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Violences en Haïti : « nous sommes obligés de nous battre pour garder nos structures de santé ouvertes »

Haïti Médécins Sans Frontières
© Avra Fialas/MSF

L’assassinat du président Jovenel Moïse le 7 juillet dernier s’ajoute au climat d’incertitude à Haïti qui traversait déjà une crise multiforme. Depuis avril, Médecins Sans Frontières (MSF) a augmenté ses capacités d’hospitalisation sur place pour faire face aux vagues de blessés victimes d’une violence quotidienne. L’accès aux soins se détériore alors que les cas de Covid-19 augmentent.

« Pour décrire le quotidien, il faut emprunter au vocabulaire de la guerre, raconte Stéphane Doyon, responsable des activités de MSF en Haïti. La capitale Port-au-Prince est traversée par plusieurs lignes de front. Des quartiers entiers sont sous la coupe de groupes armés aux territoires mouvants. Dans ces quartiers populaires souvent densément peuplés, les rues sont barricadées, et dans certaines zones, il y a des snipers qui tirent à vue. » Soumis à un niveau de violence inouï, les Haïtiens n’ont d’autre choix que d’abandonner leur domicile pour fuir les affrontements entre gangs. L’ONU estime à 18 000 le nombre de personnes déplacées, accueillies soit chez des proches, soit dans des sites peu adaptés, comme des écoles ou des églises. Ce phénomène a été récemment observé, l’intensité des combats ces dernières semaines ayant poussé la majorité à se réfugier loin de chez eux.

À Cité Soleil, la population se retrouve piégée par les conflits tandis que les principales voies d’accès à Port-au-Prince sont contrôlées par les gangs, entrer ou sortir est devenu compliqué. La criminalité globale, vols, extorsions, braquages ou kidnappings s’ajoute à ce climat de guerre : « Certains jours, nos équipes voient arriver jusqu’à 20 patients. En moyenne, plus de 60 % d'entre eux sont des victimes de blessures par balles ou par armes blanches » explique Stéphane Doyon. Dans d'autres structures à Port-au-Prince et aux Gonaïves, MSF continue de prendre en charge les victimes de violences sexuelles.

MSF souhaiterait étendre ses activités pour faire face aux besoins de la population, notamment suite à l’augmentation des cas de Covid-19, mais la violence ordinaire oblige déjà les équipes à se battre pour garder les structures existantes ouvertes. « En sortant dans la rue, notre personnel de santé, au même titre que la population, vit dans la peur des balles perdues ou des braquages. Un employé de MSF qui travaillait à Tabarre a été assassiné le 25 mai par des hommes armés, alors qu’il avait fini sa journée de travail à l’hôpital et qu’il rentrait chez lui, rapporte Stéphane Doyon. Le mois dernier, une explosion de violence dans le quartier de Martissant a mis le personnel du centre d’urgence de MSF, situé soudainement sur la ligne de front, à rude épreuve. Pendant plusieurs jours, le personnel soignant a dû prendre en charge des blessés tout en se protégeant des balles perdues et une ambulance de MSF a été braquée. Le 26 juin, la structure a été la cible de tirs directs et a finalement été évacuée. »

Déjà précaire et inégalitaire, le système de santé se détériore. L’offre de soins est essentiellement privée et les structures de santé publiques sont démunies de moyens. Le contexte ne permettait déjà pas de garantir la sécurité du personnel médical et des patients, mais l’assassinat du Président rajoute de l’incertitude dans un pays qui semble au bord du chaos.

Notes

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