeu la vie de millions de malades, en Inde comme dans le reste du monde. 

À Mumbai, 256 patients atteints de tuberculose multirésistante ont été traités par MSF en utilisant de façon concomitante la bédaquiline et le délamanide, pendant plus de six mois, comme l’autorise désormais l’OMS. 

Le cas de Shreya Tripathy, largement couvert par les médias en Inde, est emblématique de la lutte des patients pour accéder à des traitements leur offrant de réelles chances de guérison. La jeune indienne, qui vivait dans l’État du Bihar, a dû parcourir près de 1 500 kilomètres jusqu’à Mumbai pour y trouver un traitement, que MSF a soutenu grâce à son partenariat avec l’hôpital Hinduja. 

En 2018, la bédaquiline n'était disponible que dans six sites pilotes en Inde et le délamanide l'était seulement dans le cadre d’un usage compassionnel. Shreya et sa famille ont mené une bataille juridique qui a permis d’accélérer le déploiement de la bédaquiline dans le pays – malheureusement trop tard pour la jeune fille, qui a succombé à la maladie le 9 octobre de cette année-là.

Un défi majeur

En Inde, comme dans la plupart des pays lourdement touchés par la tuberculose multirésistante, le défi va au-delà de l’accès à la bédaquiline et au délamanide. Lorsque ces deux médicaments ont été introduits respectivement en 2013 et 2014, ils n'ont pas été immédiatement approuvés et n'étaient disponibles que dans le cadre d'un usage compassionnel. Comme dans la plupart des pays, ce n'est qu'en 2016 – plusieurs années après que MSF a commencé à les utiliser – que le programme national de lutte contre la tuberculose a introduit la bédaquiline dans le cadre d'un traitement pilote d’une période de six mois, conformément aux recommandations de l'OMS à l’époque. Le délamanide a été introduit dans le pays beaucoup plus tardivement, en 2019.

Hanif, un patient atteint de tuberculose multirésistante, prend sa dose quotidienne de médicaments, chez lui, à Mumbai.
 © Atul Loke/Panos Pictures
Hanif, un patient atteint de tuberculose multirésistante, prend sa dose quotidienne de médicaments, chez lui, à Mumbai. © Atul Loke/Panos Pictures

Avant l’arrivée de la bédaquiline et du délamanide, les médicaments disponibles pour lutter contre la tuberculose multirésistante présentaient des limites majeures, notamment des effets secondaires importants et des résultats aléatoires en fonction des patients. En raison du manque de preuves scientifiques montrant l’efficacité de la combinaison de ces deux médicaments sur une période de plus de six mois, les autorités indiennes ont longtemps été réticentes à soutenir leur importation via les donations du Global Drug Facility (GDF). 

À l’époque, MSF a dû recourir à des importations pour chaque personne malade, c’est-à-dire des processus coûteux, longs et complexes. Le traitement complet d’un seul patient sous bédaquiline et délamanide coûtait 13 000 euros. Le coût du traitement est descendu à 8 000 euros par patient à la suite de l’approbation des autorités de santé et via le GDF. 

Ces obstacles ont souvent conduit à des conséquences tragiques, car pour de nombreux patients, la bédaquiline et le délamanide étaient la dernière chance de guérir de la tuberculose.

Les initiatives de traitement de l'Institut national de la tuberculose et des maladies respiratoires (NITRD) à Delhi et de MSF à Mumbai ont commencé 2 à 3 ans avant les nouvelles recommandations de l'OMS. L'Inde a été parmi les premiers pays à adopter ce protocole, bien qu'il s'agisse d'une initiative pilote concernant seulement une poignée de patients. 

Faciliter l’accès aux traitements

Malgré les récentes recommandations de l'OMS en faveur de l’utilisation combinée de la bédaquiline et du délamanide au-delà de six mois, la lutte contre la tuberculose reste un défi de taille. La lenteur des politiques nationales de santé, le manque de préparation et de capacités ainsi que l’attitude conservatrice de la communauté médicale ralentissent l’introduction de ces nouveaux traitements dans les pays touchés par la tuberculose multirésistante. Ces médicaments doivent être inclus dans les programmes nationaux et leur utilisation généralisée, afin de sauver la vie de milliers de patients atteints de la maladie.

Il faut donc continuer à plaider en faveur de l’accès à des diagnostics et des traitements efficaces et abordables, accessibles à tous en plaçant l’intérêt des patients au cœur des préoccupations. Les réglementations et les politiques doivent « faciliter l’accès aux traitements qui peuvent sauver des vies, et non créer des barrières » – comme l’a déclaré le haut responsable du ministère de la Santé indien alors qu’il approuvait la proposition soumise par MSF pour utiliser ce protocole, un an avant les nouvelles directives de l’OMS en la matière.

Notes

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