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L’Etat français livre des bateaux à la Libye : des ONG saisissent la justice !

sauvetage en Méditerranée centrale, décembre 2016
© Kevin McElvaney

Huit associations dont Médecins Sans Frontières France ont décidé de saisir aujourd’hui la justice pour dénoncer la complicité de la France dans les violations des droits humains en Libye et demander auprès du Tribunal Administratif de Paris la suspension d’une livraison d’équipements prévue par le Ministère des Armées à destination des garde-côtes libyens pour intercepter réfugiés et migrants en mer et les ramener de force en Libye. Il existe des doutes sérieux sur la légalité d’une telle livraison.

En février dernier, Florence Parly, ministre des Armées, annonce l’achat par la France de six embarcations rapides au profit des garde-côtes libyens pour faire face au « problème de l’immigration clandestine ». Pour la première fois, la France affiche publiquement une collaboration bilatérale directe et concrète avec les garde-côtes libyens. En achetant six bateaux pour leur compte, la France participe au cycle de violations des droits humains commises en Libye contre les réfugiés et les migrants en donnant des moyens logistiques pour l’intensifier.

Les garde-côtes libyens ont à plusieurs reprises délibérément mis en danger la vie et la sécurité des réfugiés et migrants qu’ils sont censés secourir : en repoussant à l’eau des personnes en détresse, en les menaçant de leurs armes, en tirant des coups de feu. Des cas de vols sur les rescapés ont été également recensés, de même que des menaces à l’encontre d’équipages de navires d’ONG engagées dans des opérations de sauvetage.

 

La plupart des personnes actuellement détenues dans les centres de détention de Libye ont été interceptées en mer par les garde-côtes libyens. Les réfugiés et migrants sont systématiquement transférés dans des centres de détention où ils sont maintenus dans des conditions inhumaines. Dans un environnement instable,  les viols, la torture, les exécutions extra-judiciaires, le travail forcé, l’esclavage, font partie des violences extrêmes auxquelles sont exposés les réfugiés et migrants en Libye.

L’Etat français ne peut ignorer la situation qui prévaut en Libye et les conséquences de cette livraison de bateaux destinés à intercepter réfugiés et migrants et à les ramener de force en Libye sur la vie et la sécurité de ces personnes : la France devient officiellement complice des atteintes commises à leur encontre. 

Ces bateaux sont le symbole de l’externalisation vers la Libye des politiques européennes de contrôle des migrations. Depuis plusieurs années, nos associations et des instances internationales alertent régulièrement sur les conséquences de cette collaboration pour les droits des personnes migrantes et réfugiées qui sont piégées dans cet enfer. Les soutiens financiers et matériels des gouvernements européens aux garde-côtes libyens se sont accélérés ces dernières années, en échange de leur coopération en vue d’empêcher les réfugiés et les migrants d’atteindre les côtes européennes.

 

Liste des signataires : Amnesty International, Médecins sans Frontières France, le GISTI, ASGI, Migreurop, la Cimade, Avocats sans Frontières France, la Ligue des droits de l’homme.

 

Médecins Sans Frontières travaille depuis 2011 en Libye et mène depuis deux ans des programmes d’assistance humanitaire auprès des populations réfugiées et migrantes détenues dans des centres de détention libyens. Plus de 6,500 réfugiés et migrants sont actuellement arbitrairement détenus dans une quinzaine de centres de détention libyens officiellement sous l’autorité du Ministère de l’Intérieur. Parmi ces personnes détenues, environ 3,000 le sont dans des zones où se déroulent les combats en cours depuis le 4 avril ou à proximité. Bloquées, exposées aux tirs croisés, et avec un accès encore plus restreint que d’ordinaire à des besoins vitaux de base, elles doivent être évacuées de toute urgence hors du pays.

Notes

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